Droits de l’Homme: le travail de l’ONU confronté à une « menace existentielle », alerte une ONG
Le travail de l’ONU en matière de droits humains fait face à une « menace existentielle » en raison de coupes budgétaires et d’un contexte financier difficile, alerte l’ONG Service international pour les droits de l’Homme (ISHR), dans un rapport publié mardi 21 octobre 2025 à New York.
Selon l’ONG basée en Suisse, le non-paiement des cotisations par les États-Unis, conjugué aux manœuvres de la Chine et de la Russie pour réduire le financement de certains organismes, pourrait porter un coup sévère aux efforts de l’ONU pour protéger les droits humains et enquêter sur les violations dans le monde. « À l’heure où l’ONU est en pleine réforme et frappée par une crise financière sévère, ces efforts constituent une menace existentielle pour le système des droits humains », souligne l’ISHR, qui pointe particulièrement le risque pesant sur les enquêtes cruciales.
En République démocratique du Congo, par exemple, une enquête sur les crimes de guerre ordonnée par le Conseil des droits de l’Homme n’a pu être lancée faute de fonds, et d’autres investigations pourraient être paralysées pour les mêmes raisons. La situation financière de l’organisation est telle que l’ONU envisage une réduction de 15 % de son budget ordinaire pour 2026 afin de faire face à ses problèmes chroniques de liquidités. Ces difficultés ont été exacerbées par la suspension du financement américain depuis janvier 2025.
Au 30 septembre, les États-Unis devaient encore 1,5 milliard de dollars de cotisations impayées, dont 300 millions d’arriérés accumulés lors des années précédentes. La Chine, deuxième contributeur, a également payé ses fonds « extrêmement tard », rendant une partie de ceux-ci inutilisables, rappelle l’ISHR.
Le rapport met en lumière le risque de sous-financement chronique du pilier des droits humains, qui reçoit moins de 1 % du budget total de l’ONU. Les coupes envisagées pourraient avoir un impact significatif sur le Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’Homme (HCDH), qui a déjà perdu des dizaines de millions de dollars de contributions volontaires américaines cette année. Au total, l’agence n’a reçu que 73 % des contributions promises pour 2025, laissant 67 millions de dollars d’impayés. « On parle de victimes moins protégées, de personnes qui ne peuvent obtenir justice. On a atteint le seuil critique d’efficacité du système », avertit Liz Throssell, porte-parole du HCDH.
Kaoru Okuizumi, directrice adjointe du Mécanisme d’enquête indépendant pour le Myanmar, a précisé que ces coupes pourraient entraîner la suppression de 27 postes, soit un tiers des effectifs, menaçant la collecte de preuves sur les crimes graves.
L’ISHR dénonce également l’« instrumentalisation » du budget de l’ONU par certains États. La Russie et la Chine, notamment, ont utilisé les négociations budgétaires pour protéger leurs alliés et réduire drastiquement le financement des droits humains, avec l’appui d’autres États autoritaires. Certaines décisions aboutissent même à bloquer le financement d’enquêtes initialement soutenues par ces pays eux-mêmes. « Les propositions avancées par la Chine et la Russie visent clairement à paralyser le HCDH. Il ne s’agit pas d’efficacité », insiste Angeli Datt, auteure du rapport.
Le rapport de l’ISHR alerte sur les conséquences directes de cette crise sur la protection des droits humains dans le monde et sur la capacité de l’ONU à poursuivre ses missions essentielles dans un contexte où les pressions financières et politiques ne cessent de croître.
LNT avec AFP
