Sur cette affiche placardée en Hongrie par le parti de Viktor Orban, on peut lire "Vous avez aussi le droit de savoir ce que Bruxelles prépare", à côté des portraits de George Soros et Jean-Claude Juncker. Photographie prise le 26 février 2019 à Budapest © AFP/Archives ATTILA KISBENEDEK
Tiraillée sur le cas de Viktor Orban et ses dérapages populistes contre Bruxelles ou l’immigration, la droite européenne se réunit mercredi pour sanctionner le dirigeant hongrois, à deux mois du renouvellement du Parlement européen.
Le Parti populaire européen (PPE), qui réunit les formations de droite et du centre-droit de l’UE, comme la CDU de la chancelière allemande Angela Merkel ou les Républicains en France, devrait décider d’une suspension temporaire ou d’une exclusion définitive du parti de M. Orban, le Fidesz. La décision est attendue en fin d’après-midi à l’issue d’une réunion à Bruxelles qui doit s’ouvrir à 14H00 GMT.
Menaçant, le gouvernement hongrois a averti qu’en cas de suspension, le Fidesz « quitterait immédiatement le PPE », selon un communiqué.
Dans un entretien mercredi à la radio allemande Deutschlandfunk, le président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, a réclamé une fois de plus une exclusion, affirmant que « depuis des années », le Fidesz « s’éloigne des valeurs démocrates-chrétiennes ». « Sa place est hors du PPE », a tranché M. Juncker, membre de ce parti mais qui ne participera pas à cette réunion.
Certains craignent cependant qu’exclure l’enfant terrible du PPE, une première dans l’histoire de cette formation, la plus importante du Parlement européen, n’ouvre la voie à une scission entre l’Est et l’Ouest du continent.
Ils s’inquiètent également de le voir se jeter dans les bras du vice-Premier ministre italien et ministre de l’Intérieur, Matteo Salvini, le chef de la Ligue, parti d’extrême droite.
Cela fait des mois que la droite conservatrice se divise sur le cas Orban.
Mais, en lançant une campagne d’affichage le 19 février contre M. Juncker, le Premier ministre national-conservateur hongrois a dépassé les bornes pour ses détracteurs.
Sous le slogan: « Vous avez aussi le droit de savoir ce que Bruxelles prépare », ces affiches montraient Juncker, ricanant aux côtés du milliardaire américain juif d’origine hongroise, George Soros, et l’accusaient de soutenir l’immigration sur le Vieux continent.
Furieux, treize partis membres du PPE originaires de dix pays différents, réunis autour d’un noyau dur constitué par les pays du Benelux et de la Scandinavie, ont réclamé début mars « l’exclusion ou la suspension » du Fidesz.
Le chef de file pour les élections européennes du PPE, Manfred Weber, a également accentué la pression sur Viktor Orban, la semaine dernière à Budapest. M. Orban est devenu une source d’embarras croissant pour l’Allemand qui brigue la succession de M. Juncker.
Le Bavarois a posé trois conditions pour le maintien du dialogue: l’arrêt de la campagne anti-Bruxelles, des excuses auprès des autres partis membres du PPE et le maintien à Budapest de l’Université d’Europe centrale (CEU) fondée en 1991 par Georges Soros.
– Compromis –
Depuis, Viktor Orban, 55 ans, a fait retirer les affiches controversées. Il a présenté ses excuses au PPE, même si elles ont été jugées insuffisantes, selon une source proche de Manfred Weber.
Mais concernant l’Université d’Europe centrale, sa bête noire, M. Orban n’a pas bougé. Cet établissement de droit américain, s’estimant chassé par le Premier ministre nationaliste, va déménager l’essentiel de ses activités à Vienne.
Un « gel de l’appartenance (au PPE) » apparaît « comme le chemin à suivre », a jugé mercredi Annegret Kramp-Karrenbauer, présidente de la puissante CDU et dauphine d’Angela Merkel, sur la radio publique allemande.
Samedi, le président du PPE, Joseph Daul, avait affirmé « préparer un compromis », sous la forme d’une suspension de « plusieurs mois », selon plusieurs sources.
Selon une source proche de M. Weber, il sera proposé de priver le Fidesz de ses droits de vote dans toutes les réunions du PPE et de lui interdire de proposer des candidats à des postes.
La décision devra être prise par l’Assemblée politique du PPE, réunissant notamment M. Daul, les dix vice-présidents, la direction du groupe au Parlement européen et un représentant de chaque parti membre.
M. Orban pourra défendre sa position devant les 261 délégués, qui voteront à bulletin secret. Une majorité simple est nécessaire.
LNT avec Afp