Dr Rochdi Talib, PDG du Groupe Akdital
Le groupe Akdital est bien décidé à s’imposer comme un acteur majeur du secteur privé de la santé au Maroc. Alors qu’à l’origine il disposait d’un unique établissement, la clinique Jerrada Oasis, depuis 2011, le groupe est passé à la vitesse supérieure en dès 2018, en multipliant les investissements : la clinique Ain Borja (2018), le Centre International d’Oncologie Casablanca (2019), la clinique Longchamps (2019) et l’hôpital privé Casablanca Ain Sbaâ (2019). Ainsi, le groupe Akdital compte à ce jour un réseau de cinq établissements de santé multidisciplinaires et spécialisés, avec l’ouverture prévue en 2020 d’un sixième établissement. Deux autres projets sont également en cours d’étude.
Au total, Akdital regroupe aujourd’hui 550 lits (dont 100 lits de soins intensifs, 70 lits de réanimation adulte et 40 couveuses de réanimation néonatale), 29 blocs opératoires (dont un tiers de blocs de chirurgie cardiaque) et un plateau de radiologie (5 scanners, 4 salles de cathétérisme cardiaque, 3 IRM). Le tout représente plus de 2 000 emplois, dont 1 200 directs. Pour présenter à nos lecteurs plus de détails sur le groupe, ses ambitions et son apport à l’offre de santé au Maroc, Dr Rochdi Talib, PDG du groupe Akdital, a accepté de répondre à nos questions.
La Nouvelle Tribune : Avec les ouvertures récentes de la clinique Longchamps et de l’hôpital privé Ain Sebaâ, vous portez le réseau du groupe Akdital à cinq établissements. Quels sont les objectifs du groupe en termes de taille et de maillage du territoire ?
Dr Rochdi Talib : Les objectifs du groupe Akdital sont la réalisation et l’ouverture de cliniques répondant aux normes internationales et qui couvriraient une bonne partie du territoire national. Malheureusement pour le moment, nous n’arrivons pas à satisfaire toute la demande des zones reculées du pays, pour la simple raison qu’il n’y a pas assez de ressources humaines aussi bien médicales que paramédicales.
En ce moment, nous nous contentons des régions comme le Grand Casablanca ; nous avons commencé par servir les zones périphériques de Casablanca comme la préfecture de Hay Mohammadi Ain Sbaâ Znata. Toute cette zone est couverte maintenant par l’Hôpital Privé Ain Sbaâ Casablanca, qui vient d’ouvrir en juillet 2019 et qui a une capacité litière de plus de 200 lits avec un plateau technique complet, une partie radiologie complète à savoir une salle d’IRM, un scanner, une salle de cathétérisme, un plateau de réanimation de haut niveau avec une vingtaine de box de réanimation et une vingtaine de couveuses de réanimation néonatale. C’est ce genre de clinique que nous essaierions de créer dans d’autres régions du Maroc, en l’occurrence à El Jadida où nous avons commencé à construire un grand hôpital pareil à celui d’Ain Sbaâ, avec en plus un centre d’oncologie qui va couvrir toute la zone de Abda-Doukkala.
Dans les projets d’avenir, il y a d’autres zones où nous sommes en train de prospecter. Je ne peux pas les divulguer maintenant tant que nous n’avons pas encore concrétisé la partie foncière.
Le but principal est de mettre à la disposition de la population générale de tout le Maroc des cliniques de haut niveau qui répondent aux normes.
Certains de vos établissements sont situés dans des zones moins favorisées. À quels types d’attentes répondez-vous au niveau de ces emplacements ?
Pour les types d’attentes auxquelles nous essaierions de répondre par la création de ces établissements, c’est de mettre à la disposition de la population dont les moyens sont certes limités, puis même de catégories qui sont pour une partie couverte par une mutuelle ou une assurance maladie, et une autre qui a des moyens bien entendu limités et qui n’a malheureusement pas accès pour le moment – je parle des Ramedistes qui n’ont pas encore accès au secteur privé pour le moment (j’espère que cela va changer dans les années ou les mois à venir) – des établissements dotés de plateaux et qui sont prêts à accueillir différentes pathologies, aussi bien les pathologies simples comme l’appendicite que celles complexes comme la chirurgie à cœur ouvert.
Ce sont des cliniques où toutes les spécialités peuvent être traitées sans aucun problème, avec des services et des secteurs qui sont couverts comme la réanimation néonatale et la réanimation adulte lourde, ainsi que la partie qui concerne la cardiologie interventionnelle comme la prise en charge des infarctus du myocarde, la prise en charge des maladies neurologiques graves, les accidents vasculaires cérébraux ou autres maladies complexes.
Nous pouvons faire face à ce genre de pathologies sans aucun problème, et nous mettons donc à la disposition de la population qui se trouve dans des zones défavorisées des cliniques qui n’ont rien à envier aux cliniques qui sont installées dans des zones riches ou favorisées.
Recrutez-vous un personnel principalement local ? Comment jugez-vous la qualité de la formation du personnel médical au Maroc ?
Pour ce qui est des médecins, il s’agit de confrères que nous avons réussi à fédérer autour de notre cause, pour nous accompagner dans cette belle aventure et les faire venir dans les différentes cliniques de notre groupe Akdital. Ce sont des médecins de haut niveau, des Marocains formés soit à l’échelle nationale ou à l’échelle européenne qui sont retournés au Maroc après de longues études et une longue expérience en Europe. Nous avons donc réussi à les convaincre de se joindre à nous, et ça se passe à merveille, parce que ce sont des compétences de haut niveau qui n’ont rien à envier aux confrères sous d’autres cieux dans des pays développés.
Donc toutes les compétences sont présentes dans nos différentes cliniques. Pour certains secteurs, nous demandons même à tel médecin qui travaille à clinique Jerrada de prêter main forte à l’Hôpital Privé de Casablanca Ain Sbaâ et vice versa.
Nous n’avons pas de problème au niveau des compétences médicales. Le gros problème auquel nous sommes confrontés actuellement se trouve surtout au niveau des ressources dans le domaine paramédical, où il y a un grand manque de profils dont nous avons vraiment besoin. Cela pose un grand souci de recrutement dans nos différentes cliniques, et le même constat est posé pour les cliniques et les établissements concurrents.
À quelles problématiques du secteur de la santé au Maroc le secteur privé est-il le mieux à même de répondre ?
Le secteur privé au Maroc est en plein développement. Il suffit de l’encourager par des incitations aussi bien fiscales que foncières et il est capable de relever le défi, de répondre au maximum des attentes de la population.
Le problème qui se pose actuellement est le manque d’encouragement, le manque d’incitation, le manque de subvention, une tarification nationale de référence qui n’a pas été revue ou revalorisée depuis 2005. Il y a beaucoup de soucis auxquels nous sommes confrontés et nous aimerions bien être épaulés par l’Etat.
Nous sommes prêts à créer des partenariats publics-privés pour diminuer l’impact de l’insuffisance dans le secteur public. Le partenariat public privé a bien réussi dans le domaine de la dialyse. Nous sommes capables de relever le même défi dans d’autres secteurs, où il y a des listes d’attentes très inquiétantes de plusieurs mois, par exemple dans les domaines de la cancérologie, de l’imagerie médicale (les PET Scan, les scanners, l’IRM…). Tous ces secteurs-là où les hôpitaux publics souffrent de manque soit de matériel soit de compétences.
Le secteur privé est là et il serait là pour donner un coup de main et vendre certaines prestations avec des coûts très raisonnables. Pareillement pour la cardiologie interventionnelle et la chirurgie cardiaque, où les listes d’attentes sont très longues avec toutes les complications et les risques que cela engendre pour les patients ; la réanimation néonatale où il y a un manque flagrant de couveuses et de réanimation pouvant faire face aux problèmes posés par la naissance de nouveaux nés soit en prématurité ou en état de précarité en générale.
Donc le privé est un secteur qui pourrait être la solution à la problématique de la santé au Maroc et j’en suis vraiment convaincu. Il suffit de mettre tous les moyens nécessaires pour encourager ce secteur et il est capable de faire des miracles dans le sens bénéfique de la population marocaine.
Propos recueillis par Selim Benabdelkhalek