De g. à d. : M. Driss Jaidan, M. Mohammed Kettani, et M. Driss Ksikes. Crédits : La Nouvelle Tribune
«Au détroit d’Averroès» est l’intitulé du nouveau roman de Driss Ksikes, écrivain-dramaturge et directeur du Centre de recherche de HEM . Invité par la Fondation Attijariwafa bank pour présenter son livre, l’auteur a présenté à une assistance venue nombreuse, à travers une interaction avec Driss Jaidan, philosophe et écrivain, quelques clefs de lecture de son dernier opus. «Ce roman passionnant est consacré à la pensée d’Ibn Rochd, un philosophe et savant arabe hors norme du 12e siècle, fabuleux passeur d’idées et transmetteur de savoir entre les mondes arabo-musulman et occidental», a lancé de prime abord M. Mohammed Kettani, président Directeur Général du groupe Attijariwafa bank, tout en rappelant que la Fondation se réjouit de présenter de nouveaux livres d’auteurs marocains de talent, et honorer ainsi la production intellectuelle nationale.
Rationalité, égalité, liberté… sont quelques grilles de lectures qui ressortent de cet ouvrage. Extrêmement documenté, «Au détroit d’Averroès», est un livre qui offre de multiples possibilités de lecture, la plus abordable étant une lecture historique. L’ouvrage est avant tout un hommage aux érudits du monde arabe, une manière de mettre en relief le génie d’une époque révolue et de valoriser un héritage parfois méconnu ou sciemment ignoré. «L’humanisme ne peut-être une exclusivité de l’Occident», dixit Driss Ksikes.
«Au Détroit d’Averroès» réhabilite la pensée de ce grand humaniste arabe, longtemps incompris, une sorte de quête de renaissance. «Ibn Rochd et Averroès sont peut-être les deux faces d’un astre perdu», pense Adib, personnage principal du roman, lui-même enseignant en philosophie dans un lycée à Casablanca et chroniqueur radio, qui aurait quelques similitudes avec l’auteur. A travers un subtil exercice de narration, Adib nous guide vers la découverte d’Ibn Rochd, sa pensée, son histoire, sa vision de la politique, de la religion et sa relation avec la raison…
En effet, le livre pose des questions d’actualité brûlante. «Pour Ibn Rochd croire et savoir sont distincts, mais ne s’opposent pas. Or, aujourd’hui dans les pays du monde arabe il y a une contradiction entre le savoir et le croire», constate Driss Jaidan. En effet, le livre nous ramène à des sujets d’actualité où nos sociétés sont minées une violence inouïe motivée par l’appréhension et le rejet. Alors que «foi, émotion et raison conduisent à un monde intelligent», conclut Driss Jaidan.
Publié chez les Editions Le Fennec, « Au Détroit d’Averroès», est un ouvrage passionné et passionnant, sur les traces d’Ibn Rochd, sous la plume de Driss Kisikes, une «bête de l’écriture», comme il se définit lui-même. A découvrir.
Extrait : «(…) Antun, tout en reprochant à Ibn Rochd de n’avoir pas définitivement dissocié science et religion, estimait que les musulmans ont été ingrats envers lui, incapables de fructifier son legs, coupables d’avoir dilapidé une fortune spirituelle de valeur inestimable, qui les aurait peut-être propulsés plus vite vers l’émancipation. Abdouh, qui n’avait jamais lu Ibn Rochd ne voyait dans la figure que son antagoniste tentait de réhabiliter, qu’un Averroès latinisé, christianisé. Autun lui rappelait que même les chrétiens étaient divisés à son sujet, que certains hommes de l’église l’avaient rejeté, brûlant ses livres et condamnant à l’oubli ses écrits. (…)