Manoeuvres militaires près de Paris, en octobre 2017 © AFP/Archives Eric FEFERBERG
La Commission européenne a présenté mercredi un plan d’actions pour améliorer à la mobilité des troupes et des équipements militaires sur le continent européen, dans un contexte de tensions croissantes avec la Russie.
L’objectif de Bruxelles est de lever à terme les obstacles réglementaires qui entravent les mouvements militaires transfrontaliers et d’adapter les infrastructures routières et ferroviaires au transport d’engins comme des tanks.
L’initiative s’inscrit dans la stratégie de relance d’une Europe de la Défense, un domaine dans lequel la plupart des pays veillent jalousement à leur souveraineté nationale.
Avant les projets concrets, qui viendront plus tard, l’exécutif européen a surtout lancé mercredi « un exercice d’inventaire » de la situation actuelle de la « mobilité militaire », et fixé un calendrier pour les prochains mois.
« Nous voulons faire le point sur l’état de l’infrastructure européenne, savoir si elle encore adaptée aux besoins », a déclaré la commissaire chargée des Transports, Violeta Bulc, lors d’une conférence de presse.
– ‘Sécurité collective’-
« Il s’agit d’une question de sécurité collective », a-t-elle souligné, appelant les Etats membres à « examiner et valider » d’ici la mi-2018 une liste d' »exigences militaires » en cours de préparation.
La Commission a aussi indiqué qu’elle recenserait « d’ici à 2019 » les parties du réseau européen « qui sont adaptées au transport militaire, y compris les modernisations nécessaires des infrastructures existantes », concernant par exemple la hauteur ou la capacité portante des ponts.
« Une liste prioritaire de projets sera établie » par l’exécutif européen, qui a mis l’accent sur les projets à « double usage », adaptés aussi bien à des équipements militaires qu’à des engins volumineux à usage civil.
Les sources de financement sont encore floues. « D’abord nous devons faire un état des lieux des besoins, ensuite nous essayerons de trouver les ressources », a fait valoir Mme Bulc.
La Commission a aussi indiqué qu’elle allait plancher sur les moyens « de simplifier les formalités douanières pour les opérations militaires » et d’harmoniser les règles liées au transport de marchandises dangereuses dans le domaine militaire.
Le plan d’actions présenté mercredi doit encore recevoir l’approbation des Etats membres.
– ‘Au cas où’-
La Commission n’a pas cité la Russie, et la menace potentielle qu’elle représente pour l’Europe, pour justifier son initiative. L’UE est face à une « évolution imprévisible de la politique internationale », a répondu Mme Bulc à une question sur ce point.
« Ce que nous voulons faire, c’est qu’au cas où il faudrait activer nos moyens de défense, nous soyons en mesure de le faire », a-t-elle ajouté.
« Ces propositions ont une dimension pratique, mais leur finalité est évidente au moment où les tensions s’exacerbent avec la Russie », a toutefois expliqué un diplomate européen.
« On ne peut plus dire qu’un conflit en Europe est impossible », estiment en privé des responsables européens.
Les relations entre l’UE et la Russie se sont dégradées depuis l’annexion de la Crimée par Moscou et le début d’un conflit meurtrier dans l’est de l’Ukraine en 2014.
Elles se sont encore envenimées avec l’empoisonnement au Royaume-Uni d’un ex-agent double russe début mars, dans lequel les dirigeants des pays de l’UE estiment que la Russie est « très probablement » impliquée.
« En cas de conflit, nous n’aurions aujourd’hui pas le temps de localiser les itinéraires praticables ni d’accomplir les procédures bureaucratiques pour déplacer un blindé des Pays-Bas jusqu’en Estonie », a déploré en privé un haut responsable européen.
« Il faut s’assurer que les infrastructures nécessaires existent, que les tunnels sont praticables, que les routes ont une largeur suffisante, que les ponts peuvent supporter le poids des matériels transportés », a expliqué un diplomate.
L’UE a lancé en grande pompe en décembre dernier une « coopération structurée permanente » en matière de défense, entre 25 pays, à laquelle seuls le Royaume-Uni, le Danemark et Malte ne participent pas.
Ce format de coopération sans précédent vise notamment à stimuler le développement de projets militaires et la conception d’équipements en commun.