Depuis le 20 mars, le Maroc est confiné à l’instar d’une soixantaine d’autres pays dans le monde. Pour lutter contre la propagation du Covid19, plus de 43% de la population mondiale ont dû s’enfermer chez eux.
Une expérience qui n’est pas facile à vivre et qui a, et aura, des conséquences économiques et psychologiques très lourdes. Le stress, la peur, l’ennui, des conditions de logement difficiles, la perte d’emploi et de revenu, l’isolement social… autant de facteurs qui peuvent avoir des effets négatifs sur les confinés. Néanmoins, on peut se consoler en se disant que c’est le cas de plus de 3,4 milliards de personnes !
En effet, à Casablanca, comme à New-York, Dubaï, ou Lisbonne, la situation est pareille. Témoignages de nos Marocains du monde.
Hajar vit depuis 6 ans à Milwaukee dans l’État du Wisconsin, où l’on dénombre plus de 500 personnes atteintes du Covid 19. « Le gouverneur a fermé les restaurants, les bars (ils peuvent uniquement faire de la livraison à domicile), les écoles et les universités. Il a ordonné aux gens de rester chez eux sans qu’il y ait de sanctions pour ceux qui sortent ! En tout cas, pas encore. Il a également demandé de privilégier le télétravail », explique-t-elle. Et d’ajouter : « La majorité fait du télétravail, mais une bonne partie a perdu sa source de revenus et malheureusement, je fais partie de cette catégorie ! ».
Hajar travaille dans le secteur du tourisme, le premier à être touché par cette crise. L’entreprise où elle travaillait existait depuis plus de 20 ans et il aura suffi d’un mois pour qu’elle ferme. « Le gouvernement essaye d’aider ceux qui ont perdu leur emploi en ces temps de crise en ajoutant 600$ (par semaine) aux allocations chômage. Ce montant varie selon les Etats », explique Hajar. Les personnes forcées de travailler à mi-temps pour réduire les coûts des sociétés sont également aidées par le gouvernement…
« Les rues sont vides, mais il y a toujours des gens qui circulent. Ceux qui sont dehors respectent la distance entre eux, portent des masques et des gants. Personnellement je ne sors que si j’ai vraiment besoin de quelque chose, sinon j’ai fait mes courses et j’ai tout ce qu’il me faut à la maison. Mon mari et moi sommes confinés depuis deux semaines. Mes journées je les passe à lire, regarder la télé et postuler un peu partout. Depuis que je suis à la maison je découvre une passion pour la cuisine. Voilà un peu ma journée type », nous confie-t-elle.
Sonia, maman de 2 enfants, vit à Faro, au Portugal. Le premier cas de contamination dans le pays fut constaté le 2 mars. « Ici, au 65ème cas, le 13 mars, le président a annoncé la fermeture des écoles jusqu’à nouvel ordre. Les bars, cinés, restaurants et boutiques de vêtements ont automatiquement fermé », explique-t-elle.
Les mesures ont été durcies très vite au Portugal avec la fermeture des aéroports et de la frontière terrestre avec l’Espagne. « Les seuls commerces encore ouverts sont les supermarchés, les stations-service, les pharmacies, et les pépinières pour assurer l’approvisionnement pour les agriculteurs. Les Portugais sont disciplinés et n’ont pas eu besoin de sanctions. Cependant les policiers contrôlent les déplacements », affirme Sonia. Les mesures prises par le gouvernement ont été rapidement mises en place et adoptées par la population. « Il n’y a pas eu de foule dans les supermarchés, les gens ont privilégié les achats en ligne… », explique-t-elle. Pour contenir la pandémie, le gouvernement a décidé de régulariser tous les sans-papiers et de renouveler toutes les cartes de séjour automatiquement, pour que les étrangers puissent bénéficier des mêmes soins que les portugais.
« Côté familial, ça se passe plutôt bien, cela fait 20 jours que nous sommes confinés. On essaye de trouver un maximum d’activités à faire avec les enfants et on attend … C’est ce qui est le plus dur, d’attendre sans avoir de visibilité sur l’après covid19. On ne sait pas comment les choses vont évoluer ! » conclut Sonia.
Pour Zineb, une étudiante de 23 ans, habitant à Rouen, c’est dur d’être enfermée dans un 20m2.
La France est entrée en confinement général le 17 mars. On ne peut plus quitter son domicile sans raison valable au risque d’avoir une amende qui peut s’élever à 135 euros.
« J’ai cependant de la chance de passer cette période difficile avec ma meilleure amie, contrairement à beaucoup d’étudiants étrangers qui sont restés coincés ici sans famille, ni amis. A deux, on essaie de s’occuper comme on peut. On regarde des séries, on essaye de nouvelles recettes de cuisine, on a aussi beaucoup de temps pour lire… on a même essayé de prendre des cours de chants en ligne », explique la jeune étudiante. Et de conclure : « Le confinement m’a aussi permis de prendre plus souvent des nouvelles de ma famille et de mes amis. Même si on est loin les uns des autres, on est plus soudés que jamais. Pour ma part, cette situation est un mal pour un bien. »
A Dubaï, le confinement total vient d’être déclaré officiellement le 26 mars et se prolongera jusqu’au 5 avril, nous explique Lara, qui habite cet émirat depuis plus de 5 ans. « Alors que la majorité des pays avaient fermés leurs frontières, à la Chine pour commencer et puis au reste au monde, l’aéroport de Dubaï accueillait encore des vols en provenance d’un peu partout. Les bars, hôtels, etc., ont commencé à fermer il y a quelques jours à peine », affirme-t-elle. Et d’ajouter : « Aujourd’hui un programme national de stérilisation est en cours. Des drones sont déployés sur toute la ville pour stériliser les sites et espaces publics. Il faut dire que même en pleine crise, Dubaï reste la ville de la démesure ».
L’émirat interdit la circulation de 20h00 à 06h00 du matin et tout manquement aux règles est passible d’une amende allant de 500 AED à 50 000 AED.
« Les premiers jours n’ont pas été faciles, on se sent comme emprisonnés et le fait de savoir que cela ne fait que commencer fait encore plus paniquer. Dubaï est une ville où il se passe toujours quelque chose, et là, on a l’impression que tout s’arrête. Moi qui ne suis pas du tout casanière, j’ai eu du mal avec le confinement au début. C’était difficile pour moi de me concentrer sur mon travail, de ne plus pouvoir sortir ni voir mes amis… mais je m’y suis habituée petit à petit. Cette situation m’a aidé à me reconnecter avec mes rêves d’enfance et d’adolescence. Je fais de l’exercice quotidiennement alors que je n’en faisais que très rarement. Je mange saint alors que j’avais l’habitude de commander à manger, j’ai également appris à cuisiner… finalement on s’y habitue tout en espérant reprendre la vie normale qu’on avait avant ».
S’il y a une personne qui adore ce confinement, c’est bien Karim de Casablanca. « Tout le monde se plaint d’être coincé à la maison, de ne plus pouvoir pratiquer ses activités et d’être contraint de limiter ses déplacements … pour moi, ce confinement est une opportunité de mettre de l’ordre dans ma vie et de repenser ma façon de vivre et d’agir. Je travaille toujours, et deux fois plus que si j’étais au bureau. Je fais du sport quotidiennement. Je passe plus de temps avec ma famille que je redécouvre. Mes enfants sont contents que je sois à la maison, que je les aide à faire leurs devoirs… J’entends rarement des klaxons dans la rue alors que c’est tout ce qu’on entendait à longueur de journée à Casablanca. J’ai découvert que j’avais des voisins sympas… Cette situation que vit le monde entier aujourd’hui me pousse à réfléchir et à essayer d’en tirer des enseignements. Je pense que ce confinement sera un électrochoc pour beaucoup de gens. Il l’a été en tout cas pour moi ! »
A. Loudni