Une Saoudienne près d'un bureau de Qatar Airways à Ryad le 5 juin 2017 © AFP FAYEZ NURELDINE
Des efforts diplomatiques impliquant Washington, Paris et Koweït se sont intensifiés pour contenir la crise sans précédent dans le Golfe, qui oppose le Qatar, accusé de soutenir le terrorisme, à l’Arabie saoudite et ses alliés.
Cette crise a donné lieu à une série d’appels téléphoniques des présidents Donald Trump et Emmanuel Macron, et à une tentative de médiation de l’émir du Koweït qui s’est rendu successivement en Arabie saoudite, aux Emirats arabes unis et au Qatar.
Pour l’Arabie et ses alliés, la balle est désormais dans le camp de Doha qui doit « changer de politique » et épouser le consensus régional sur les sujets sensibles des mouvements islamistes radicaux et des liens avec l’Iran chiite, grand rival du royaume saoudien sunnite.
« Nous espérons que nos frères au Qatar prendront maintenant les bonnes mesures pour mettre un terme à cette crise », a souligné le chef de la diplomatie saoudienne Adel al-Jubeir.
Les Emirats arabes unis, qui sont à la pointe des critiques contre Doha, maintiennent une pression extrême en qualifiant le Qatar de « champion de l’extrémisme et du terrorisme dans la région ».
Leur ministre d’Etat aux Affaires étrangères Anwar Gargash a posé une série de conditions, notamment l’arrêt des programmes « extrémistes » de la chaîne de télévision qatarie Al-Jazeera et des mesures contre des représentants de la confrérie des Frères musulmans ayant trouvé refuge à Doha.
Sans parler de « changement de régime » au Qatar, M. Gargash a exigé un « engagement politique » incluant le respect de promesses faites lors d’une première crise en 2014, ainsi qu’une « feuille de route » avec des « mécanismes clairs » de mise en oeuvre.
– Rôle de l’ancien émir ? –
Un haut responsable du Golfe a expliqué à l’AFP que cette crise était la conséquence selon lui de « l’influence » persistante du précédent émir du Qatar, Hamad ben Khalifa Al-Thani (65 ans), sur son fils, Cheikh Tamim (37 ans), en faveur duquel il a abdiqué en 2013.
Cheikh Hamad avait réussi à placer le petit émirat gazier sur l’échiquier régional et international en lui faisant jouer un rôle de médiateur dans plusieurs crises et en l’imposant comme un pivot des soulèvements ayant agité le monde arabe après 2011.
Après avoir soutenu l’isolement du Qatar, le président américain Donald Trump a offert son aide pour désamorcer la crise qui a vu l’Arabie saoudite, les Emirats, l’Egypte, Bahreïn, la Mauritanie et les Maldives rompre leurs relations diplomatiques avec le Qatar et prendre, pour certains d’entre eux, des mesures économiques et aériennes.
Lors d’un entretien téléphonique avec cheikh Tamim, M. Trump a « proposé d’aider les différentes parties à régler leurs différends, y compris à travers une rencontre à la Maison Blanche si nécessaire ».
Le président français Emmanuel Macron, lors d’entretiens séparés avec l’émir du Qatar, le président iranien Hassan Rohani et le roi Salmane d’Arabie Saoudite, a « invité toutes les parties » à poursuivre « le dialogue ».
Il a rappelé son « attachement à préserver la stabilité dans la région et à lutter sans ambiguïté contre le terrorisme ».
Créé en 1981, le Conseil de coopération du Golfe (CCG), qui regroupe des monarchies pétrolières sunnites contrôlant le tiers des réserves mondiales de brut, comprend l’Arabie saoudite, Bahreïn, le Qatar, les Emirats, le Koweït et Oman. Ces deux derniers pays n’ont pas rompu avec le Qatar.
– Rapport sur un piratage –
L’émir du Koweït, cheikh Sabah al-Ahmad Al-Sabah, s’est rendu mercredi soir au Qatar juste après des entretiens aux Emirats et une rencontre la veille avec le souverain saoudien.
Tout en le qualifiant « d’homme sage » et de « figure paternelle » du Golfe, le ministre émirati Anwar Gargash a déclaré à l’AFP que les conditions n’étaient pas encore réunies pour une véritable médiation. « Les conditions doivent débuter avec une déclaration, une volonté, du Qatar ».
Le Qatar a rejeté en bloc toutes les accusations portées contre lui, affirmant que la crise avait éclaté à la suite du « piratage » du site web de son agence de presse attribuant à son émir de « fausses » déclarations apaisantes sur l’Iran et les Frères musulmans.
Mercredi soir, le ministère de l’Intérieur à Doha a publié un rapport préliminaire d’enquête sur ce « piratage » qui, selon lui, a commencé en avril, utilisant des « méthodes techniques innovantes » et aboutissant le 24 mai à la publication « d’informations fabriquées ». Il n’en a pas identifié les auteurs.
LNT avec AFP