Transition énergétique : le ministère se penche sur les mécanismes nécessaires au renforcement de la résilience
Notre pays vit aujourd’hui au rythme d’une véritable crise énergétique. Problématiques d’approvisionnement, risque de pénurie et autres difficultés de stockage et de prix, le Maroc est appelé aujourd’hui plus que jamais à se pencher sur une stratégie à long terme à même d’être à jour des aléas énergétiques. Mais il est important de rappeler que la situation actuelle du secteur des hydrocarbures n’est que le résultat d’une succession de ‘‘manœuvres’’ donnant lieu à l’enterrement de la Samir, un fleuron de l’industrie du raffinage ‘‘Made in Maroc’’, avec une capacité de raffinage de 150.000 barils par jour.
En effet, l’idée de créer une raffinerie à Mohammadia fut celle du Socialiste Abderrahime Bouaâbid. En 1959, la Samir fut ainsi créée par l’Etat marocain et l’Office Italien des Hydrocarbures (Ente Nazionale Idrocarburi, ENI) en joint-venture avec la compagnie AGIP. Cette raffinerie a pu voir le jour notamment grâce à la volonté de l’industriel italien Enrico Mattei alors dirigeant d’ENI, qui a offert un partenariat à 50/50, très différent des formes de concession normalement proposées par les grandes compagnies pétrolières (15/85). En 1997, l’entreprise fut privatisée et en août 2015, croulant sous les dettes, ses activités fusent suspendues.
Le cas Samir est toujours d’actualité et beaucoup déplorent sa liquidation, pointant du doigt le lobbying des grandes compagnies pétrolières voulant se débarrasser d’un acteur de premier plan du secteur des hydrocarbures. Une liquidation qui a fait du marché marocain une proie facile pour les nouveaux spéculateurs du secteur des hydrocarbures.
Nombreux sont en effet les analystes pour qui la privatisation d’une entreprise aussi stratégique que la Samir était une erreur, et sa liquidation judiciaire en cours est une catastrophe qui mettra en danger la sécurité énergétique d’un pays non producteur de pétrole comme le Maroc. L’enjeu reste ainsi majeur pour notre Royaume, qui ne peut contrôler la volatilité des prix de l’or noir sur les marchés internationaux. Ceci étant, il relève du bon sens que l’Etat marocain dispose de son propre outil de raffinage pour contrôler au moins une partie de la production et amortir les chocs énergétiques.
A Rabat, au siège du ministère de la Transition énergétique et du développement durable, la ministre Leila Benali, a tenu à préciser que la raffinerie Samir ne peut en aucun cas régler la problématique des prix, ajoutant que la Samir fait beaucoup plus du stockage qu’autre chose. Autrement dit, l’affaire Samir n’est plus d’actualité au sein du Gouvernement Akhannouch. Que propose-t-on alors pour garantir au pays la résilience face à la flambée des prix du baril ?
Au cours d’une rencontre d’échange avec les médias autour de la transition énergétique, Mme Benali a expliqué que dans le souci d’enrayer de telles fluctuations à l’avenir selon une approche proactive, le ministère envisage de mettre en place un plan global de réforme, englobant l’économie et le soutien social avec des objectifs clairs sur le long terme.
L’accent sera aussi mis sur la mise en place d’une stratégie globale de communication, basée sur la transparence des données, a-t-elle souligné devant des médias nationaux et internationaux. Dans la même lignée, le ministère veillera à soutenir les catégories dans le besoin mais aussi les activités économiques en situation de vulnérabilité, a-t-elle poursuivi, affirmant qu’il sera en outre question de consolider le rôle des institutions compétentes en matière de promotion de la concurrence loyale dans le secteur de la transition énergétique.
Mme Benali a annoncé, à cet égard, que son ministère œuvre pour la création du « Conseil de la Sécurité Energétique » avec pour mission d’assurer le suivi de la situation du secteur énergétique national et de prendre les mesures qui s’imposent face aux crises. Il aura aussi pour vocation de déterminer les matières susceptibles d’entrer dans la composition du stock stratégique ainsi que les mesures à prendre pour garantir la souveraineté énergétique nationale.
Dressant une liste de défis à surmonter, Mme Benali a insisté sur la nécessité de développer un tissu industriel local dans le domaine de l’énergie et d’apporter le soutien nécessaire aux compétences nationales dans les champs de la recherche et de la formation.
Dans ce contexte, elle a rappelé les principaux objectifs de la stratégie énergétique adoptée par le Maroc. Il s’agit de veiller à la généralisation de l’accès à l’énergie avec des prix compétitifs, d’assurer un approvisionnement suffisant en sources d’énergie et d’agir au mieux pour la protection de l’environnement, entre autres.
Pour y parvenir, cette stratégie se base sur plusieurs orientations, a rappelé la ministre qui cite à titre d’exemple la promotion de l’intégration régionale, le développement d’un mix énergétique diversifié et l’adoption et la mise en œuvre de principes du développement durable.
On dira que c’est du déjà vu avec notamment les ministres Aamara et Rebbah. Seulement, les résultats sont les mêmes, à savoir des prix incontrôlables et des distributeurs de carburants toujours aussi discrets, mais puissants et véritables rois du secteur.
Hassan Zaatit