Un Boeing 737 MAX d'American Airlines décolle pour un vol d'essai de l'aéroport international de Dallas-Fort Worth à Dallas, Texas, le 2 décembre 2020 © AFP/Archives Cooper NEILL
Boeing, officiellement accusé jeudi d’avoir induit les autorités en erreur lors du processus d’approbation du 737 MAX, a reconnu sa responsabilité et accepté de verser plus de 2,5 milliards de dollars pour solder certaines poursuites.
Cette résolution permet au constructeur de dissiper un peu plus les nuages qui se sont amoncelés sur son appareil vedette, cloué au sol pendant 20 mois après deux accidents ayant fait 346 morts, avant d’être à nouveau autorisé à voler dans certains pays fin 2020.
Le géant de l’aéronautique a accepté de verser aux Etats-Unis une amende pénale de 243,6 millions, ainsi que 1,77 milliard d’indemnités aux compagnies aériennes ayant commandé le 737 MAX et 500 millions pour un fonds destiné à indemniser les proches des victimes des accidents de Lion Air en octobre 2018 et Ethiopian Airlines en mars 2019.
« Les employés de Boeing ont préféré le profit à la franchise en cachant à la FAA (l’autorité américaine de l’aviation, NDLR) des informations importantes concernant l’utilisation de son avion 737 MAX et en s’efforçant de dissimuler leur tromperie », a dénoncé un responsable du ministère de la Justice, David Burns, dans un communiqué.
Boeing a reconnu que deux de ses employés avaient induit en erreur un groupe chargé au sein de la FAA de préparer la formation des pilotes à l’appareil au sujet du logiciel de vol MCAS, mis en cause dans les deux accidents.
Les documents émis par la suite par l’agence de l’aviation ne contenaient en conséquence pas des informations essentielles sur ce logiciel, qui n’ont donc pas été inclues dans les manuels des compagnies.
C’est seulement après le premier accident, en octobre 2018, que la FAA a eu connaissance « de détails clés » sur le MCAS.
L’agence a été critiquée pour sa supervision de Boeing, jugée trop laxiste par certains.
Selon les termes de l’accord, qui accuse officiellement Boeing de complot en vue de commettre une fraude, le groupe a accepté de continuer à coopérer avec les autorités pour toutes les enquêtes en cours ou à venir et de respecter certains engagements.
Le ministère lèvera les poursuites dans trois ans si Boeing obéit à toutes ses obligations. Il n’a en revanche pas jugé nécessaire d’imposer à la compagnie un inspecteur indépendant.
– « Nous avons failli » –
Le directeur général de Boeing David Calhoun a estimé que l’accord était « la bonne chose à faire ».
Cette résolution « nous permet de reconnaître de façon appropriée que nous avons failli à nos valeurs et à nos attentes », a-t-il souligné dans une note aux employés.
Elle « nous rappelle vraiment l’importance de notre obligation de transparence envers les régulateurs et les conséquences auxquelles notre entreprise peut faire face si l’un de nous ne répond pas à ces attentes ».
Le groupe, qui a déjà mis de l’argent de côté pour faire face aux conséquences des deux accidents mortels, a aussi indiqué avoir passé une charge supplémentaire de 743,6 millions de dollars dans ses comptes.
Avec cet accord, l’horizon s’éclaircit un peu plus pour Boeing qui a lourdement pâti de la crise du 737 MAX, sa vache à lait.
En décembre, la compagnie brésilienne Gol est devenue la première au monde à remettre en service le Boeing 737 MAX, lors d’un vol commercial sans encombre entre Sao Paulo et Porto Alegre. L’appareil a également repris du service aux Etats-Unis sous les couleurs d’American Airlines la semaine dernière.
Des difficultés demeurent toutefois, le groupe ayant essuyé de nombreuses annulations de commandes de la part de compagnies aériennes bousculées d’abord par la longue immobilisation de l’appareil puis par la chute du trafic aérien observé depuis le début de la pandémie.
Certaines familles de victimes ne prévoient par ailleurs pas d’abandonner leurs poursuites, a indiqué un représentant de leur avocat à l’AFP.
Pour Zipporah Kuria, qui a perdu son père dans le crash du 737 MAX d’Ethiopian Airlines, l’accord représente une « simple tape sur les doigts ».
« Si on cherchait vraiment la justice, les personnes responsables chez Boeing ne devraient pas prendre leur retraite ou démissionner avec des primes – elles devraient être tenues pénalement responsables de leurs actes », a-t-elle souligné dans un message.
LNT avec Afp