M. Sekkat Lotfi, CIH
Entretien avec M. Lotfi Sekkat, Directeur général de CIH Bank
Les fondements de la digitalisation chez CIH bank ont été posés il y a longtemps, faisant d’elle aujourd’hui, un des premiers opérateurs bancaires du « e-banking ». C’est l’un des éléments explicatifs fournis dans l’entretien qui suit par M. Lotfi Sekkat, Directeur général de CIH Bank.
La Nouvelle Tribune : M. Lotfi Sekkat, vous êtes Directeur Général de CIH Bank, pouvez-vous nous dire si le succès de la transformation digitale d’une banque tient beaucoup à son expertise sur les systèmes d’information ?
Lotfi Sekkat : Certes, c’est un atout indéniable, mais c’est la passion qui anime avant tout la transformation. C’est le fait de croire en la capacité de la technologie à être au service de l’Homme, du client, des entreprises et qu’elle est là pour simplifier la vie des gens.
L’évolution du monde oblige les structures comme les banques à s’adapter, en étant à l’écoute, en ayant une veille sur la technologie pour comprendre ce qu’elle peut et ne peut pas accomplir, en s’inspirant des expériences étrangères.
D’autant que le métier de la banque est avant tout celui du traitement de l’information et que de nos jours il y a de plus en plus d’informations à traiter, des systèmes qui ne sont pas performants dans ce sens entrainent un mauvais service au client.
D’ailleurs, notre première mission a été d’abord de construire des bases solides en la matière, la structure et l’architecture des systèmes d’informations réalisées a été conçue pour être au service du client.
Effectivement, cela suppose une certaine préméditation par rapport aux attentes et compte tenu de l’ampleur de la tâche, mais nous avions la conviction au CIH que le client développerait dans le temps une exigence d’interactions permanentes avec sa banque. L’avènement de la téléphonie mobile a fortement et en toute logique accéléré cette exigence de la part des clients.
Chronologiquement, quelles ont été les étapes suivies par le CIH en matière de digitalisation?
Dès 2010, nous avons commencé une transformation en profondeur de l’architecture des systèmes d’informations.
Dans un second temps, ce sont les interfaces avec les agences, pour les opérations commerciales qui ont été implémentées jusqu’en 2014.
Enfin, de 2014 à 2016, le système d’information a encore évolué et les engagements de la banque se sont affirmés auprès de nos clients avec une offre de plus en plus digitalisée à leur adresse.
Concrètement, il s’agissait de pratiquement ouvrir l’accès des systèmes d’informations de la banque au client, en lui permettant d’accéder à toutes les informations disponibles sur son compte et surtout à tout instant.
De même, il s’agissait de donner au client la capacité de réaliser des opérations sécurisées sans avoir à passer par une étape physique en agence, grâce aux fameux OTP (one time password).
Quels chiffres témoignent de l’impact de cette transformation sur les clients du CIH ?
Un premier chiffre probant est le taux de virements réalisés à la banque qui est aujourd’hui à plus de 60% issu des utilisateurs de l’application mobile.
Si ce chiffre est satisfaisant, il est aussi le reflet de l’importance de la sensibilisation du client aux services digitalisés, mais aussi des ressources internes de la banque.
La formation, la gouvernance, l’ADN de la banque basé sur les systèmes d’information avec par exemple un comité piloté directement par le Président, ont facilité la transmission de cette mission de digitalisation aux collaborateurs et in fine au client.
Aujourd’hui, lorsque le CIH développe un service, il pense d’abord à l’expérience client parce que la sensibilisation à l’usage digital passe par la qualité du service proposé et sa simplicité. La conduite du changement est au cœur de la digitalisation.
Le CIH a développé son réseau d’agence ces dernières années et semble continuer sur cette tendance. Est-ce que ce n’est pas contradictoire avec la digitalisation croissante des services ?
La digitalisation n’est antinomique avec rien, c’est la continuité de la mission de service bancaire.
Mais, le service en agence évolue désormais en se concentrant sur le conseil apporté aux clients et aux opérations qui nécessitent toujours une intervention humaine, comme les crédits ou les placements.
La position de la banque est devenue «bionique» avec une nécessaire cohabitation de la technologie avec l’humain.
Et l’intelligence artificielle va accélérer encore la digitalisation de certains sujets, mais ne pourra pas intervenir sur d’autres qui nécessiterons encore un volet humain.
En interne, la capacité à réaliser une opération de manière optimale requiert un effort de dématérialisation en continu.
Par exemple, le virement est digitalisé en termes de services au client, cela signifie que lorsque l’ordre est émis par celui-ci, le traitement doit être ensuite automatisé sans intervention humaine pour l’accompagner. Et aujourd’hui, nous pouvons et nous sommes allés plus loin avec la capacité désormais d’impacter le système d’information d’une autre banque.
Par ailleurs, pour connaitre notre client et encore mieux l’accompagner, nous avons structuré une équipe travaillant sur les mégadonnées au CIH dont l’objectif de consolider, mais surtout d’analyser la donnée pour écouter les comportements de nos clients et adapter nos services à leurs exigences.
Si aujourd’hui la donnée est encore timidement utilisée, elle est au centre de la banque de demain parce que le flux de données émanant d’une clientèle de plus en plus digitalisée est exponentiel.
Où en est l’entreprise, en tant que client, dans les efforts du CIH ?
Même si historiquement, le CIH est doté d’une forte clientèle de particuliers, l’entreprise représente aujourd’hui le plus gros de l’investissement de la banque.
Le site «corporate» en est par exemple déjà à sa deuxième version et nous travaillons actuellement à un site dédié aux «Pros», ou encore sur le sujet de l’international, sur une plateforme avec un accès simplifié aux «SWIFTs».
La mise en place de produits et d’offres innovants est en cours également, comme notre salle de marché a produit une belle évolution.
L’activité commerciale de la banque a été modifiée en juin dernier avec la création de la banque des financements et d’investissement qui témoigne de notre volonté d’accompagner le financement de l’entreprise par d’autres volets que l’investissement classique.
Entretien réalisé par
Afifa Dassouli
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Mobile-banking, une synergie à améliorer
Selon M. Bennouna, le développement du paiement mobile est complémentaire avec la banque digitale, vu que tout doit se faire à distance. Par contre, explique-t-il, le Maroc accuse un peu de retard par rapport aux banques européennes, au niveau de ce que l’on appelle la connaissance client, la KYC (Know your costumers, connaissez vos clients, ndlr). La réglementation à l’étranger a assoupli la KYC à distance, chose qui n’est pas encore faite ici, où l’on exige le présentiel. Dans le paiement mobile, tout se fait à distance, sauf à un certain niveau où la personne doit se déplacer pour prouver son identité (pour les recharges de plus de 5000 dhs).
Les principaux chiffres de la transformation digitale de CIH Bank
• 75% des clients ont souscrit aux services digitaux • 3 millions de connexions par mois dont 20% biométriques • 75% des virements sont réalisés en ligne • Plus de 500 000 opérations digitales par mois • 5% des ouvertures de comptes sont réalisés en ligne, soit l’équivalent de 15 agences • Près de 50% des avis sont des remerciements / avis positifs sur les services digitaux • Près de 2/3 de la clientèle sont abonnés aux services à distance