La publication des rapports de la Cour des Comptes pour deux années consécutives, 2016 et 2017, a fait l’effet d’un coup de tonnerre dans un ciel serein !
Et si les rapports portent sur deux années suivies, c’est que l’on a délibérément voulu introduire une continuité dans les constats d’une série de dysfonctionnements, de lacunes, d’erreurs, de fautes et de manquements graves qui affectent des organismes, départements et institutions en charge des affaires publiques !
Ces rapports de la Cour des Comptes sont fortement critiques, passablement accusateurs et tendent, tous, à étayer la conviction que depuis 2016, au moins, rien ne va pratiquement plus dans le Royaume en termes de gouvernance publique…
Qu’on en juge :
– La CMR désespère ;
– Le tourisme est en plein cataclysme ;
– L’assurance est en errance ;
– La maladie dépérit ;
– La presse ne connaît que le stress ;
– L’habitat est à plat ;
– Les finances cassent la confiance ;
– L’agriculture plonge dans la déconfiture ;
– L’enseignement subit le tourment ;
– L’économie est en mode de survie.
Ces quelques exemples suffisent à étayer les propos qui précèdent, mais, en vérité, ces rapports, pour utiles et nécessaires qu’ils sont, ne sont pas pour étonner l’opinion publique qui vit au quotidien les affres de la mal-gouvernance.
La Cour des Comptes est, effectivement, pleinement dans son rôle lorsqu’elle met à plat ce qui ne va pas dans le pays, en épinglant les responsables et en permettant que le principe de la reddition des comptes soit autre chose qu’une seule exigence inscrite au fronton de la Constitution.
Mais, force est de constater que cette reddition des comptes a quelque mal à s’enclencher en chaque occasion qui se présente, tandis qu’un sentiment reste très répandu parmi l’opinion, celui de la quasi-impunité des responsables.
Pourtant, les limogeages d’octobre dernier avaient eu un effet positif et le dernier en date, celui de l’ex-ministre des finances, n’a guère fait pleurer dans les chaumières, bien au contraire…
Alors, qu’est-ce qui motive donc cette démarche clairement catastrophiste de M. Jettou et de ses juges ?
S’agit-il d’inscrire les rapports de la Cour des Comptes dans le cadre général et relativement nouveau d’une politique qui appliquerait systématiquement un régime de peines et de sanctions pour tous ceux qui, en charge des affaires de l’État, au sens large, auraient failli à leur mission ?
On pourrait l’espérer, mais la tendance est pour l’instant trop ténue pour que la conviction que rien ne sera plus comme avant soit définitivement assise auprès des citoyens.
S’agit-il de poursuivre dans une politique de transparence qui, depuis la fin du printemps dernier, a permis de découvrir nombre de défaillances, notamment au plan économique et des finances publiques, révélées par des rapports et données statistiques amplement fournis par la TGR, l’Office des Changes, la DEPF, Bank Al-Maghrib ?
Cette profusion de mauvaises nouvelles concernant les déficits publics, la balance commerciale, les réserves de change, les taux de recouvrement de l’IS, etc., n’était-elle pas, d’ailleurs, parmi les causes du limogeage de M. Mohamed Boussaïd ?
Il est clair, en tout cas, que la publication des rapports de la Cour des Comptes répond à des objectifs qui, sans être tout à fait visibles et énoncés comme tels, partent d’une stratégie dont les auteurs maitrisent seuls pour l’instant les tenants et les aboutissants.
Car M. Driss Jettou et ses collaborateurs, tout en mettant en perspective les nombreux problèmes qui affectent pratiquement tous les pans de l’activité publique, ne peuvent pour autant contourner ou dépasser les contraintes économiques, financières et sociales qui caractérisent aujourd’hui notre pays.
Une croissance largement insuffisante, dont les performances positives sont assurées par la générosité du ciel, des problématiques structurelles qui affectent l’Éducation, l’Emploi, la Santé, la défiance des investisseurs, une fiscalité inique et imparfaite, voilà parmi les problèmes qui constituent la trame fondamentale des défaillances établies par la Cour des Comptes et cela ne relève pas uniquement des simples responsabilités personnelles de tel ou tel ministre, haut fonctionnaire, élu ou grand manager d’une entreprise publique.
En vérité, ce que tendent à démontrer ces rapports, amplement commentés par la presse d’ailleurs, c’est que la politique générale de l’État vit une situation grave, proche de la faillite et ce, depuis 2016 au moins.
M. Jettou et ses boys ont mis ainsi en avant l’incapacité crasse des équipes gouvernementales, placées sous la responsabilité de M. Abdelilah Benkirane, puis de M. Saad Eddine El Othmani, à mettre le pays sur les rails de la croissance pérenne, de la diversification sectorielle, de l’investissement productif, de la lutte résolue contre la corruption, etc., etc.
Est-ce là le message subliminal délivré par M. Driss Jettou ?
Si tel était le cas, nul doute que les semaines et mois à venir apporteront quelques nouveaux « tsunamis » !
Fahd YATA