Les 16 et 17 décembre s’est déroulé à Rabat le 15ème Colloque International sur les Finances Publiques, organisé par la Trésorerie Générale du Royaume et l’Association pour la fondation internationale de Finances Publiques (FONDAFIP), avec le soutien de la Revue française de finances publiques (RFFP). Cette année, le thème choisi était « Quel modèle de gouvernance des finances publiques dans un monde de multi-crises ? ».
Comme le thème l’indique, les deux journées de débats et de discussions étaient orientées vers la question de la prise de décision dans la fonction publique, ainsi que de la pertinence de cette décision, le financement de sa réalisation, etc. Et les finances publiques sont au cœur de cette problématique, comme l’explique le Pr Michel Bouvier, Président de la Fondafip : « Le pouvoir financier est la charpente du pouvoir politique ».
Les différents intervenants ont abordé le sujet sous tous ses aspects, à travers des retours d’expérience ou des réflexions académiques, et ont tracé les contours d’une meilleure gestion des finances publiques et ainsi un meilleur pilotage de la décision. Et la bonne nouvelle pour le Maroc est que les pistes proposées sont déjà pour une grande partie d’entre elles inscrites dans le Nouveau Modèle de Développement (NMD).
À l’occasion d’un panel sur le thème « quel modèle de régulation de la décision en finances publiques ? », a été ainsi l’occasion pour Driss Benhima, ex-ministre et ancien Wali de région, de souligné que le nouveau processus de décision en matière des finances publiques devrait se mettre en place entre les attributions des institutions centrales, les pouvoirs délégués à leurs représentants régionaux, et les programmes des conseils de région.
La sphère de décision territoriale dépend du rôle dévolu à la région, a-t-il noté, préconisant l’installation de la capacité du conseil régional, qui devrait devenir le meilleur connaisseur documenté des réalités régionales, tous secteurs confondus.
Lors d’une allocution diffusée en clôture du colloque, le ministre de l’Éducation Nationale, du Préscolaire et des Sports et président de la Commission Spéciale sur le Modèle de développement, Chakib Benmoussa a rappelé que l’un des leviers essentiels de la mise en œuvre du NMD est une administration en capacité de conduire le changement, efficace et compétente, responsabilisée sur les résultats avec une marge d’autonomie, ainsi que digitalisée et transparente au service des citoyens et du système productif.
Et de poursuivre que de nombreux défis doivent être levés pour cela, notamment le défi de l’attractivité des compétences, un problème qui n’est pas que matériel mais qui renvoie à l’image et au mode de management des ressources humaines.
Dans ce sillage, M. Benmoussa a fait savoir que l’administration n’attire plus les talents ou les profils à potentiel, notant que le défi du développement de compétences renvoie à la formation continue et à des profils de carrière associés à la performance et aux résultats et enfin du défi de la valorisation du leadership pour encourager la prise d’initiative, développer la capacité à résoudre les problèmes complexes et responsabiliser sur les résultats sans multiplier les contrôles à priori. Selon le ministre, trois pistes d’amélioration sont envisagés, à savoir la focalisation sur le cœur de métier notamment en matière de conception et suivi des politiques publiques, de régulation des services publiques par l’encouragement de l’externalisation de prestations périphériques et la délégation de services publiques à des opérateurs qu’ils soient privés ou de tiers secteur.
Il s’agit aussi d’adopter une approche de gestion différenciée en fonction du niveau du risque qui peut permettre d’alléger des procédures en fonction de la catégorisation, de la labellisation d’acteurs et d’admettre d’être dans un système apprenant, a-t-il expliqué.
Enfin, M. Benmoussa a appelé à mettre en place une approche qui intègre la gestion du temps et l’indicateur délai de traitement et de décision comme critère de performance en obligeant le ré-engineering des process et une coordination plus fluide entre services différents.
« Il convient d’être en situation d’arbitrer continuellement entre coût, délai et qualité des prestations dans un monde incertain et de manière agile pour pouvoir accompagner le changement et le rythme de transformation », a-t-il souligné, appelant à une véritable révolution de la gouvernance publique.
Le colloque a démarré par la présentation des rapports introductifs et des témoignages, suivis de discussions étalées sur trois panels. Le premier a abordé le rôle des acteurs clés dans le modèle de gouvernance cible en matière de régulation de la décision en finances publiques à savoir, le rôle des pouvoirs législatif et exécutif et celui des collectivités territoriales. Le second a porté sur la problématique de la décision en matière de régulation de la gestion financière publique et les dispositifs de gouvernance y afférents, liés au modèle de programmation budgétaire, à l’intelligence artificielle et au renforcement des capacités d’évaluation.
Le troisième, a quant à lui, traité du nouveau management des finances publiques en l’occurrence, la nouvelle acception de la standardisation des modèles financiers publics, la responsabilisation des acteurs financiers publics et la qualification des ressources humaines.
Selim Benabdelkhalek