Une chaîne de fabrication de batteries électriques à Huaibei (Chine) le 30 mars 2020 © AFP STR
L’activité manufacturière en Chine, qui s’était effondrée en février, a connu en mars un rebond surprise malgré le coronavirus, mais la Banque mondiale s’alarme désormais d’un risque de croissance zéro pour la deuxième économie mondiale.
L’indice des directeurs d’achats (PMI) pour le mois de mars s’est établi à 52 points contre 35,7 en février, un plancher historique, a annoncé mardi le Bureau national des statistiques (BNS).
Un chiffre supérieur à 50 témoigne d’une expansion de l’activité et, en deçà, il traduit une contraction.
Il s’agit d’un résultat bien supérieur à la prévision moyenne des analystes sondés par l’agence Bloomberg, qui tablaient sur 44,8. C’est aussi la meilleure performance pour cet indice depuis septembre 2017.
L’épidémie, qui a eu de graves répercussions sur la production et le fonctionnement des entreprises, a provoqué l’arrêt quasi total du pays en février, au moment où des centaines de millions de Chinois tétanisés par le virus se terraient chez eux.
Les mesures anti-épidémie ont fortement perturbé les transports et compliqué les approvisionnements en pièces détachées et matières premières.
Depuis, l’activité reprend, à la faveur d’un fort ralentissement de la contagion et d’une levée progressive du confinement. Mais les conséquences sur l’économie devraient s’éterniser.
Le rebond de l’activité manufacturière « ne signifie pas un retour à la normale de la situation économique », a prévenu le BNS.
Avec une économie à la peine, un pouvoir d’achat en berne et une pandémie qui paralyse désormais les principaux partenaires commerciaux du géant asiatique, l’horizon est loin d’être dégagé.
– Croissance nulle ? –
Et contrairement à ce qu’ils avaient fait lors de la crise financière de 2008-2009, les dirigeants chinois semblent cette fois écarter un plan de relance massif dans les infrastructures.
A l’époque, la Chine s’était lancée dans de vastes projets coûteux, souvent peu rentables et qui ont lourdement pesé sur les finances des gouvernements locaux. La priorité est depuis au désendettement.
La Chine, qui fixe traditionnellement un objectif de croissance en mars pour l’année en cours, n’a toujours pas communiqué de chiffre pour 2020. Et un éminent conseiller économique de la banque centrale estime que le pays devrait carrément s’abstenir de le faire.
« Les conséquences sur l’économie chinoise dépendent principalement de l’évolution de la pandémie aux Etats-Unis et en Europe », principaux partenaires commerciaux de Pékin, souligne ce conseiller, Ma Jun.
En janvier, la Banque mondiale tablait encore sur une croissance de 5,9% pour le géant asiatique.
Mais si les effets de la pandémie se font ressentir plus longtemps qu’escompté, le scénario du pire pourrait bien se concrétiser. Et la croissance du géant asiatique dégringoler à presque rien, 0,1%, a prévenu lundi l’institution de Washington.
« Reste à voir si le gouvernement (chinois) peut réactiver l’activité économique aussi brusquement qu’il l’a arrêtée », indique la Banque mondiale dans un rapport, sur la base de données collectées jusqu’au 27 mars.
Le document relève que de nombreuses grandes entreprises industrielles disent avoir repris la production. Mais sur le terrain, un grand nombre de petites et moyennes entreprises sont toujours en difficulté.
« Des estimations indirectes, telles que les indicateurs de pollution, montrent que l’activité ne s’accroît que progressivement en Chine », fait remarquer l’étude.
– Menace pour les pauvres –
« Il est particulièrement difficile de faire des projections précises dans un environnement en constante évolution », a reconnu Aaditya Mattoo, chef économiste à la Banque mondiale pour la région Asie de l’Est-Pacifique.
Pour autant, des éléments tangibles accréditent la thèse d’un ralentissement vertigineux. L’ampleur du choc est inédit: celui-ci affecte à la fois la demande et les chaînes d’approvisionnement et il secoue les marchés financiers.
« La maladie elle-même est dans une instabilité constante », a constaté M. Mattoo.
Pour l’ensemble de la région Asie de l’Est-Pacifique, la croissance pourrait ralentir à 2,1% contre 5,8% en 2019 et peut-être même être en contraction de 0,5% dans le scénario le plus pessimiste.
En outre, comparée aux estimations effectuées avant la pandémie, la réduction de la pauvreté va être beaucoup moins rapide que prévu, estime la Banque.
Celle-ci table désormais sur 24 millions de personnes de moins capables de sortir de cette situation difficile, c’est-à-dire vivant avec 5,50 dollars par jour.
La Banque s’attendait initialement à une baisse de 35 millions de pauvres dans cette région cette année, dont plus de 25 millions en Chine.
LNT avec Afp