Un vigile devant le marché de gros où le nouveau coronavirus a été repéré en premier en décembre, le 24 janvier 2020 à Wuhan © AFP/Archives Hector RETAMAL
Après dix jours d’interruption, les Bourses chinoises ont dévissé d’environ 8% lundi, leur plus fort plongeon depuis cinq ans, paniquées par l’impact économique de l’épidémie de pneumonie virale malgré des mesures de la banque centrale pour rassurer les marchés.
Le plongeon était attendu: du fait des traditionnelles vacances du Nouvel an lunaire, les marchés de Shanghai et Shenzhen étaient fermés depuis le 24 janvier, soit au lendemain du confinement de la ville de Wuhan, foyer du nouveau coronavirus.
Or, pendant ce temps, les indices boursiers mondiaux ont piqué du nez depuis dix jours, effrayés par les conséquences de l’épidémie sur la croissance de la Chine, deuxième économie mondiale, où l’activité reste encore largement paralysée.
D’où l’effet de rattrapage: l’indice composite shanghaïen a clôturé lundi sur une chute de 7,72% à 2.746,61 points, tandis que la Bourse de Shenzhen, deuxième place de Chine continentale, finissait en repli de 8,41% à 1.609,00 points. C’est leur plus forte baisse depuis le krach boursier de l’été 2015.
« La panique des investisseurs s’est propagée sur l’ensemble de la cote, elle dominera le marché à court terme », observe Yang Delong, économiste du fonds d’investissement First Seafront.
Presque 3.500 titres ont chuté de 10%, seuil à partir duquel les échanges sont automatiquement suspendus sur l’action concernée, selon un décompte Bloomberg.
L’épidémie, qui a désormais fait plus de morts (362 décès confirmés) que le virus du Sras en 2002-2003, pesait également sur les marchés chinois des changes et des matières premières, eux aussi rouverts lundi.
La monnaie chinoise a trébuché de 1,5%, passant sous le seuil symbolique de sept yuans pour un dollar, tandis que les échanges ont été suspendus sur le minerai de fer, le cuivre ou le pétrole, après des plongeons atteignant le seuil maximal autorisé.
– Banque centrale à la manoeuvre-
Les marchés chinois auraient dû rouvrir vendredi, mais Pékin a prolongé la période fériée de trois jours dans l’espoir de retarder la ruée dans les trains et endiguer la contagion.
Les autorités avaient bien tenté de rassurer les investisseurs: la banque centrale (PBOC) avait ainsi annoncé son intention d’injecter lundi 1.200 milliards de yuans (156 milliards d’euros) de liquidités dans le système financier pour contrer l’impact de l’épidémie.
De nouveau, l’institution était à la manoeuvre lundi, abaissant à 2,4% (contre 2,5% précédemment) son taux de mise en pension sur sept jours – le taux préférentiel qu’elle applique aux banques commerciales pour les prêts à court terme.
Cela « pourrait alléger la pression sur les banques » en réduisant leurs coûts de financement, mais « cette baisse de taux reste trop marginale pour contrecarrer substantiellement les dommages infligés à l’activité économique », avertit Julian Evans-Pritchard, du cabinet Capital Economics.
Mesures de confinement, liaisons ferroviaires suspendues, fermeture de la plupart des entreprises et usines jusqu’au 9 février: les mesures adoptées pour endiguer l’épidémie continuent de paralyser des pans entiers de l’économie – et menacent des chaînes de production à l’échelle du globe.
– La croissance menacée –
A Shanghai, le titre de Foxconn Industrial Internet, entité cotée du mastodonte taïwanais de l’électronique Foxconn, s’est ainsi effondré lundi de 10% dès l’ouverture.
Foxconn, sous-traitant crucial du géant américain Apple, a annoncé qu’il ne redémarrerait pas ses usines chinoises avant la mi-février.
De son côté, Kweichow Moutai, producteur de l’alcool blanc « baijiu » traditionnellement offert au Nouvel an, a terminé en baisse de 4,64%.
Reflet d’une consommation sous pression: restaurants et centres commerciaux sont fermés et les Chinois paniqués restent calfeutrés chez eux.
Le voyagiste CITS tout comme les compagnies aériennes China Southern et China Eastern ont chuté de 10%. Pékin a interdit les voyages en groupe et de nombreuses liaisons aériennes entre la Chine et le reste du monde sont interrompues.
La panique n’épargnait quasiment aucun secteur, à l’exception des titres de fabricants de matériels médicaux (masques, équipements de protection) dont certains se sont envolés de plus de 10%.
Plusieurs analystes tablaient lundi sur un net ralentissement de la croissance chinoise sous 5% au premier trimestre, notant que les outils de relance de Pékin pourraient s’avérer limités face à une conjoncture déjà morose et une confiance en berne.
La Bourse de Hong Kong, qui avait plongé la semaine dernière, s’est stabilisée lundi (+0,17%, à 26.356,98 points). Ailleurs en Asie, Tokyo a abandonné 1,01% à 22.971,94 points.
LNT avec Afp