Les enquêtes sécuritaires menées sur la cellule terroriste démantelée à Had Soualem ont mis en lumière des liens organiques avec l’organisation terroriste Daech au Sahel, ainsi que l’utilisation intensive des réseaux numériques pour le recrutement et la radicalisation. Cette cellule illustre la menace persistante que représente l’extrémisme violent au Maroc et la nécessité d’une vigilance accrue face aux nouvelles méthodes de recrutement et de passage à l’acte terroriste.
Une connexion directe avec Daech au Sahel
Selon le Directeur du Bureau central d’investigations judiciaires (BCIJ), Cherkaoui Habboub, la cellule de Had Soualem était en relation avec un dirigeant influent de Daech dans la région du Sahel, qui jouait un rôle clé dans l’embrigadement et l’endoctrinement de ses membres. Ce cadre terroriste facilitait l’adhésion des recrues à l’idéologie djihadiste via des publications et du contenu numérique extrémiste, destiné à accélérer leur radicalisation.
Le responsable du BCIJ a souligné que ces contenus avaient pour objectif de transformer les membres de la cellule en individus prêts à mourir pour leur cause, et capables d’exécuter rapidement des attentats. Cette stratégie s’inscrit dans une tendance plus large où Daech privilégie les attaques de « loups solitaires », réduisant ainsi les risques d’infiltration de ses réseaux par les services de renseignement.
La région du Sahel est devenue un foyer de radicalisation et un point de départ pour de nombreuses cellules terroristes actives en Afrique du Nord. Depuis 2022, les services de sécurité marocains ont démantelé plus de 40 cellules terroristes ayant des liens étroits avec Al-Qaïda et Daech dans cette région. De plus, 130 extrémistes marocains ont rejoint des zones de conflit en Afrique, renforçant les inquiétudes sur l’ampleur de la menace terroriste.
L’embrigadement familial, un phénomène en recrudescence
Lors du point presse, M. Habboub a souligné que la dangerosité de cette cellule ne résidait pas uniquement dans ses projets d’attentats ni dans l’avancée de ses préparatifs, mais aussi dans son mode de recrutement basé sur un embrigadement familial intense. Le prétendu “émir” de cette cellule, qui est le grand frère, a réussi à transformer sa propre famille en un noyau extrémiste, influençant ses proches pour les enrôler dans un projet terroriste. Ce phénomène, bien que marginal au sein de la société marocaine, représente un défi sécuritaire et social de taille.
Ce cas rappelle d’autres précédents, notamment la cellule féminine démantelée le 3 octobre 2016, où plusieurs femmes s’étaient radicalisées sous l’influence de leur entourage familial. De même, la cellule “État islamique au Maghreb islamique”, neutralisée en décembre 2015, reposait également sur des liens familiaux étroits.
Les organisations terroristes, en particulier Daech, exploitent désormais ces dynamiques familiales pour renforcer leur présence et contourner les dispositifs de surveillance. Dans les zones de tension, leurs chefs incitent leurs combattants à recruter leurs frères, cousins et proches pour élargir leur réseau, comme en témoigne la cellule des “trois frères” de Had Soualem.
Une propagande numérique efficace et inquiétante
L’enquête du BCIJ a révélé que les membres de la cellule de Had Soualem utilisaient les réseaux sociaux pour structurer leur organisation et planifier leurs actions. À travers des groupes virtuels, ils unifiaient leur orientation idéologique, échangeaient sur la fabrication d’explosifs et de poisons, et participaient à la diffusion de contenus terroristes visant les jeunes et les mineurs.
Les autorités marocaines ont constaté que de plus en plus de terroristes potentiels suivent des formations exclusivement en ligne, sans passer par des camps d’entraînement physiques. Ce mode opératoire constitue un défi majeur pour les services de sécurité, car il permet à des individus radicalisés d’agir en toute discrétion avant de passer à l’acte.
Un projet terroriste avancé et structuré
Les investigations ont montré que la cellule de Had Soualem était à un stade avancé de son projet terroriste. Elle prévoyait notamment des attaques explosives ciblant des sites sécuritaires sensibles, des grandes surfaces et des commerces fréquentés par des Marocains et des étrangers.
Les membres de la cellule avaient déjà effectué des repérages détaillés des lieux visés, capturant des images sous différents angles, identifiant les issues d’évacuation et traçant des schémas précis des itinéraires. Sur le plan logistique, ils avaient acquis des substances chimiques, du matériel de soudage et des équipements à double usage pouvant servir à la fabrication d’engins explosifs.
Par ailleurs, les membres avaient acheté plusieurs armes blanches de différentes tailles, s’inspirant des méthodes de Daech pour des exécutions brutales et la mutilation des corps. Ils recevaient régulièrement des vidéos de dirigeants de Daech au Sahel documentant des actes barbares pour les guider dans la mise en œuvre de leurs actions.
Une intervention sécuritaire rigoureuse et sans faille
Le démantèlement de la cellule a nécessité une opération sécuritaire de grande envergure, conformément aux protocoles rigoureux en vigueur. Le porte-parole de la Direction générale de la Sûreté nationale (DGSN) et de la Surveillance du territoire (DGST), Boubker Sabik, a précisé que cette intervention a mobilisé le BCIJ, les forces spéciales et des tireurs d’élite, afin de neutraliser toute menace potentielle.
Les forces de l’ordre ont notamment eu recours à des canidés spécialisés dans la détection d’explosifs, en raison de la présence suspectée de substances dangereuses. L’opération s’est déroulée sans incident majeur et sans perte humaine du côté des forces de sécurité, illustrant l’efficacité des dispositifs mis en place.
Une expertise scientifique confirmant la dangerosité des explosifs saisis
Lors du point de presse du BCIJ, le préfet de police Abderrahmane El Yousfi Alami a révélé que l’expertise scientifique a confirmé la nature hautement dangereuse des substances saisies chez les membres de la cellule. Il a expliqué que les produits chimiques récupérés sont essentiels à la fabrication d’engins explosifs artisanaux aux capacités destructrices variées.
Parmi les objets saisis figurait notamment du raticide, destiné à être mélangé à des clous pour augmenter la létalité des explosions et maximiser les pertes humaines. L’enquête a également identifié des outils de laboratoire et des équipements servant à la manipulation de ces substances, confirmant l’intention des suspects de fabriquer des bombes artisanales prêtes à l’emploi.
Une menace persistante nécessitant une vigilance accrue
Le démantèlement de la cellule de Had Soualem met une nouvelle fois en évidence l’évolution des tactiques terroristes et la capacité des organisations extrémistes à utiliser les nouvelles technologies pour recruter, endoctriner et préparer des attaques.
Les services de sûreté nationale marocains continuent d’adapter leurs stratégies pour répondre à ces défis, notamment en intensifiant la surveillance des espaces numériques et en renforçant la coopération internationale en matière de lutte contre le terrorisme.
Par ailleurs, les autorités soulignent l’importance de la communication avec les médias pour contrer les campagnes de propagande visant à discréditer les efforts sécuritaires. L’objectif est d’informer la population sur la réalité de la menace terroriste et de renforcer la résilience nationale face aux dangers de l’extrémisme violent.
À l’approche d’événements sportifs et internationaux que le Maroc accueillera dans un futur proche, la sécurité demeure une priorité absolue pour garantir la stabilité du pays et la sûreté des citoyens et des visiteurs.
LNT