Le ministre français des Finances, Bruno Le Maire, à son arrivée à une réunion de l'Eurogroup au Luxembourg, le 13 juin 2019 © AFP JOHN THYS
La France et l’Allemagne espèrent un compromis européen sur les contours d’un budget de la zone euro lors d’une réunion ministérielle jeudi à Luxembourg, quelque peu ternie par les bisbilles entre l’Italie et Bruxelles, qui la menace de sanctions pour sa dette excessive.
Les ministres des Finances de l’UE doivent se mettre d’accord sur les grandes lignes d’un budget de la zone euro, un projet phare du président français Emmanuel Macron, considérablement revu à la baisse.
Fervent défenseur de cette initiative, le ministre français des Finances, Bruno Le Maire a déclaré en arrivant à Luxembourg: « J’espère qu’on atteindra un compromis, peut-être aujourd’hui ou demain très tôt ». « Nous sommes proches » d’un accord, a ajouté son homologue allemand, Olaf Scholz.
Mandatés par les dirigeants européens en décembre, les ministres des Finances débattent depuis six mois de cette question qui divise les pays du Sud, partisans d’une plus grande solidarité, et ceux du Nord, adeptes de la rigueur budgétaire.
Or, la méfiance des partisans de la discipline, emmenés par les Pays-Bas, face à des Etats du Sud jugés trop dépensiers, s’est accrue après les récentes tensions entre la Commission européenne et le gouvernement italien, qui laisse filer son énorme dette publique.
MM. Le Maire et Scholz ont d’ailleurs exhorté Rome à se montrer conciliant. « Je souhaite que l’Italie saisisse la main tendue par la Commission en prenant les mesures appropriées », a dit le Français. « Les règles ne sont pas seulement quelque chose qui est écrit sur un papier, elles ont des objectifs », a ajouté M. Scholz.
Baptisé « instrument budgétaire pour la compétitivité et la convergence », l’embryon de budget de la zone euro a pour objectif d’encourager des réformes structurelles pour accroître la compétitivité dans les 19 pays ayant adopté la monnaie unique.
Concrètement, ce serait par exemple, explique une diplomate française, la réforme de la formation professionnelle, qui pourrait être financée, au moins partiellement, par cet instrument. Mais si les pays ne tiennent pas leurs engagements de réformes, ils devront rembourser les fonds alloués.
– « Gros bazooka » –
Cet « instrument » sera incorporé dans le budget de l’UE (donc des 27 pays de l’Union, moins le Royaume-Uni qui doit en sortir). Il ne porte d’ailleurs pas le nom de « budget de la zone euro », comme l’avait au départ imaginé M. Macron, les pays du Nord étant opposés à un budget propre à cette zone.
Son montant devrait être aussi bien moindre que celui souhaité par le président français, qui envisageait plusieurs centaines de milliards d’euros.
La discussion sur l’ampleur exacte de cet « instrument » se fera d’ailleurs plus tard dans l’année, lors des négociations plus globales sur le futur cadre du budget pluriannuel de l’UE pour 2021 à 2027.
Deux sources européennes évoquaient une enveloppe de 17 milliards d’euros répartis sur sept ans entre les 19 pays.
« On va démarrer avec un montant plutôt petit, ce ne sera pas le gros bazooka (au début, ndlr), mais il peut grossir » grâce à des revenus supplémentaires provenant de nouvelles taxes par exemple, a indiqué un haut responsable européen.
La France et l’Allemagne proposent ainsi d’établir une taxe sur les transactions financières (TTF) au niveau européen –un projet en souffrance depuis plusieurs années– qui permettrait de l’abonder.
Second point des réformes de la zone euro où les ministres des Finances doivent encore progresser jeudi: le renforcement du Mécanisme européen de stabilité (MES), créé en 2012 en pleine crise de la dette, et destiné à venir en aide aux pays en difficulté.
Troisièmement, ils doivent aussi avancer sur l’Union bancaire, lancée en 2012 après la crise financière et qui est actuellement dans l’impasse.
Depuis des années, l’Allemagne traîne les pieds pour créer un système européen de garantie des dépôts (EDIS en anglais), craignant de voir ses épargnants payer pour les banques de pays du Sud, comme les italiennes. Berlin veut que soit d’abord réduit le niveau des créances douteuses des mauvais élèves avant de procéder à une mutualisation.
LNT avec AFP