
L'ambassadeur britannique auprès de l'Union européenne Ivan Rogers (D) avec l'ancien Premier ministre britannique David Cameron (G) à Bruxelles le 19 février 2016 © AFP/Archives THIERRY CHARLIER
L’ambassadeur britannique auprès de l’Union européenne Ivan Rogers a démissionné de ses fonctions, moins de trois mois avant le déclenchement attendu de la procédure de sortie du Royaume-Uni de l’UE, a annoncé mardi une source gouvernementale.
Selon les médias britanniques, ce départ serait lié à une détérioration de ses relations avec certains membres du gouvernement sur le dossier du Brexit.
Le mois dernier, M. Rogers avait été au coeur d’une polémique après la fuite de propos tenus devant des ministres britanniques. Il leur aurait ainsi expliqué que les 27 autres Etats membres de l’UE estimaient qu’un nouvel accord commercial, censé gérer les futures relations entre le Royaume-Uni et l’UE après le Brexit, ne serait pas signé avant le début voire le milieu de la décennie 2020.
Lors de cette rencontre, en octobre, M. Rogers aurait également souligné que le futur accord courait aussi le risque d’être rejeté par les parlements de ces pays qui devront tous être consultés.
« Ce n’est pas la position de Sir Ivan Rogers et ce n’est pas la position du gouvernement », avait réagi le porte-parole de Downing Street. « L’ambassadeur a répercuté des avis qui lui sont parvenus, comme il se doit ».
La Première ministre conservatrice Theresa May a assuré qu’elle activerait l’article 50 du Traité de Lisbonne, qui ouvrira les négociations de sortie, avant la fin du mois de mars.
Cela lancera un compte à rebours de deux ans, à l’issue desquels le Royaume-Uni quittera le bloc européen.
« L’objectif est que nous obtenions un accord au cours de cette période qui nous permette de quitter l’Union européenne et de nous autoriser à commercer avec et au sein du marché unique européen », avait ajouté le porte-parole.
– Un changement « pas idéal » –
Les propos d’Ivan Rogers avaient déclenché la furie de la presse anti-européenne tandis que des sources diplomatiques à Bruxelles avaient estimé que le diplomate avait peut-être été la victime de pro-Brexit soucieux de se débarrasser de lui.
« Sa démission n’est pas une surprise pour ceux qui travaillent avec lui », a commenté un diplomate européen. « Il était très compétent, mais pas convaincu par la décision d’un Brexit et la ligne du gouvernement britannique, qui entraînera le Royaume-Uni dans une zone d’incertitude dangereuse ».
Pour le directeur du centre d’étude sur les questions européennes Centre for European Reform, Charles Grant, cette démission « rend la possibilité d’un bon accord sur le Brexit moins probable ». M. Rogers « était l’un des rares responsables de haut niveau britanniques à comprendre l’UE ».
« Les 27 prendront la démission de M. Rogers comme un signe que le gouvernement May préfère gagner les faveurs des (euro)sceptiques purs et durs plutôt que de garder son expert de haut niveau sur l’UE », a-t-il ajouté.
Changer d’ambassadeur, si près d’une échéance stratégique pour le Brexit, « n’est pas idéal », a regretté de son côté Hilary Benn, le président de la commission parlementaire sur le Brexit, sur la BBC.
Cette démission a en revanché été saluée par certains partisans d’une sortie sans compromis de l’UE, à l’instar d’Arron Banks, le président de « Leave.EU », une organisation pro-Brexit.
« C’est un homme qui affirmait qu’il faudrait dix ans pour faire un accord sur le Brexit », a-t-il déclaré dans un communiqué. « En démissionnant, il a enfin pris la décision honorable qui s’imposait ».
Nigel Farage, ex-chef du parti europhobe Ukip, a lui salué cette démission, sur Twitter. « Le Foreign Office a besoin d’un grand ménage ».
M. Rogers avait été nommé en novembre 2013 par le gouvernement de David Cameron et devait rester en poste jusqu’à la fin de l’année.
LNT avec Afp