L'ex-président Lula, le 7 avril 2018 à Sao Bernardo do Campo (Etat de Sao Paulo, sud-est du Brésil) © AFP/Archives NELSON ALMEIDA
Le Tribunal supérieur de justice du Brésil (STJ) a accordé mardi à l’ex-président Lula un allègement significatif de sa peine de prison pour corruption, lui laissant espérer un aménagement de sa peine.
Après le rejet de moult recours déposés par sa défense, le chef historique de la gauche brésilienne de 73 ans, emprisonné depuis plus d’un an, voit enfin une éclaircie, même s’il n’a pas été innocenté et si ses démêlés avec la justice sont très loin d’être terminés.
Ses avocats ont immédiatement décidé de faire appel du jugement unanime des quatre magistrats de Brasilia qui représente une victoire en demi-teinte pour Lula.
« L’acquittement est la seule issue possible, car l’ex-président Lula n’a commis aucun crime. Pour cette raison nous allons faire appel », a annoncé Me Cristiano Zanin Martins à la presse.
Les magistrats du STJ ont décidé de réduire la peine du prisonnier le plus célèbre du Brésil — de 12 ans et un mois de prison à huit ans et 10 mois. Ils ont aussi fortement baissé le montant des amendes infligées à Lula pour les avantages perçus indûment.
Deux fois président (2003-2010), Lula est tombé dans les filets de l’enquête « Lava Jato » (Lavage express) autour du gigantesque scandale de corruption lié à l’entreprise pétrolière étatique Petrobras.
« Maintenant Lula va avoir le droit de passer au régime semi-ouvert en octobre, parce qu’il aura effectué un sixième de sa peine », a expliqué à l’AFP Lenio Streck, professeur de droit constitutionnel. « Cela va totalement changer ses perspectives ».
Ce régime autorise un condamné à avoir un emploi ou à suivre une formation à l’extérieur de la prison mais l’oblige à rentrer le soir dans sa cellule pour y dormir.
– « Recours spécial » –
« Le plus probable serait que ce soit à Sao Paulo, parce qu’il a un institut (l’Institut Lula, dans la métropole du sud-est, ndlr), et parce qu’un ancien chef d’Etat a quelques prérogatives », a ajouté le juriste.
Incarcéré depuis avril 2018 à Curitiba (sud), l’ex-chef d’Etat avait été condamné en deuxième instance pour avoir bénéficié d’un triplex à Guaruja (littoral de l’Etat de Sao Paulo) de la part d’un groupe du BTP en échange de contrats avec Petrobras.
Un régime semi-ouvert pour Lula pourrait avoir un impact sur la vie politique au Brésil, où la gauche, défaite par Jair Bolsonaro (extrême droite) à la présidentielle, peine à se relever et où le Parti des Travailleurs (PT) reste orphelin de son chef charismatique.
En novembre, le juge Felix Fischer, du STJ, avait rejeté un « recours spécial » de Lula, mais sa défense avait demandé qu’un collège de magistrats examine ce pourvoi.
Des scenarii très divers avaient été envisagés par les juristes. Le STJ pouvait mardi aussi confirmer la condamnation à 12 ans et un mois de prison de Lula, la réduire avec une possibilité de résidence surveillée, ou acquitter le prisonnier.
– « Pourrir en prison » –
« Lula est innocent, il mérite d’être acquitté, mais les votes (au STJ) en faveur d’une réduction (de peine) montrent le niveau de persécution et d’arbitraire auquel il a été soumis », a déclaré sur Twitter la cheffe du PT, Glesi Hoffmann.
Lula, qui reste aimé de millions de Brésiliens et haï par des millions d’autres, n’a cessé de dénoncer une persécution politique pour empêcher la gauche de revenir au pouvoir.
« On n’a jamais présenté de preuve contre moi. Je suis un prisonnier politique », a récemment écrit l’ex-président qui avait été empêché de se présenter à un troisième mandat en octobre 2018 alors qu’il était le grand favori des enquêtes d’opinion.
La situation de Lula dans les prochains mois semble promise à de nombreux rebondissements.
L’ex-président a en effet été condamné en février à une autre lourde peine de prison, de 12 ans et 11 mois, par un tribunal de première instance pour avoir fait financer des travaux dans une autre propriété, également en échange de son intercession dans des contrats.
Et le cours judiciaire de cette affaire pourrait compromettre l’octroi d’un régime semi-ouvert à Lula en octobre: s’il était condamné d’ici là en deuxième instance, il ne sortirait plus de prison.
Lula est également mis en cause au total dans une demi-douzaine d’affaires.
Le président d’extrême droite Jair Bolsonaro, farouche ennemi de la gauche, avait souhaité à Lula de « pourrir en prison », promettant une lutte sans merci contre la corruption en arrivant au pouvoir en janvier.
LNT avec Afp