Crédit photo : Ahmed Boussarhane
« Quand la Chine s’éveillera… le monde tremblera », écrit l’auteur français Alain Peyrefitte en 1973. Après plus de 40 ans, la Chine s’est bel et bien éveillée, mais le monde n’a pas tremblé. Bien au contraire, explique Fathallah Oualalou : « Aujourd’hui, la Chine est au service de l’économie mondiale. En effet, lors de la crise mondiale de 2008, la résilience de l’économie chinoise a évité au monde les pires des scénarios catastrophiques. En Amérique Latine, l’économie chinoise a fortement contribué au désenclavement économique des pays de cet espace sud-américain. En Afrique, la Chine a réussi à offrir des opportunités de croissance économique pour les pays du Continent ». Et en Europe, la Chine a surclassé le premier partenaire économique de ce continent en 2014, à savoir les Etats-Unis, explique Oualalou, pour qui le contexte devient critique à l’heure d’une Union divisée politiquement et économiquement.
Invité de la Fondation Attijariwafa bank pour la présentation de l’ouvrage « La Chine et nous: répondre au second dépassement », Oualalou estime que la Chine est une chance pour l’économie mondiale qui vit au rythme d’un contexte de crise mondiale, certes, mais qui n’a rien à voir avec celui de 1929 où le monde entier était économiquement chaotique : « La chance aujourd’hui, c’est que la Chine assure le rôle de locomotive d’une économie mondiale en difficulté majeure ».
Dans son analyse, Oualalou tient à préciser que depuis 1980, la Chine a pu maîtriser la cohabitation entre différents éléments, notamment la centralité du pouvoir, l’intégrité territoriale du pays, l’ouverture et l’attachement aux traditions ancestrales et une croissance fondée sur une main d’oeuvre peu chère avec une technologie développée et sophistiquée.
Pour le Maroc, le phénomène dit ‘‘Chine’’ ne date pas d’aujourd’hui. Entre les deux pays, c’est une longue histoire. Mais aujourd’hui la logique est outre, selon Oualalou : « Il s’agit d’abord d’un partenariat sud-sud ». Il s’agit également d’une vision commune où les deux pays s’accordent sur l’idée d’une Afrique qui se veut développée et dynamique : « En Afrique du sud en 2015, la Chine a décidé, au terme du meeting sino-africain, le transfert de capitaux publics et privés, à hauteur de 60 milliards de dollars, vers l’Afrique ». Pour Oualalou, il s’agit là d’un nouveau mode de partenariat et c’est dans ce cadre qu’intervient la vision royale pour l’Afrique : « La primauté est à l’économie dans un monde qui cherche aujourd’hui à se démondialiser en faveur de la régionalisation ».
Sur un autre registre, l’ancien ministre socialiste de l’Economie et des Finances Fathallah Oualalou, souligne que « toute économie est invitée aujourd’hui à tenir compte de la Chine, une économie présente en force dans l’économie mondiale, mais au lieu d’avoir peur de ce pays, il faut plutôt travailler avec ». Pour l’économiste par excellence de l’USFP, il ne s’agit pas là d’une économie en développement, ou encore une économie émergente : « Bien au contraire, la Chine est aujourd’hui une économie puissante inquiétant même les grandes puissances économiques, à leur tête les Etats Unis d’Amérique qui, paradoxalement, revient sur le protectionnisme au moment où une Chine maoïste défend le libéralisme, le libre-échange et la mondialisation ». Et il faut préciser, rappelle l’ex-maire de Rabat, que face à l’essoufflement des économies du Nord, la Chine s’impose en leader : « Le pays est premier en industrie, en NTIC, en économie verte, en automobile… ». Certes, le taux de croissance n’est plus à deux chiffres depuis 2014, passant de 14% à 6,5%, et la Chine a revu son modèle socio-économique, en s’armant de plusieurs milliards de dollars, s’offrant par la même occasion « de nouvelles routes commerciales ». La première est énergétique vers la Russie. La deuxième est ferroviaire vers l’Allemagne, et la troisième est maritime pour débarquer en Méditerranée vers l’Afrique.
Toutefois, il faut constater que le pays, n’est pas à l’abri d’un certain nombre de problématiques inquiétantes. En effet, la Chine reste le premier pays pollueur dans le monde. La Chine souffre aujourd’hui du vieillissement de la population. Et last but not least, la dette publique ne cesse d’exploser…
Hassan Zaatit