Crédits photo : Ahmed Boussarhane/LNT
Les sommités de l’Education Nationale et de l’apprentissage se sont retrouvés en ce début de semaine à Skhirat. Ministres, membres du gouvernement concernés par la mise en œuvre de l’INDH, représentants d’organismes internationaux et d’institutions publiques, diplomates et de nombre d’acteurs publics et privés et bien d’autres acteurs de la société civile, ont pris part à la deuxième édition des Assises Nationales du Développement Humain placée cette année sous le thème : » La qualité des apprentissages, clé du développement humain « .
En somme, le décor a été parfaitement planté pour un débat sérieux, responsable et profond sur Al Madrasa Al Watania, la problématique de l’apprentissage. Lors de cette journée également, les participants ont insisté sur la centralité de l’élève dans tout projet de réforme du système éducatif et le rôle crucial de l’enseignant, en tant que pilier de l’acquisition des apprentissages.
Le ministre de l’Éducation Nationale, Chakib Benmoussa, a fait relever que le développement du capital humain à travers une école de qualité, passe inéluctablement par la généralisation de l’enseignement préscolaire et le renforcement des capacités essentielles, notamment la lecture, l’écriture, la programmation et le calcul. Et de poursuivre que son département a mis en place une feuille de route pour un développement éducatif qui détermine les priorités de la période 2022-2026, et qui vise à orienter les efforts vers des mesures qui impactent directement l’apprenant.
L’INDH participe au renforcement des services du soutien social et éducatif à travers son programme consacré à encourager la réussite et à traiter des causes principales de la déscolarisation dans les milieux pauvres et vulnérables, a-t-il ajouté, précisant qu’elle renforce les capacités et les aptitudes cognitives chez les élèves du primaire, en partenariat avec les directions provinciales du ministère.
Pour sa part, le ministre délégué auprès du ministre de l’Economie et des Finances, chargé du budget, Faouzi Lekjaa, a assuré qu’il est impossible de concevoir une réforme du système éducatif sans se poser les questions relatives aux défis sociaux et économiques globaux des familles : « Le système éducatif ne peut être réformé sans remémorer les capacités et le climat dans lequel vivent les familles, notamment en milieu rural… Les ressources financières allouées au ministère de l’Education nationale ont considérablement évolué lors des deux dernières décennies… En dépit des efforts consentis dans ce cadre, les résultats demeurent en deçà des ambitions ».
Pour le ministre de l’Intérieur, Abdelouafi Laftit, la question des apprentissages, en tant que levier de valorisation du capital humain, est une problématique qui interpelle tout un chacun et requiert tout l’intérêt et l’attention nécessaires, particulièrement de la part des intervenants institutionnels, des familles, de la société civile, des conseils élus et du secteur privé. Le tout afin d’aboutir à des solutions efficaces permettant d’améliorer le niveau d’acquisition par les enfants des connaissances de base, de faciliter leur intégration dans la vie pratique.
Le contexte pressant et les références scientifiques derrière le choix de « la qualité des apprentissages, clé du développement humain » comme thème pour ces Assises, a poursuivi le ministre, s’appuient sur les orientations de la phase III de l’INDH, notamment son programme 4 visant l’impulsion du capital humain des générations montantes, en faisant face directement et de manière anticipative aux principales entraves au développement humain.
La problématique de la qualité des apprentissages représente, à l’heure actuelle, l’un des défis majeurs pour plusieurs pays compte tenu des déficits enregistrés, lesquels ont été aggravés par certaines crises, en particulier sanitaire, a-t-il fait observer, notant que les données nationales au titre de l’année scolaire 2020/2021 appuient ce constat, en particulier celles inhérentes aux élèves déscolarisés et au niveau du déficit dans les apprentissages pour les enfants scolarisés de moins de 10 ans, ce qui a impacté l’indice du développement humain du Royaume qui n’a pas dépassé 50%.
Cette situation, selon M. Laftit, est due principalement au manque d’acquisition par les apprenants des connaissances de base en matière de lecture, de mathématiques et de sciences, comme le confirment les résultats des concours internationaux dans lesquels les élèves marocains ont, malheureusement, occupé les dernières places du classement par rapport à leurs confrères des pays participants, « ce qui nous appelle tous à redoubler d’efforts pour instaurer un modèle éducatif national capable de relever les défis actuels et futurs et garantir un enseignement de qualité, équitable et durable au profit de l’ensemble des élèves marocains, en particulier en milieu rural et dans les zones reculées ».
En dépit de la forte adhésion de l’INDH pour soutenir les efforts considérables déployés par le département de l’Éducation nationale et du Préscolaire en vue de tirer vers le haut le niveau des apprentissages, a relevé M. Laftit, « la réalité demeure marquée par un déficit tangible en la matière, ce qui affecte négativement les indicateurs de développement humain dans notre pays ».
Lors du panel de clôture de ces Assises, les intervenants ont souligné la nécessité d’améliorer la qualité des apprentissages à travers l’adoption d’une approche holistique allant de l’accouchement, la santé de l’enfant et l’hygiène à la scolarisation, en passant par l’initiation à travers le préscolaire.
D’autres éléments ont été évoqués par les panélistes pour favoriser cette centralité de l’élève, dont la promotion du climat scolaire (gestion de l’établissement, infrastructures, règles et valeurs, rapport aux parents), le développement d’un système de l’évaluation de la qualité en évolution, ainsi que l’utilisation des nouvelles technologies pour améliorer la qualité des apprentissages et de l’intelligence artificielle pour la notation et l’évaluation.
En d’autres termes, le développement de l’élève marocain est un processus continu, et toute politique de développement doit prendre en compte sa complexité sous toutes ses facettes. Le Maroc, de son côté, a désespérément besoin d’une véritable réforme efficace de son système éducatif, et nombre de Marocains n’osent plus y croire…
Hassan Zaatit
L’apprentissage, Indice du Capital Humain (ICH)…
« La crise des apprentissages est une problématique mondiale qui a été exacerbée par la pandémie causée par la Covid-19. Aujourd’hui, on constate que presque tous les pays ont pris du retard en matière de qualité des apprentissages, un constat qui est plus manifeste dans les pays à revenus faibles ou intermédiaires. En 2022, la Banque mondiale estime que 70% des enfants de 10 ans pâtiraient de cette dégradation du niveau des apprentissages. Ce constat alarmant inquiète de nombreux experts et décideurs qui appellent de ce fait les pays à agir en urgence afin de contenir ce phénomène et d’éviter autant que possible l’accumulation des retards », lit-on dans une lettre de cadrage de ces assises.
« Au Maroc, la situation suscite également l’inquiétude des responsables et des familles. La crise sanitaire a frappé de plein fouet le secteur éducatif, accentuant un décrochage scolaire déjà préoccupant : 331.000 enfants ont ainsi quitté le système scolaire au titre de l’année scolaire 2020-2021. De plus, les fermetures d’écoles affectent de manière disproportionnée les élèves les plus défavorisés, justement ceux qui ne disposent pas des outils numériques qui leur permettraient de bénéficier de l’enseignement à distance », souligne-t-on.