Martin Schulz, leader du SPD et rival d'Angela Merkel, lors d'un congrès du parti à Dortmund, le 25 juin 2017 en Allemagne © AFP SASCHA SCHUERMANN
La campagne pour les législatives allemandes, qui jusqu’ici ronronnait, s’est subitement enflammée sous l’impulsion des sociaux-démocrates, ceux-ci attaquant sans ménagement Angela Merkel pour tenter de la faire vaciller.
« Arrogance du pouvoir », « attaque contre la démocratie » : le rival social-démocrate de la chancelière, Martin Schulz, n’y est pas allé de main morte dimanche, au cours d’un congrès de son parti, le SPD, à Dortmund.
Il s’est attiré lundi un tir de barrage du mouvement conservateur (CDU) de Mme Merkel.
« +Attaque contre la démocratie+ (…) une telle phrase est indigne d’un candidat SPD à la chancellerie », a tweetté Peter Altmaier, le bras droit de Mme Merkel à la chancellerie.
– ‘Terroristes’ –
« Ce sont des mots que l’on utilisait jusqu’ici pour des terroristes », a tonné une vice-présidente de la CDU, Julia Klöckner, qui fait partie du cercle rapproché de la chancelière.
Même son de cloche du côté des alliés bavarois de Mme Merkel, le secrétaire général de la CSU, Andreas Scheuer, estimant que ces « attaques personnelles contre la chancelière sont vaines et montrent l’immense impuissance du SPD ».
Le ton adopté par le chef de file des sociaux-démocrates, qui avait jusqu’ici évité toute attaque ad hominem contre Mme Merkel, a en effet surpris par sa virulence.
Il s’était engagé en arrivant à la tête du SPD en début d’année à refuser toute surenchère dans la campagne par souci de se démarquer de la droite nationaliste de l’Alternative pour l’Allemagne, qui a fait de la chancelière sa cible privilégiée en raison de sa décision d’ouvrir les portes de l’Allemagne aux réfugiés en 2015 et 2016.
A la traîne dans les sondages, il visait par ses propos sur l’atteinte « à la démocratie » la stratégie politique d’évitement adoptée depuis longtemps par Mme Merkel, et qui lui a valu de nombreux succès.
La chancelière est en effet passée maître dans l’art de fuir les conflits, afin de ne pas donner prise à ses adversaires et de jouer sur l’image de stabilité rassurante dont elle jouit dans l’opinion : Mme Merkel est au pouvoir depuis 2005 et briguera un quatrième mandat d’affilée aux législatives de septembre.
Son parti s’est surtout illustré jusqu’ici par son absence de campagne électorale, préférant laisser le bilan économique du pays, envié à l’étranger, parler pour lui.
L’offensive social-démocrate vise pour sa part à relancer une campagne mal en point face à une chancelière qui a pris le large dans les sondages. Elle devance l’ancien président du Parlement européen de 15 points dans les enquêtes d’opinion.
En attendant une réaction, attendue dans la soirée, de Mme Merkel elle-même, son porte-parole s’est chargé de rejeter les critiques du SPD.
« Il est clair pour le gouvernement que nous travaillons tous ensemble pour la démocratie », a déclaré Steffen Seibert à Berlin pendant un point de presse.
– « Panique » –
Patron du petit parti libéral FDP (centre droit) et possible allé de la prochaine coalition des conservateurs Mme Merkel, Christian Lindner a lui aussi condamné Martin Schulz, jugeant que l’emploi de tels mots introduisait « le danger de minimiser les véritables ennemis de la démocratie ».
Plusieurs journaux allemands se montrent également dubitatifs face à la virulence de M. Schulz.
Avec son « attaque frontale contre Merkel », Schulz suit une stratégie « claire » : « provoquer ses concurrents politiques » en « franchissant consciemment les frontières de la bienséance politique », juge la Frankfurter Allgemeine Zeitung.
« Des démocrates ne devraient pas parler comme ça d’autres démocrates », déplore le journal conservateur Die Welt, tandis que Bild, le quotidien le plus lu d’Allemagne, estime que « quand Schulz reproche à la chancelière une +attaque contre la démocratie+, ça ressemble à la panique, pas à un tournant ».
Dans ce contexte, les derniers mois de coalition entre les conservateurs et sociaux-démocrates au sein du gouvernement d’Angela Merkel promettent une cohabitation difficile.
LNT avec AFP