Depuis 2005, les FAR organisent l’exercice de coopération militaire « African Lion » et l’édition 2022 a été lancée cette année sur Hautes Instructions Royales. Et pour cause, cet exercice militaire, le plus grand en Afrique, revêt une dimension particulière dans le contexte international et régional.
Les FAR et l’AFRICOM (United States Africa Command), partenaires militaires de longue date, organiseront jusqu’au 30 juin des manœuvres communes avec 10 autres pays participants dont la France, le Royaume-Uni, le Brésil, le Tchad, la Tunisie, le Sénégal, le Ghana et Israël pour la première fois. De nombreux observateurs, de l’OTAN notamment, participent également à cette grande messe militaire.
Les objectifs affichés sont clairs et sans détour pour le Général de Corps d’Armée, Belkhir El Farouk, Inspecteur Général des FAR et Commandant la Zone Sud : « African Lion 2022 a pour objectif de renforcer nos capacités communes de défense pour contrer les menaces transnationales et les organisations extrémistes violentes ». Le Général ajoute que « les défis sécuritaires nous interpellent à tirer des enseignements des différentes situations, à converger les approches quant à l’utilité des exercices interarmées conjoints, à parfaire l’intégration des cadres au sein des Etats-Majors Multinationaux et à surpasser les barrières culturelles, linguistiques et procédurales pour une coopération plus synergétique ».
Au programme, exercices tactiques terrestres, maritimes, aériens et combinés, de jour et de nuit, opérations des forces spéciales, opérations aéroportées, actions civilo-militaires, exercices de lutte contre les armes de destruction massives et évacuation sanitaire… Autant dire que l’exercice est pris au sérieux par les différents participants.
Mais, c’est le contexte dans lequel interviennent ces manœuvres communes de l’African Lion qui interpelle les observateurs. Face à la belliqueuse Russie d’une part et à son relais africain l’Algérie, qui continue d’entretenir artificiellement le conflit du Sahara marocain et qui cumule des tensions fortes avec les pays voisins européens, espagnols et français, le Maroc et les États-Unis font une démonstration de force argumentative et à forte visibilité. Une manière limpide de révéler suffisamment sans trop en montrer. Le choix de Mahbès, près de la frontière algérienne pour une partie des exercices, les sauts de troupes aéroportées et des tirs d’artillerie prévus à la lisière du Sahara occidental marocain, non loin de Tindouf, l’inclusion de la Tunisie au dispositif, mais aussi la présence d’Israël, sonnent comme des avertissements destinés aux ennemis communs.
Les menaces transnationales et extrémistes qui sont dans le viseur de l’African Lion impliquent également notre voisin algérien dont le territoire s’étend jusqu’au Sahel et est une interface directe avec les pays subsahariens où opèrent les organisations terroristes violentes et les trafics en tout genre, notamment des réseaux d’immigration clandestine.
L’ancrage atlantique du Maroc, s’il fallait en douter, est donc bien acté et force est de constater que le tropisme occidental du Royaume lui confère une place stratégique dans ce qui semble se constituer comme un front uni de Washington à Rabat en passant par Tel Aviv. La visite de la ministre de la Défense israélienne Ayelet Shaked et ses entretiens avec son homologue Abdelouafi Laftit, sont une brique de plus à cette alliance dont l’African Lion témoigne de l’opérationnalité effective.
In fine, c’est de la portée des rugissements du Lion marocain dont il s’agit. Avec l’African Lion 2022, le Maroc montre, Urbi et Orbi, que son expertise ne s’exerce pas seulement sur le terrain diplomatique. A bon entendeur…
Zouhair Yata