Des proches portent le cercueil d'un soldat afghan tué dans une attaque talibane à Takhar, en Afghanistan, le 23 avril 2017 © AFP/Archives NASEER SADEQ
Les talibans afghans ont annoncé vendredi le lancement de leur offensive de printemps baptisée « Opération Mansouri », du nom de leur ancien chef, indiquant viser en priorité « les forces étrangères » pour les chasser du pays.
L’annonce, attendue, intervient alors que l’armée afghane est privée de ministre de la Défense et de chef d’Etat-major. Ils ont tous deux démissionné après l’assaut taliban meurtrier contre une base militaire la semaine dernière dans le nord du pays, qui a fait près de 200 victimes dont 135 morts au moins, de source officielle.
Dans leur communiqué, les talibans préviennent que « le principal objectif de l’opération Mansouri sera les forces étrangères, leurs infrastructures militaires et de renseignement, et l’élimination de leurs mercenaires locaux », terme par lequel ils désignent les soldats et policiers afghans.
Le ministère de l’Intérieur a semblé mépriser ces menaces: « Cette offensive n’a rien de neuf, chaque année ils publient le même communiqué, mais leurs opérations échouent, » a déclaré à l’AFP le porte-parole, Najib Danish.
Le chef du Pentagone, le général Jim Mattis, en visite lundi à Kaboul, a pourtant prédit « une nouvelle année difficile » pour le pays.
Quelque 12.000 soldats des forces occidentales dont 8.400 Américains sont stationnés en Afghanistan sous mandat de l’Otan, qui a déployé l’opération Resolute Support pour former et appuyer les forces afghanes après la fin de la mission de combat et le retrait de la majorité des troupes étrangères fin 2014.
En dépit de cet appui, l’armée et la police afghanes ne contrôlent plus que 57% des 460 districts du pays, selon le Sigar, organisme du Congrès à Washington chargé de contrôler les activités et dépenses américaines dans le pays.
Minées par les désertions et un faible commandement, souvent corrompu et régulièrement dénoncé par les Américains, les forces afghanes encaissent de lourdes pertes, en hausse de 35% en 2016 selon le Sigar, avec près de 7.000 policiers et soldats tués sur les neuf premiers mois.
Le général John Nicholson, patron des forces américaines en Afghanistan, a réclamé cet hiver « quelques milliers d’hommes supplémentaires » pour venir à bout de l’insurrection.
Outre les talibans, une branche locale du groupe Etat islamique combat également le gouvernement de Kaboul et ses alliés américains dans l’Est.
Trois soldats américains ont été tués dans ces combats ce mois-ci dans la province du Nangarhar, dont deux mercredi soir.
– ‘Journée des Moudjahidine’ –
L’annonce des talibans coïncide avec la « Journée des Moudjahidine », marquée en Afghanistan en hommage aux combattants qui depuis 1979 et l’invasion soviétique ont donné leur vie pour libérer le pays.
Se réclamant de cette tradition, ils menacent de recourir à un éventail de stratégies, guérilla, attentats suicides, « attaques complexes et attaques de l’intérieur » retournant des soldats ou des policiers contre leurs pairs.
Ces dernières sont particulièrement redoutées car elles entament le moral des troupes.
C’est le cas de l’assaut contre la base du 209è Corps d’armée le 21 avril dans le nord, revendiqué par les talibans. Quatre des assaillants avaient précédemment servi sur cette base.
Trente-cinq membres de la base ont été interpellés pour être entendus dans le cadre de l’enquête.
L’offensive porte le nom du mollah Mansour, tué le 22 mai 2016 par un drone américain au Pakistan. Il avait succédé au leader historique, mollah Omar, dont la mort a été annoncée en juillet 2015.
Preuve qu’ils se sentent confortés par leurs gains territoriaux, les talibans promettent d’opérer simultanément « sur deux axes, militaire et politique ».
« Dans les régions nettoyées de la présence ennemie et sous le plein contrôle des moudjahidine, une attention particulière sera portée à l’établissement de mécanismes de justice sociale et de développement », assurent-ils.
Ils ont déjà établi une administration parallèle dans les districts qu’ils contrôlent dont le Helmand, la province du pavot dans le sud, pratiquement entre leurs mains et dont ils encerclent la capitale, Lashkar-Gah.
Depuis plusieurs années, les combats marquent le pas mais sans cesser pendant la traditionnelle trêve hivernale.
Ils ont déjà fait plus de 2.100 victimes civiles au cours des trois premiers mois de 2017, selon le décompte des Nations Unies.
LNT avec Afp