Si nous pouvons admettre que «les problèmes de l’administration sont connus et inventoriés», il n’en demeure pas moins que les problèmes et les difficultés identifiés, ne sauraient englober la ‘‘crise’’ de cette administration dans sa totalité.
Présentée souvent comme un pas décisif vers une ‘‘transition démocratique’’ spécifiquement marocaine, la modernisation de l’administration du pays s’impose avec acuité. Cette nécessité de modernité nait elle-même, des difficultés qui perdurent depuis l’indépendance et des défis contemporains auxquels fait face l’appareil administratif marocain.
Samedi dernier à Casablanca, précisément au siège mythique de l’UMT, des ‘‘vieux’’ de l’administration marocaine ont débattu de la réforme de l’administration publique depuis l’indépendance, notamment à la lumière des nouvelles réformes adoptées par le gouvernement et des propositions des centrales syndicales.
Initié par l’UMT et la FDT, cette rencontre à laquelle a pris part le ministre délégué chargé de la réforme de l’administration publique et de la fonction publique, Mohamed Benabdelkader, a permis aux participants de se focaliser sur l’approche du gouvernement et les propositions des centrales syndicales en la matière.
Pour le ministre Benabdelkader, le modèle de la fonction publique, adopté depuis l’indépendance, n’est plus efficace pour accompagner les mutations en cours et faire face aux défis dans ce domaine, et dès lors la réforme était nécessaire. Et de poursuivre que le modèle français relatif à l’administration et à la fonction publique, en vigueur depuis des années au Maroc, n’est pas le seul modèle existant au niveau mondial.
Observant que les syndicats assument également la responsabilité de la réforme de ce secteur et après avoir souligné que tout le monde reconnaît l’existence de «déséquilibres majeurs et de lacunes» dans l’administration publique, le ministre a fait savoir que les réformes proposées visent à fournir un service efficient aux citoyens, tout en introduisant le mécanisme de reddition des comptes : «Débattre en ce moment de tout ce qui touche à la réforme de l’administration nécessite du courage, afin d’impliquer tout le monde dans la réforme visant à améliorer les prestations fournies par l’administration publique».
Pour sa part, El Miloudi Moukharik, SG de l’UMT, a souligné que la question de la réforme de l’administration et de la fonction publiques revêt une importance cruciale, précisant que les centrales syndicales veulent «une administration moderne offrant de bons services aux citoyens». Mokharik a relevé également que «tout le monde reconnait que l’administration souffre de troubles et, par conséquent, le processus de réforme était une nécessité absolue».
De son côté, Abdelhamid Fatih, SG de la FDT, a tenu à démontrer que l’élément humain doit être au cœur de toute réforme administrative. Il a en particulier insisté sur l’importance d’accorder davantage d’attention à la situation des employés en général, et à celle des salariés des collectivités locales en particulier, notamment à la lumière des propositions des syndicats et dans le cadre de la régionalisation avancée.
Pour rappel, l’origine de l’administration publique ‘‘moderne’’ au Maroc est due à la colonisation, qui a opéré les premières reformes de l’organisation administrative existante, caractérisée de traditionnelle. Cet héritage colonial, censé favoriser l’essor du pays, va au fil du temps être pensé et réfléchi dans ses structures. L’euphorie des premières heures des indépendances allait faire place aux difficultés d’une administration tentaculaire, envahissante, dont les procédures échappent à la plupart des citoyens pour qui et par qui elle existe. Ces difficultés sont en deux grandes catégories : structurelles et culturelles, s’accordent à dire les chercheurs.
Aussi, les nouvelles exigences du monde contemporain et les mutations qu’il connait entraîne avec eux de nouveaux défis auxquels doivent faire face l’administration publique marocaine, dans le processus de globalisation. Dès lors, il est plus qu’évident que «Les règles traditionnelles de gestion administrative, immuables pendant de longues années, sont inadaptées aux nouvelles exigences d’aujourd’hui».
Néanmoins, on continue de constater que nous sommes toujours en face d’une administration fortement centralisée et hiérarchisée, avec des structures administratives nombreuses. A cela s’ajoutent des maux tels que la corruption, le trafic d’influence, le népotisme, la bureaucratie, la concussion ou encore l’abus de pouvoir… qui sont considérés comme des pratiques contraires à l’éthique. Le programme dit “moralisation de la vie publique” n’arrive toujours pas à donner ses fruits escomptés. Malgré la répression des pratiques contraires à l’éthique et précisément celle de la corruption dans l’administration marocaine, force est de constater que ces dernières années, le phénomène a pris une ampleur considérable. Durant la période 1998-2001, ‘‘211 dossiers ont été soumis à la cour spéciale de justice, soit 2 fois plus que les dix années précédentes’’.
La qualité des services rendus aux citoyens est un débat. L’adaptation technologique en est un autre.
H.Z