Un scandale de corruption et des batailles judiciaires jettent une ombre sur la présidence Zelensky
La présidence de Volodymyr Zelensky est confrontée à une nouvelle crise, près de quatre ans après le début de l’invasion russe. Un scandale de corruption impliquant un proche du président et des accusations d’instrumentalisation de la justice pour intimider les détracteurs jettent une ombre sur le leadership ukrainien.
Mercredi, le ministre de la Justice, Guerman Galouchtchenko, a été suspendu pour son rôle présumé dans un détournement de 100 millions de dollars dans le secteur énergétique, orchestré, selon les enquêteurs, par Timour Minditch, un proche du président. Cette affaire survient alors que Volodymyr Zelensky, resté globalement incontesté depuis 2022, voit apparaître des critiques sur sa gestion de la justice et sa tendance à cibler certaines voix critiques.
Dernière affaire en date : l’arrestation, en octobre, de Volodymyr Koudrytsky, ancien dirigeant de la compagnie nationale d’électricité Ukrenergo, accusé de détournement de fonds. M. Koudrytsky et ses soutiens dénoncent des représailles pour avoir critiqué la stratégie de défense du réseau énergétique ukrainien, fragilisé par les frappes russes. « C’est purement politique. Cela n’aurait pas pu se produire sans l’implication de la présidence », affirme-t-il.
L’affaire a suscité des réactions critiques en Ukraine. Roman Waschuk, médiateur des entreprises, juge les preuves « fragiles », tandis que la députée d’opposition Inna Sovsoune dénonce une tentative de réduire les détracteurs au silence. Interrogé sur le sujet, le président Zelensky a renvoyé la responsabilité au système judiciaire, soulignant le rôle de M. Koudrytsky dans la protection des infrastructures énergétiques.
La centralisation croissante du pouvoir en Ukraine, nécessaire en temps de guerre, inquiète cependant les observateurs et la communauté européenne. Bruxelles reconnaît des progrès depuis la révolution proeuropéenne de 2014, mais son dernier rapport déplore que « l’intégrité et les capacités du pouvoir judiciaire et du ministère public restent faibles ».
Depuis cet été, des tentatives de limiter l’indépendance des principales institutions anticorruption, le NABU et le SAP, ont provoqué un tollé et ont été abandonnées face à la pression de la société civile et des alliés occidentaux.
Le cas de M. Koudrytsky s’inscrit dans une série d’affaires touchant des figures politiques et des institutions critiques. L’ancien président Petro Porochenko a été inculpé pour corruption, le maire d’Odessa, Guennadi Troukhanov, déchu de sa nationalité ukrainienne, et plusieurs membres du NABU ont été arrêtés ou perquisitionnés, certains accusés de collusion avec la Russie.
« Certaines personnes ont peur, mais la plupart du personnel du NABU reste motivé », assure Semen Kryvonos, directeur de l’agence. Daria Kaleniouk, directrice du Centre d’action anticorruption, souligne la gravité de la situation : « La question maintenant est de savoir quelle sera la réaction de l’équipe présidentielle. Zelensky décidera-t-il de protéger son entourage et de passer à l’attaque ? »
Cette série de scandales met en lumière les tensions entre la nécessité de centraliser le pouvoir en temps de guerre et les exigences de transparence et de respect de l’État de droit dans une Ukraine aspirant à l’adhésion européenne.
LNT avec AFP
