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Crédits photo : Ahmed Boussarhane/LNT

Le CESE appelle à un Small Business Act pour relancer les micro-entreprises

Le CESE appelle à un Small Business Act pour relancer les micro-entreprises

Par LNT
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Crédits photo : Ahmed Boussarhane/LNT

Le Conseil économique, social et environnemental (CESE) recommande l’adoption d’un Small Business Act et l’accélération d’un dispositif intégré de financement et d’accompagnement en faveur des très petites et petites entreprises (micro/TPE/PE). Ces recommandations, publiées à la suite d’une saisine de la Chambre des conseillers, s’inscrivent dans une étude consacrée aux défis de croissance, de modernisation et de développement que rencontrent ces entreprises au Maroc.

Un maillon essentiel de l’économie nationale confronté à des fragilités structurelles

Selon le CESE, les micro, très petites et petites entreprises constituent un pilier essentiel du tissu entrepreneurial national. Elles représentent plus de 98 % des entreprises formelles dotées de personnalité morale et assurent 56 % des emplois déclarés dans le secteur privé. Leur poids économique réel demeure toutefois limité, en raison d’une faible contribution à la création de richesse et aux dynamiques productives. Le Conseil relève que la transition vers des tailles supérieures reste marginale : entre 2017 et 2022, seules 0,2 % des micro-entreprises ont accédé au statut de TPE ou de petite entreprise. Parallèlement, près de 15.700 défaillances ont été enregistrées en 2024, touchant quasi exclusivement des TPE.

L’étude souligne que malgré les réformes entreprises par les pouvoirs publics, les micro/TPE/PE continuent de faire face à des obstacles structurels qui limitent leur montée en puissance. Les déficits en capital humain, gestion, planification et innovation sont récurrents. Une part importante des porteurs de projets se lance dans l’entrepreneuriat par nécessité plus que par opportunité, ce qui se traduit par une faible utilisation du digital, une dépendance forte aux marchés locaux et des difficultés persistantes d’accès au financement. Les startups, pour leur part, ne trouvent pas toujours des dispositifs adaptés à leurs besoins spécifiques.

L’accompagnement non financier, pourtant indispensable pour la montée en compétences, demeure fragmenté, insuffisamment structuré et peu accessible. À ces fragilités internes s’ajoutent des contraintes externes : un accès limité aux marchés, qu’il s’agisse de la commande publique, de l’exportation ou de l’intégration dans les chaînes de valeur. La concurrence informelle pèse lourdement sur leur compétitivité, tandis que les procédures administratives restent jugées complexes. La confiance vis-à-vis de l’administration fiscale demeure fragile malgré les efforts de simplification. Les délais de paiement constituent également un frein majeur à la trésorerie et à la pérennité des petites unités. Par ailleurs, le cadre juridique actuel apparaît insuffisamment adapté aux spécificités des très petites entreprises et des startups.

Face à ce diagnostic, le CESE appelle à une approche intégrée associant renforcement des capacités internes et amélioration de l’environnement externe. L’objectif est de soutenir la croissance, la modernisation et l’intégration de ces entreprises dans des écosystèmes productifs cohérents avec les stratégies sectorielles et la régionalisation avancée.

Parmi ses recommandations majeures, le Conseil propose de regrouper l’ensemble des dispositifs de soutien des micro/TPE/PE dans un cadre normatif unique via un Small Business Act, et de confier à une instance nationale indépendante le suivi et l’évaluation des politiques publiques dédiées. Le déploiement territorial doit être structuré à partir d’une cartographie nationale des besoins régionaux, afin d’assurer une cohérence des interventions et une meilleure adaptation aux spécificités locales.

Le Conseil recommande également d’élargir l’offre de formation destinée aux porteurs de projets, en impliquant un réseau élargi d’associations et d’acteurs privés, sur la base de cahiers des charges rigoureux. Il préconise d’intégrer le développement de compétences entrepreneuriales et managériales dans les cursus scolaires et professionnels, appuyés par des stages d’immersion en entreprise.

Sur le plan financier, le CESE suggère de renforcer les mécanismes d’accès au financement selon les spécificités de chaque catégorie — micro-entreprises, TPE/PME, startups — notamment en accélérant la mise en œuvre du dispositif prévu par la Charte de l’investissement et en publiant les textes d’application correspondants. La création d’un plan national intégré d’accompagnement non financier, adossé au Small Business Act, constitue un autre axe recommandé, combinant services de proximité, partenariats avec des acteurs qualifiés et dispositifs modulables.

Le CESE encourage, par ailleurs, une meilleure intégration des micro/TPE/PE dans les chaînes de valeur. Il propose la mise en réseau, les alliances stratégiques, ainsi qu’un élargissement de leur accès à la commande publique à travers des quotas différenciés selon la taille et des mécanismes de co-traitance.

L’assainissement de l’environnement des affaires demeure également un chantier essentiel. Le Conseil recommande le renforcement des mesures de lutte contre la corruption, en particulier sur le plan coercitif, ainsi que la poursuite de la lutte contre l’informel et l’accélération de la digitalisation des procédures administratives. Il préconise enfin une évaluation à mi-parcours de la réforme fiscale en cours, afin de mesurer ses effets sur les micro/TPE/PE, ajuster les dispositifs lorsque nécessaire, alléger la charge supportée par les plus petites unités et renforcer la relation de confiance entre ces entreprises et l’administration.

À travers ces orientations, le CESE souligne la nécessité d’un changement de paradigme : passer d’un système dispersé de programmes sectoriels à une politique cohérente, lisible et structurée autour d’un véritable cadre national dédié aux plus petites entreprises, afin d’en faire un levier déterminant de la transformation économique et sociale du Royaume.

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