M. Roberto Cardarelli, chef de la mission du Fonds Monétaire International au Maroc
Le FMI vient d’achever sa mission annuelle de consultations au titre de l’article IV. Son rapport définitif sera publié le mois prochain, mais le Chef de mission du FMI au Maroc, Roberto Cardarelli, a reçu la presse ce mercredi 21 février pour lui en présenter les conclusions préliminaires.
« Nous continuons d’être impressionnés par la résilience de l’économie marocaine. 2023 a été une autre année difficile », a-t-il déclaré d’emblée, évoquant la sécheresse, le séisme, mais aussi la faible croissance dans la zone euro.
Selon l’équipe de M. Cardarelli, en 2023, l’économie marocaine a montré une vigueur renouvelée, tirée par une reprise soutenue de la demande domestique et un élan accru des exportations. Il est attendu que la croissance économique s’élève progressivement pour atteindre environ 3,5 % à moyen terme, propulsée par une augmentation des investissements. « Avec ces plans d’infrastructure liés au secteur de l’eau, au secteur de l’énergie, à l’infrastructure liée à la Coupe du monde 2030 de football et à la poursuite de la mise en œuvre des réformes structurelles, ce qui devrait être positif tant pour l’investissement que pour la consommation », a précisé le Chef de mission du FMI. Parallèlement, la reprise de la demande intérieure devrait graduellement élargir le déficit du compte courant de la balance des paiements, qui est projeté se rapprocher de 3 % du PIB. Dans le même temps, l’inflation devrait poursuivre sa trajectoire descendante à mesure que les pressions sur les prix des matières premières et alimentaires s’atténueront : « Nous nous attendons à ce que l’inflation continue de ralentir et revienne à 2% au cours des prochaines années ».
La politique monétaire actuelle, jugée appropriée dans le contexte d’une inflation en baisse, devrait évoluer en s’appuyant sur les données économiques, explique le FMI qui, avec la poursuite de la diminution de l’inflation, encourage Bank Al-Maghrib à reprendre sa transition vers un régime de ciblage de l’inflation.
Les équipes du FMI « applaudissent » la résolution des autorités marocaines à atteindre un rééquilibrage budgétaire à moyen terme. L’extension de la protection sociale, notamment par le déploiement du Registre social unifié, devrait permettre une allocation plus ciblée de l’aide sociale aux ménages en réel besoin. La réforme de la TVA, visant à accroître la neutralité fiscale et favoriser la transition vers l’économie formelle, devrait également contribuer à élargir l’assiette fiscale. Bien que la réduction progressive du déficit budgétaire sur les trois prochaines années paraisse adéquate, une accélération du rééquilibrage des finances publiques à moyen terme est « envisageable », selon le FMI : « Nous pensons que ce rythme de consolidation fiscale est approprié. Il est graduel, mais est approprié compte tenu des besoins de dépenses, associés à la mise en œuvre de la réforme structurelle ». Et de préciser que cela nécessitera la continuation de la réforme fiscale, en particulier la finalisation de la réforme de la TVA et le renforcement de l’administration fiscale, une rationalisation des dépenses, y compris les transferts aux entreprises publiques, et une utilisation élargie du Registre Social Unifié pour tous les programmes sociaux.
Pour maximiser la contribution du secteur privé dans les projets d’investissement en infrastructures initiés par les autorités, notamment dans les domaines de l’eau et de l’énergie, il est crucial, selon l’équipe de M. Cardarelli, d’évaluer et de communiquer sur les incidences potentielles des futurs partenariats public-privé sur le budget de l’État. D’autres améliorations du cadre budgétaire sont prévues, incluant des informations supplémentaires sur les recettes anticipées issues de la gestion active du patrimoine de l’État et l’évaluation de l’impact des nouvelles mesures sur les années futures.
Par ailleurs, la mission du FMI juge qu’accélérer les réformes structurelles est essentiel pour stimuler la création d’emplois et rendre la croissance plus inclusive. La réforme des entreprises publiques, la mise en œuvre du Fonds Mohammed VI et l’application de la nouvelle Charte de l’investissement devraient favoriser l’investissement privé. Les initiatives visant à combattre la corruption et les pratiques anticoncurrentielles sont également cruciales. La réforme du régime d’assurance chômage et l’amélioration des politiques actives du marché du travail pourraient soutenir la création d’emplois à court terme. Des efforts supplémentaires sont nécessaires pour améliorer l’intégration des femmes dans le marché du travail. Les réformes ambitieuses dans les secteurs de la santé et de l’éducation sont prometteuses pour améliorer l’accès et la qualité des services, ainsi que pour renforcer l’accumulation de capital humain à long terme. Les progrès dans la libéralisation du marché de l’électricité et la transition vers les énergies renouvelables sont à saluer. Le plan des autorités pour développer les infrastructures hydriques, ajuster les coûts de l’eau et promouvoir une utilisation plus efficace de l’eau est primordial.
Enfin, pour ce qui est de la ligne modulable, M. Cardarelli a précisé que sa reconduction ou non sera discutée par le Conseil du FMI en avril 2025.
Selim Benabdelkhalek