La Cour Internationale de Justice (CIJ) a rendu une décision inédite et historique dans le cadre de la plainte déposée par l’Afrique du Sud contre Israël et les conditions de la guerre menée à Gaza. Inédite parce qu’habituellement, cette cour qui est la juridiction la plus haute de l’ONU et la clé de voûte du multilatéralisme avec le Conseil de Sécurité, a été saisie pendant un conflit actif et a rendu une décision qui se veut contraignante pour Israël dans un délai d’un mois.
Ce n’est pas un cas courant que de voir un membre de l’alliance occidentale condamné par la CIJ, ce sont en général des nations, États et dirigeants autocratiques, responsables d’actes de guerre graves qui sont sur le banc des accusés. Cet arrêt de la Cour a pour mérite avant tout de reconnaître la légitimité de la plainte déposée au nom des Palestiniens et crée un précédent juridique qui admet une nouvelle fois avec force l’existence légale de la cause palestinienne dans le droit international. Les répercussions de cette décision sont aussi géopolitiques à souhait.
D’abord parce que le Sud, emmené par l’Afrique du Sud, a remporté une première bataille légale face au Nord. Ensuite parce que les alliés d’Israël vont devoir faire face à l’impact sur leurs opinions publiques de cette décision mais aussi sur leurs relations avec les autres puissances du reste du monde qui ne manqueront pas d’exploiter la fissure qui vient de s’ouvrir. Autre conséquence notable de cette décision de la CIJ, les autorités et le gouvernement israéliens sont sous pression et il n’est pas certain que les récentes révélations sur l’implication d’employés d’une agence de l’ONU dans les attaques du 7 octobre, suffisent à plus qu’à reprendre la main sur le narratif auprès des opinions publiques car l’indépendance et la crédibilité de la CIJ ne pourront pas être facilement remis en cause.
Ce qui a fondamentalement changé avec cette guerre, notamment à travers un afflux d’images et de contenus inédit sur les réseaux sociaux mondiaux, c’est la fin d’un certain clivage qui opposait principalement Israël a la coalition des intérêts des pays qui l’entourent, plus ou moins. Aujourd’hui, la cause palestinienne est devenue emblématique de la nécessité de définir de nouveaux rapports entre les États et les peuples au niveau mondial qui tiennent compte d’un équilibre entre le Nord et le Sud.
Dans ce contexte, le Maroc a réagi à la décision de la CIJ en soulignant justement son attachement « au droit légitime du peuple palestinien à l’établissement de son État indépendant avec Al-Qods-Est comme capitale, dans le cadre de la solution à deux États convenue au niveau international ». Sans détour, le Royaume salue les mesures provisoires imposées à Israël et réaffirme son soutien à « la justesse de la Cause palestinienne ».
Et c’est exactement ce qui parait être aujourd’hui une réalité qui doit s’imposer, au-delà des émotions, des sentiments, des opinions, des avis éclairés et experts, de la propagande, des révélations et des coups portés à l’adversaire, les Palestiniens existent et il leur manque un État.
Zouhair Yata