Le Conseil d’administration du FMI, organe exécutif du FMI se réunit à la fin des missions dans un pays pour examiner les rapports des économistes et établir des conclusions et des recommandations à l’endroit du pays concerné.
Par Afifa Dassouli
En 2023, le Fonds Monétaire International (FMI) a mené ses missions annuelles au Maroc, conclues en janvier 2023 pour l’année 2022. Le Conseil d’administration du FMI a ensuite énoncé ses conclusions au titre de l’article IV, qui ont sanctionné positivement les réalisations marocaines, comme exprimé par ses administrateurs ci-dessous :
« Les Administrateurs félicitent les autorités marocaines pour les mesures très énergiques qu’elles ont prises afin d’atténuer l’impact social et économique des chocs négatifs récents. Ils saluent le resserrement de la politique monétaire en 2022 et encouragent la banque centrale à poursuivre la transition vers un cadre de ciblage de l’inflation avec la baisse de l’inflation et la fin de l’incertitude actuelle ».
De même, les administrateurs du FMI dans leurs conclusions soutiennent le budget 2023, qui établit un équilibre entre la nécessité de réduire le déficit, d’atténuer l’impact social et économique des chocs et de financer les réformes structurelles. Ils considèrent que de nouvelles mesures fiscales et de dépenses seront nécessaires pour accélérer la réduction de la dette publique et reconstituer les amortisseurs budgétaires. Ils ont également salué la publication du plan budgétaire triennal, renforçant le cadre budgétaire institutionnel déjà solide du Maroc.
À l’avenir, l’introduction d’une règle budgétaire fondée sur un ancrage de la dette renforcerait la crédibilité et la transparence de la politique budgétaire du Maroc. Les progrès accomplis par le Maroc dans l’amélioration de son cadre réglementaire et de surveillance financière ont également été approuvés. Si les risques systémiques pour le système financier semblent limités, les administrateurs soulignent l’importance de surveiller l’exposition du bilan des institutions financières, notamment aux risques liés au climat.
La volonté des autorités marocaines de mettre en œuvre des réformes structurelles globales a été très positivement approuvée. Notamment, la réforme des systèmes de protection sociale, de santé et d’éducation devrait améliorer l’équité et la qualité de l’accès, mieux cibler les dépenses et soutenir le capital humain à long terme. De plus, les réformes des entreprises publiques et d’autres initiatives visant à stimuler l’investissement privé favoriseraient la croissance du secteur privé.
Sur un autre plan, les administrateurs du FMI ont exprimé leur satisfaction quant à la poursuite des efforts du pays pour réduire sa dépendance à l’égard des combustibles fossiles, remédier à la pénurie d’eau et réduire les inégalités entre les hommes et les femmes, renforçant ainsi le potentiel de croissance du Maroc.
En avril 2023, l’octroi par le FMI de la Ligne de Crédit Modulable (LCM) au Maroc a également établi un bilan positif pour le pays. Le conseil du FMI a porté des appréciations positives après l’évaluation de la qualification du Maroc à cet instrument de financement, en voici les principales conclusions :
- Une position extérieure soutenable : L’évaluation du solde extérieur 2022 conclut que la position extérieure du Maroc est globalement conforme à ce qu’impliquaient les fondamentaux et les politiques souhaitables. La dette extérieure reste relativement faible, principalement à long terme, et devrait se stabiliser à environ 43 % du PIB.
- Une position du compte de capital dominée par les flux privés : Les flux de capitaux privés constituent la plus grande part du compte de capital du Maroc, représentant en moyenne environ 52 % des flux totaux entre 2019 et 2022. Les Investissements Directs Étrangers (IDE) sont l’une des composantes les plus importantes de ces flux et devraient augmenter à moyen terme alors que le Maroc poursuit la mise en œuvre de ses réformes favorables à la croissance du secteur privé.
- Des antécédents d’accès souverain stable aux marchés de capitaux internationaux à des conditions favorables : Le secteur public marocain (administration centrale et entreprises publiques) a exploité les marchés internationaux au cours de quatre des cinq dernières années (2019-2023), à des conditions favorables et pour un montant cumulé de 9 milliards de dollars. Le 1er mars 2023, le Maroc a émis deux obligations libellées en USD, à échéance de 5 et 10 ans, chacune pour 1,25 milliard de dollars US, avec des spreads favorables reflétant la forte demande des investisseurs internationaux.
- Une position de réserve relativement confortable : Le Maroc a considérablement renforcé sa position de réserves officielles depuis la pandémie, accumulant environ 6,5 milliards de dollars de réserves depuis fin 2019. À la fin de 2022, la position de réserves équivalait à environ 25 % du PIB et à environ 5,5 mois d’importations.
- Des finances publiques saines, avec une position soutenable de la dette publique. La dette publique du Maroc est jugée soutenable avec une forte probabilité. Comme pour de nombreux autres pays dans le monde, la situation budgétaire du Maroc s’est détériorée après la récession pandémique. Néanmoins, l’assainissement budgétaire a repris en 2021 et s’est poursuivi l’an dernier malgré les retombées économiques importantes de la guerre en Ukraine, la sécheresse et le financement des réformes des soins de santé et de l’éducation. Plusieurs facteurs clés aident le Maroc à maintenir sa dette à un niveau soutenable , notamment , la part relativement faible de la dette libellée en devises étrangères (environ un quart), la large base d’investisseurs institutionnels nationaux (l’épargne nationale du Maroc a représenté en moyenne environ 27½ % du PIB au cours des 5 dernières années, contre 19½
en moyenne pour les autres pays accédant à la LCM, et plus des trois quarts de la dette marocaine est détenue par des banques nationales, des fonds communs de placement, des compagnies d’assurance-vie et des fonds de pension) et enfin, la maturité moyenne relativement longue de la dette (environ 6,5 ans). - Une inflation faible et stable dans le contexte d’un cadre de politique monétaire et de taux de change sain : Le Maroc a maintenu une inflation faible et stable au cours des 15 dernières années, avec une inflation annuelle moyenne d’environ 1,5 %. Suite à la hausse des prix mondiaux des matières premières, l’inflation annuelle moyenne au Maroc a augmenté en 2022 pour atteindre environ 6½ %, mais reste inférieure aux moyennes régionales et des marchés émergents.
- Un système financier sain basé sur l’absence de problèmes de solvabilité : Les banques ont un capital supérieur aux
exigences minimales et un financement stable (principalement des dépôts à vue, à 105,5 % des prêts en 2022). Le
ratio moyen d’adéquation des fonds propres est supérieur aux seuils réglementaires (avec un ratio de fonds propres de catégorie 1 de 11,8 % à la mi-2022, globalement conforme à la moyenne des trois dernières années). La banque centrale réalise et publie régulièrement des tests de résistance, qui montrent que le système bancaire peut résister à des chocs sévères. Le dernier test de résistance de BAM, publié en juillet 2022, montre que la solvabilité des banques résiste à un scénario macroéconomique défavorable sévère. Les risques systémiques pour le système financier semblent limités, et même si l’expansion des banques marocaines en Afrique les expose à l’évolution des conditions économiques dans cette région, elle a jusqu’à présent représenté davantage une opportunité de diversification et de génération de profits. - Une supervision efficace du secteur financier : La Banque Al-Maghrib (BAM) a progressé dans la mise en œuvre des exigences de Bâle III, notamment en adoptant de nouvelles réglementations et en renforçant ses outils de surveillance. La surveillance des banques marocaines en expansion en Afrique s’est intensifiée, en étroite collaboration avec les agences de surveillance des pays hôtes. Le Maroc est sorti de la liste grise du GAFI au 24 février 2023 après avoir achevé son plan d’action avec le GAFI pour remédier aux faiblesses identifiées dans le cadre de lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme.
- Une transparence et intégrité des données : Dans l’ensemble, les données continuent d’être adéquates pour effectuer une surveillance et un suivi du programme efficaces. Le FMI vient de réaliser un dernier rapport de mi-parcours qui ne contredit aucune de ces appréciations et conclusions favorables sur la situation économique du Maroc.