Ibtihal OULAD-GOUMI est journaliste, chercheuse en communication internationale et médias. Elle explique qu' »à travers mes rédactions, j’analyse l’actualité, en essayant d’ajouter mon grain de sable au grand paysage médiatique ».
Des jeunes passionnés par le challenge et rêvant de réussite, prennent le risque de se lancer dans une première expérience en vue de contribuer à la croissance économique du pays. Il s’agit donc pour ces personnes d’investir leur savoir-faire pour développer leur business dans un contexte socio-économique où le gouvernement a décidé par divers programmes, d’appuyer l’entreprenariat des jeunes.
Même si la volonté est claire, les conséquences sont souvent fâcheuses pour certains, qui n’ont malheureusement pas pu dépasser le stade embryonnaire de leur projet.
Avec l’aggravation du taux de chômage, renforcé par la pandémie du Covid-19, certains jeunes ont trouvé en le secteur de l’entreprenariat une bouée de sauvetage pouvant les sortir de la précarité, mais surtout de réaliser leurs rêves, en créant des projets.
Dans ce contexte de relance économique, le gouvernement a mis l’accent sur les jeunes, à qui il a accordé un intérêt particulier, surtout aux porteurs de projets en leur fournissant le soutien nécessaire et ce à travers des initiatives comme Moukawalati, Intelaqa et Forsa. L’objectif premier étant d’inciter et encourager les jeunes à accéder au milieu de l’entrepreneuriat.
À travers les programmes mis en place, le gouvernement a pour but d’accélérer la politique destinée aux PME et permettre aux jeunes porteurs de projets de dépasser les obstacles qui entravent le développement des TPE, en l’occurrence les problématiques liées aux financements.
Malgré les contraintes financières ou de compétence, notamment dans la gestion des projets, des jeunes choisissent l’entrepreneuriat comme vocation. Selon Nour-eddine Lemrabet, jeune entrepreneur, opérant dans le secteur du Marketing Digital, il a décidé de se lancer dans l’aventure entrepreneuriale en 2018, en commençant par l’élaboration de vidéos publicitaires. Le jeune marocain a intégré le champ du marketing petit à petit, jusqu’à ce qu’il crée sa SARL, spécialisée dans le Marketing digital.
Concernant les programmes dédiés aux entrepreneurs, il n’en a pas été bénéficiaire, mais reste optimiste sur le fait que ces derniers « permettront la consolidation de l’esprit entrepreneurial chez les jeunes ».
Sur l’importance du financement, Nour-Eddine estime que c’est un volet essentiel et son absence constitue un frein au projet. Mais, il avertit que « son importance ne représente que 5% dans le travail d’un entrepreneur, car la motivation, la persévérance et les capacités managériales sont déterminants et représentent 95% de la réussite des projets d’entreprenariat. »
Concernant le choix de son projet, il déclare que cela découle de sa passion, avant de s’être lancé dans une étude de marché. L’autre facteur déterminant sur son projet est l’effet de l’activité, qui connaît un fort engouement, notamment à travers les politiques du gouvernement qui s’inscrivent largement dans la digitalisation, d’où le concept de « Digitale nation », lancé récemment au Maroc.
Le Maroc renforce sa présence dans le secteur entrepreneurial
Au Maroc, l’entreprenariat s’accélère de plus en plus. Pour sa réussite, le gouvernement a mobilisé les moyens pour encourager les jeunes dans cette dynamique. C’est dans ce contexte que le Royaume a présenté des programmes offrant des crédits aux jeunes porteurs de projets. L’idée est de faire face aux problèmes financiers qui freinent le lancement de certains business.
Durant ces dernières années, trois programmes ont suscité l’intérêt de plusieurs jeunes porteurs de projets, à savoir Moukawalati, Intelaka et Forsa. Le Programme national de soutien à la création d’entreprises « Moukawalati », a été lancé par le gouvernement en vue d’encourager la création d’entreprises par le biais du guichet unique. Ce programme a pour objectif de fournir un soutien aux entrepreneurs au Maroc.
L’octroi de l’aide fournie par le programme Moukawalati, consiste à faire une étude de marché, qui repose sur l’établissement d’une configuration visant à fournir un ensemble d’outils pratiques, pour exécuter des études techniques sur le terrain afin de rassembler les données nécessaires pour ledit projet, et partant, envoyer les informations obtenues aux établissements responsables.
Le programme Intelaqa a été présenté à Sa Majesté le Roi Mohamed VI le 27 janvier 2020. Il est le fruit d’une coopération entre le Gouvernement, Bank Al-Maghrib et le secteur bancaire, et vise le renforcement des TPE (très petites entreprises) et des PME (petites et moyennes entreprises). Depuis 2020, le programme a suscité un intérêt certain auprès des jeunes porteurs de projets.
Le programme Intelaka, jusqu’en 2021, a octroyé plus de 22.875 crédits. Au cours de la même année, les engagements ont enregistré une hausse de 22% par rapport à 2020, soit un montant total de 3,8 milliards de dirhams. D’après les données fournies par le programme Intelaka, au cours de l’année 2021, la région de Casablanca-Settat a présenté le plus de dossiers, soit 224 dossiers dispatchés entre le domaine du commerce et de la distribution avec un pourcentage de 26,6%, suivi du secteur des services avec 16,2%, et 6% pour l’agriculture.
Le troisième programme est Forsa. Ce dernier vise la création de 10.000 projets avant la fin de 2022, avec un portefeuille annuel de 1,25 milliard de dirhams, sachant que les budgets de financement peuvent aller jusqu’à 100.000 dirhams, avec une subvention de 10.000 dirhams. Il faut également savoir que les porteurs de projets ont la possibilité de rembourser les prêts de ce programme sur une durée maximale de 10 ans, avec un différé de 2 ans. Il est à signaler que Forsa offre aussi une formation d’E-learning pour les bénéficiaires des programmes de financement.
Impact des programmes de financement sur le positionnement du Maroc en entrepreneuriat à l’échelle mondiale
Le classement du Maroc pour ce qui est du secteur entrepreneurial a évolué d’une manière remarquable selon plusieurs études, notamment le rapport Doing Business 2019, publié par le Groupe de la Banque mondiale le 31 octobre 2018, et qui affirmait que le Royaume se positionne à la 34e position à l’échelle mondiale parmi 190 pays, selon l’indice Starting a Business.
D’après un rapport de Global Entrepreneurship Monitor (GEM), le Maroc est classé septième dans l’indice de « confiance dans la capacité à faire face aux défis causés par COVID-19 ». Nous avons posé cette question de l’impact de la situation épidémique sur le secteur entrepreneurial, et le jeune entrepreneur a affirmé que la période n’a pas été facile, et plutôt délicate. L’activité pour lui a été stoppée durant 3 mois, mais durant cette même période, il a pu collaborer avec des clients à l’étranger, ce qui confirme sa réussite même en période de crise. Il a aussi ajouté que la situation épidémique « n’a pas été une phase de repos mais c’était au contraire une période avec plus de travail acharné, et c’est là que se détecte l’esprit entrepreneurial. »
La crise pandémique était donc comme une sorte de test pour plusieurs entrepreneurs, et c’est la raison pour laquelle ces programmes de financement doivent comporter des formations dans la gestion de crises, pour pouvoir dépasser les échecs qui peuvent se présenter. Et c’est dans ce sens qu’il faut revenir à la notion de suivi et de formation. Les programmes donnés par l’État permettent sans doute un encouragement et appui aux jeunes porteurs de projets, mais il est nécessaire d’accorder un suivi aux bénéficiaires de ces programmes, pour les encadrer non seulement financièrement mais aussi juridiquement, pour qu’ils ne s’engagent pas à l’aveugle.
Le Global Entrepreneurship Monitor a démontré que le Maroc a réalisé une amélioration sur 8 axes parmi les 13 inclus dans la structure de l’indice, en l’occurrence ceux qui concernent le financement de l’entrepreneuriat, les politiques et programmes gouvernementaux de soutien et beaucoup d’autres actions comme Moukawalati, Intelaqa et Forsa.
Néanmoins, il est nécessaire de rappeler qu’en plus de ces programmes, l’intégration d’une culture entrepreneuriale dans l’éducation, l’infrastructure des entreprises et l’amélioration du niveau de compétences professionnelles sont recommandées.
Comme l’a affirmé Nour-Eddine Lemrabet, après le lancement du projet, il faut aussi cibler le marché international. Ainsi, il affirme que les jeunes actuellement n’ont plus d’excuse pour ne pas se lancer dans le domaine de l’entreprenariat, la balle est dans leur camp maintenant. L’obtention de bons résultats entrepreneuriaux avec un rendement positif encouragerait l’État à lancer davantage de programmes similaires.
Ibtihal OULAD-GOUMI