Un véhicule de la Force de maintien de la paix des Nations Unies (FINUL) roule sur la route côtière de Naqura, la ville libanaise la plus méridionale près de la frontière avec Israël, le 3 octobre 2022
Après d’intenses négociations sous l’égide des Etats-Unis, Israël a annoncé mardi avoir conclu un accord « historique » avec le Liban pour délimiter leur frontière maritime et lever des obstacles clés à l’exploitation de gisements gaziers en Méditerranée orientale.
Les Etats-Unis mènent depuis deux ans une médiation entre les deux voisins, officiellement en état de guerre, pour parvenir à cet accord.
Les deux pays avaient signifié début octobre leur satisfaction à un projet d’accord du médiateur américain Amos Hochstein. Mais jeudi dernier, Israël avait affirmé son refus à une série d’amendements libanais au projet d’accord ce qui avait douché les espoirs.
Ces derniers jours, les négociations en coulisses se sont poursuivies et Israël a indiqué mardi avoir reçu une réponse favorable à ses préoccupations sur les demandes d’amendements libanais.
Le Premier ministre israélien Yaïr Lapid a annoncé mardi dans un communiqué un accord « historique » sur ce dossier.
Il « va renforcer la sécurité d’Israël, injecter des milliards (d’euros) dans l’économie israélienne et assurer la stabilité de notre frontière nord (avec le Liban) », a-t-il ajouté, précisant qu’une réunion de son cabinet de sécurité était prévue mercredi sur cet « accord conclu » à l’issue d’une médiation américaine.
« Toutes nos demandes ont été acceptées », avait déclaré plus tôt Eyal Hulata, conseiller à la sécurité nationale du Premier ministre.
A Beyrouth, la présidence libanaise a indiqué que la version finale de la proposition était « satisfaisante » pour le Liban. « Elle répond aux demandes du Liban et préserve son droit à ses richesses naturelles », a-t-elle ajouté, espérant que l’accord serait « annoncé au plus tôt ».
Cette annonce survient à 20 jours de la fin du mandat du président Michel Aoun, qui expire le 31 octobre.
En Israël, des législatives doivent se tenir le 1er novembre, les cinquièmes en trois ans et demi, qui pourraient consacrer le retour au pouvoir de Benjamin Netanyahu avec ses alliés des partis ultra-orthodoxes et de l’extrême droite.
La semaine dernière, cet ancien Premier ministre avait fustigé ce projet, accusant M. Lapid de « donner » au Liban un « territoire souverain d’Israël », de « capituler » face au Hezbollah libanais et menaçant de ne pas respecter l’accord en cas de retour aux affaires.
« Le Hezbollah, qui fait partie du Parlement libanais, est conscient de la situation économique catastrophique du Liban et il a un intérêt à ce que le Liban puisse exploiter du gaz », a commenté mardi le ministre israélien de la Sécurité publique Omer Bar Lev.
Mardi, des responsables israéliens ont indiqué que l’accord allait être présenté au Parlement, sans fournir de date précise.
– « Compensations » –
Selon des informations de presse et des responsables, le texte prévoit que le gisement offshore de Karish soit sous contrôle d’Israël et que les réserves de Cana, situées plus au nord-est, soient octroyées au Liban.
Mais comme une partie de ce gisement dépasse la future ligne de démarcation, l’Etat hébreu toucherait une part des futurs revenus de l’exploitation gazière de Cana, d’après ces sources.
Dans un contexte où l’Union européenne cherche à diversifier ses approvisionnements en gaz en raison de l’invasion russe de l’Ukraine, Israël mise sur le gisement de Karish, prêt à entrer en production, pour doper ses livraisons de gaz vers le Vieux continent.
Or dimanche, la société Energean, mandatée pour exploiter ce gisement, a annoncé le début de tests pour raccorder au territoire israélien sa plateforme gazière offshore, étape clé pour le début de la production.
En juillet, le Premier ministre israélien Yaïr Lapid avait évoqué ce dossier avec le président français Emmanuel Macron, espérant voir Paris user de son influence pour faciliter un accord avec Beyrouth, d’autant que le français Total est pressenti pour explorer le gisement de Cana.
Mais contrairement à Karish, ce gisement est encore loin de pouvoir être activé et doit faire l’objet de plus de prospection pour en déterminer les ressources gazières récupérables.
L’un des principaux négociateurs libanais dans ce dossier, Elias Bou Saab, a assuré mardi qu’il y avait eu « un accord entre Total et les Israéliens » en vertu duquel ces derniers pourraient « recevoir des compensations » du géant énergétique et non du Liban.
Dans ce cadre, le directeur Moyen-Orient et Afrique du Nord de la branche Exploration-Production de TotalEnergies, Laurent Vivier, est arrivé mardi au Liban, d’après l’agence officielle libanaise ANI.
LNT avec Afp