Selon la dernière note du HCP concernant le marché de l’emploi, dans un contexte marqué par la sécheresse et la crise sanitaire COVID-19, l’évolution des indicateurs du marché de travail a été négativement impactée, notamment, avec l’exacerbation de la baisse structurelle du taux d’activité, la chute du taux d’emploi et le renversement de la tendance baissière du taux de chômage et cela particulièrement parmi les jeunes, les femmes et les diplômés.
Selon l’enquête nationale sur l’emploi, au troisième trimestre de 2020, la population en âge d’activité (15 ans ou plus) a atteint, 26.797.000 personnes, 11.648.000 sont des actifs (10.166.000 pourvues d’un emploi et 1.482.000 en situation de chômage) et 15.150.000 sont en dehors du marché de travail.
Baisse structurelle du taux d’activité
La situation du marché du travail a continué à être marquée par la baisse structurelle des taux d’activité. Au troisième trimestre de 2020, le taux d’activité a atteint 43,5% ; 41,0% en milieu urbain et 48% en milieu rural ; 69,9% parmi les hommes et 17,8% parmi les femmes.
Ce taux passe de 22,3% parmi les jeunes âgés de 15 à 24 ans à 57,3% parmi les 25 à 34 ans et 59,1% parmi les 35 à 44 ans pour baisser à 40,3% parmi les âgés de 45 ans ou plus.
Baisse du taux d’emploi
Au troisième trimestre de 2020, le taux d’emploi a chuté à 37,9% marquant une baisse de 2,8 points par rapport au même trimestre de 2019.
Le taux d’emploi a diminué parmi toutes les catégories, plus particulièrement parmi celles des jeunes et des femmes. Il a baissé de 2,1 points en milieu urbain (de 36,4% à 34,3%) et de 3,7 points en milieu rural (de 48,5 à 44,8%).
La baisse du taux d’emploi a été plus accentuée pour les femmes (–3 points) que pour les hommes (–2,6 points). L’écart entre hommes et femmes a atteint 47,2 points, avec des taux d’emploi respectifs de 61,9% et de 14,7% au troisième trimestre 2020.
Quant au taux d’emploi par âge, il a diminué de 3 points pour les 15-24 ans (de 18,1% à 15,1%), de 4 points pour les 25-34 ans (de 50,2% à 46,2%) et d’1,8 point pour les 45 ans ou plus (de 40,3% à 38,5%).
Hausse record du taux de chômage
Après une tendance à la baisse durant les trois dernières années, le taux de chômage a grimpé de 3,3 points, entre les troisièmes trimestres de 2019 et de 2020, passant de 9,4% à 12,7%.
Le taux de chômage a enregistré une forte hausse aussi bien en milieu rural qu’en milieu urbain, passant respectivement de 4,5% à 6,8% et de 12,7% à 16,5%. Il a également enregistré une forte hausse parmi les femmes, de 13,9% à 17,6% et parmi les hommes, de 8,0% à 11,4%. Il a connu une forte augmentation parmi les jeunes âgés de 15 à 24 ans (5,7 points), passant de 26,7% à 32,3%.
Le taux de chômage des diplômés a enregistré une hausse de 3,2 points, passant de 15,5% à 18,7%. Cette hausse est plus prononcée parmi les détenteurs diplômes en qualification et spécialisation professionnelle (+ 4,9 points avec un taux de 24,8%), de diplômes de techniciens et de cadres moyens (+4,0 points avec un taux de 23,6%) et diplômes de l’enseignement secondaire (+4,0 points avec un taux de 18,3%).
Perte d’emploi au troisième trimestre 2020
Entre les troisièmes trimestres des trois dernières années, l’économie marocaine a créé en moyenne 144.000 postes d’emplois. Cependant, au troisième trimestre 2020, l’économie a perdu 581.000 postes d’emploi par rapport à celui de 2019, ce qui correspond à une baisse de 5,4% (237.000 postes en milieu urbain et 344.000 en milieu rural).
Selon les secteurs, celui des « services » a perdu 260.000 postes d’emploi au niveau national (196.000 en milieu urbain et 64.000 en milieu rural), enregistrant une baisse de 5,2% de l’emploi dans ce secteur ;
Le secteur de l’ »agriculture forêt et pêche » a perdu 258.000 postes d’emploi (baisse de 7,9%), résultat d’une perte de 260.000 en milieu rural et d’une création de 2.000 en milieu urbain ;
Le secteur de l’ »industrie y compris l’artisanat » a perdu 61.000 postes, 44.000 en milieu urbain et 17.000 en milieu rural, ce qui correspond à une baisse de 4,8% du volume de l’emploi dans ce secteur ;
Le secteur des BTP a créé 1.000 postes d’emploi, résultat d’une création de 2.000 postes en milieu urbain et d’une perte de 1.000 en milieu rural, enregistrant une stagnation du volume d’emploi dans ce secteur.
Selon le statut professionnel, la baisse de l‘emploi, entre les deux trimestres, a touché toutes les catégories : l’emploi salarial a baissé de 157.000 (ou -3%), les auto-employés de 264.000 (ou -7%) et l’emploi non-rémunéré de 160.000 (ou -10,3%).
Baisse du volume horaire de travail et de la durée hebdomadaire moyenne
Le nombre total d’heures travaillées par semaine a baissé de 479 millions heures au troisième trimestre de 2019 à 409 millions heures au troisième trimestre de 2020, ce qui correspond à une baisse de 14,6% des heures de travail. Cette baisse correspond à 1,46 millions emplois à temps plein.
Le volume d’heures travaillées par semaine est passé de 293 millions à 254 millions heures en milieu urbain (-13,3%) et de 186 millions à 155 millions heures en milieu rural (-16,6%). La baisse relative des heures travaillées par semaine a été plus élevée parmi les femmes (-25,1%, de 80 millions à 60 millions heures) que parmi les hommes (-12,5%, de 399 millions à 349 millions heures).
Cette baisse a touché également tous les secteurs, 36 millions heures dans les services (-15%), 17 millions dans l’agriculture, forêt et pêche (-13,2%), 9 millions dans l’industrie y compris l’artisanat (-14,6%), et 8 millions dans les BTP (-15,9%).
Le nombre d’heures travaillées par semaine a diminué pour tous les groupes d’âge durant la période, mais la baisse relative la plus forte a été observée parmi les jeunes 15 à 24 ans (-27%). Cette baisse est de l’ordre de 16,8% pour les 25-34 ans, 13,9% pour les 35-44 ans et de 10,1% pour les 45 ans ou plus.
De son côté, le nombre moyen d’heures travaillées par semaine est passé de 45 à 40 heures, ce qui représente une baisse de 10%. Il a nettement reculé dans les BTP, en passant de 46 à 39 heures, dans l’industrie (y compris l’artisanat) de 48 à 43 heures et dans les services, de 48 à 43 heures.
Principales caractéristiques de la population en emploi au troisième trimestre de 2020
Au troisième trimestre de 2020, sur les 10.166.000 actifs occupés, 41,2% sont des ruraux et 19,7% sont de sexe féminin (22,1% une année auparavant). Les jeunes âgés de 15 à 34 ans constituent 34,8% du volume total de l’emploi ; 8,7% pour les 15-24 ans et 26,1% pour les 25-34 ans.
Selon le diplôme, un peu plus de la moitié (53,8%) des actifs occupés n’ont aucun diplôme, 31,2% ont un diplôme moyen et 14,9% un diplôme supérieur. Parmi les actifs occupés exerçant dans le secteur de l’ »agriculture, forêt et pêche », 80,6% n’ont aucun diplôme. Cette proportion atteint 58,7% dans le secteur des BTP, 42,7% dans l’industrie (y compris l’artisanat) et 38,3% dans les services.
La répartition des actifs occupés selon le secteur d’activité montre que le secteur des services emploie 4.736.000 personnes (46,6%), suivi de l’ »agriculture, forêt et pêche » avec 3.054.000 personnes ou 30%, de l’industrie y compris l’artisanat (1.201.000 personnes ou 11,8%) et enfin des BTP (1.169.000 personnes ou 11,5%). Parmi les 4.736.000 personnes exerçant dans le secteur des services, 33,6% relèvent de la branche du commerce, 11,7% des services sociaux fournis à la collectivité et 11,7% du transport, entrepôts et communications.
Selon le milieu, près des deux-tiers (65,8%) des actifs occupés citadins exercent dans le secteur des services et 17,0% dans l’industrie y compris l’artisanat. En milieu rural, 66,0% des actifs occupés exercent dans le secteur de l’agriculture, forêt et pêche et 19,2% dans celui des services.
Les professions les plus exercées sont les ²artisans et ouvriers qualifiés des métiers artisanaux² (19,4%), les « ouvriers et manœuvres de l’agriculture et de la pêche » avec 18% de l’ensemble des actifs occupés et les « manœuvres non agricoles, manutentionnaires et travailleurs des petits métiers » (16,4%).
L’emploi salarial touche un peu plus de la moitié (51,9%) des actifs occupés (contre 50,5% une année auparavant). Les indépendants, quant à eux, représentent 30,3% des actifs occupés (contre 30,6% une année auparavant) ; 33,9% parmi les hommes et 15,7% parmi les femmes. Les aides familiaux représentent 13,2% (contre 14%) et le statut d’employeur ne représente que 1,9% (contre 2,5% une année auparavant).
Un marché de travail toujours caractérisé par la faible protection
Au terme du troisième trimestre de 2020, seul un quart des actifs occupés (25,6%) bénéficient d’une couverture médicale liée à l’emploi (36,9% dans les villes et 9,5% à la campagne). Ces parts ont été respectivement de 24,5%, 36,4 et de 8,3% au même trimestre de 2019.
La part des actifs occupés affiliés à un régime de couverture médicale s’améliore avec le niveau de diplôme. Elle passe de 12,1% parmi les personnes n’ayant aucun diplôme à 74,2% parmi les détenteurs d’un diplôme supérieur[1].
Selon les secteurs, les actifs occupés exerçant dans l’ »industrie y compris l’artisanat » enregistrent le taux de couverture médicale le plus élevé (44,5%), suivis de ceux relevant du secteur des services (37,1%), des BTP (12,0%) et de l’agriculture, forêt et pêche (5,6%).
Près de la moitié (46,5%) des salariés bénéficient d’une couverture médicale assurée par leurs employeurs ; 53,5% en milieu urbain et 27,2% en milieu rural ;60% parmi les femmes et 43,4% parmi les hommes.
Par ailleurs, un peu plus de la moitié des salariés (55,1%) ne disposent d’aucun contrat formalisant leur relation avec l’employeur (55,2% au troisième trimestre de 2019). Un peu plus du quart (25,6%) disposent d’un contrat à durée indéterminée, 11,8% d’un contrat à durée déterminée et 6,2% d’un contrat verbal. La part des salariés ne disposant d’aucun contrat s’élève à 40,5% parmi les femmes et à 58,4% parmi les hommes ; ces deux parts étaient respectivement de 41,3% et de 58,7% au troisième trimestre de 2019. Les jeunes salariés âgés de 15 à 29 ans et les personnes n’ayant aucun diplôme sont les plus touchés par le travail sans contrat avec respectivement 63,4% et 72,8%.
Un actif occupé sur 10 (10,2%) exerce un emploi de type occasionnel ou saisonnier, 13,1% en milieu rural et 8,1% en milieu urbain. Ces parts étaient respectivement de 9,7%, 12,1% et de 7,9% au troisième trimestre de 2019.
Augmentation du sous-emploi lié à la durée de travail
Conformément aux recommandations du BIT, le sous-emploi est constitué, selon l’approche de l’Enquête nationale sur l’emploi, de deux composantes, la première est liée au nombre d’heures travaillées et la deuxième à l’insuffisance du revenu ou à l’inadéquation entre la formation et l’emploi exercé.
S’agissant de la première composante, la population active occupée en situation de sous-emploi liée au nombre d’heures travaillées est passée, entre le troisième trimestre de 2019 et celui de 2020, de 380.000 à 687.000 personnes au niveau national. Le taux correspondant est ainsi passé de 3,5% à 6,8%.
La population active occupée en situation de sous-emploi lié à l’insuffisance du revenu ou à l’inadéquation entre la formation et l’emploi exercé, est passée, durant la même période, de 589.000 à 495.000 personnes au niveau national, avec un taux passant de 5,5% à 4,9%.
En somme le volume des actifs occupés en situation de sous-emploi a augmenté durant la période, de 969.000 personnes à 1.182.000, de 481.000 à 627.000 dans les villes et de 488.000 à 556.000 à la campagne. Le taux de sous-emploi est ainsi passé de 9,1% à 11,6%, au niveau national, de 7,8% à 10,5% en milieu urbain et de 10,8% à 13,3% en milieu rural.
Les catégories de la population qui ont connu les plus grandes hausses du taux de sous-emploi sont les jeunes âgées de 15 à 24 ans (+ 3,9 points), les personnes ayant un diplômé moyen (+3,3 points) et les personnes n’ayant aucun diplôme (+2,6 points).
Les secteurs ayant connu une forte hausse du taux de sous-emploi sont le BTP avec +5,3 points (de 15,5% à 20,8%) l’ »industrie y compris l’artisanat » avec +2,7 points (de 6,2% à 8,9% et les services avec +2,3 points (de 7,5% à 9,8%).
Principales caractéristiques de la population en chômage au troisième trimestre de 2020
Il est à rappeler que le nombre de chômeurs a augmenté de 368.000 personnes entre le troisième trimestre de l’année 2019 et celui de 2020, passant de 1.114.000 à 1.482.000 chômeurs, ce qui correspond à une augmentation de 33%. Cette hausse étant le résultat d’une augmentation de 276.000 chômeurs en milieu urbain et de 92.000 en milieu rural.
Près de 8 chômeurs sur 10 (79,5%) résident en milieu urbain, 71,2% sont de sexe masculin, 71,9% sont âgés de 15 à 34 ans et 31,4% sont détenteurs d’un diplôme supérieur.
Au troisième trimestre de l’année 2020, la part des chômeurs ayant déjà exercé un emploi avant de se retrouver en situation de chômage a atteint 60%, en augmentation de 15,3 points par rapport au même trimestre 2019.
Parmi les chômeurs ayant déjà travaillé sept sur dix résidents dans le milieu urbain (72,9%) et près de huit sur dix sont des hommes (77,4%).
Selon le diplôme, près de six sur dix chômeurs ayant déjà travaillé ont un diplôme (60,3%), 43,5% détiennent un diplôme de niveau moyen et 16,8% de niveau supérieur.
D’autre part, 83,8% de ces chômeurs étaient salariés, 12,5% indépendants, 53,5% travaillaient dans le secteur des services, 20,7% dans les BTP et 15,7% dans l’industrie y compris l’artisanat et 9,4% dans l’agriculture, sylviculture, pêche.
Les deux tiers d’entre eux exerçaient leurs métiers en tant que manœuvres non agricoles, manutentionnaires ou travailleurs de petits métiers (32,7%), 25,3% en tant qu’artisans ou ouvriers qualifiés des métiers artisanaux et 17,7% en tant qu’employés.
Pour ce qui est des causes du chômage de cette catégorie, la part des personnes en chômage dû au licenciement ou à l’arrêt de l’activité de l’établissement est de l’ordre de 69,6%
Principales caractéristiques de la population en dehors du marché du travail au troisième trimestre de 2020
Au troisième trimestre de 2020, les personnes en dehors du marché de travail âgées de 15 ou plus, au nombre de 15,15 millions, sont en majorité des femmes au foyer (54,9%) ou des élèves ou étudiants (24%). Les femmes représentent 73,8% de cette population.
Selon le diplôme, un peu plus de la moitié (53,4%) des personnes en dehors du marché de travail n’ont aucun diplôme, 34,7% ont un diplôme moyen et 11,7% un diplôme supérieur.