Des policiers font respecterb les distances de sécurité dans la file d'attente pour un supermarché à Hillbrow, à Johannesburg, le 27 mars 2020 © AFP MARCO LONGARI
L’Afrique du Sud a annoncé vendredi ses deux premiers morts de l’épidémie de coronavirus, quelques heures après son entrée dans une période de confinement national de trois semaines destinée à enrayer la progression inquiétante de la maladie.
« Nous réveillons ce matin les Sud-Africains avec une triste nouvelle, nous avons enregistré nos premiers morts du Covid-19 », a déclaré le ministre de la Santé Zweli Mkhize.
Selon le principal parti d’opposition sud-africain, les deux premières victimes sont deux femmes de la province du Cap-occidental (sud-ouest), âgées de 28 et 48 ans.
Le pays le plus industrialisé du continent est, de loin, le plus touché du continent en nombre de cas depuis l’apparition du Covid-19 en Chine en décembre, avec désormais plus d’un millier de contaminations recensées, selon M. Mkhize.
Face à la progression exponentielle de la maladie, le président Cyril Ramaphosa a imposé à ses 57 millions de concitoyens de rester chez eux pendant trois semaines afin, a-t-il justifié, « de prévenir une catastrophe humaine aux proportions énormes ».
« Vous êtes là pour faire la guerre à un ennemi invisible. On attend de vous (…) que vous sortiez dans les rues pour défendre notre peuple contre le virus », a lancé jeudi le chef de l’Etat, en treillis, à un détachement de soldats prêts à se déployer pour faire respecter le confinement.
L’ordre est entré en vigueur dans tout le pays vendredi à 00h00 locales (22h00 GMT jeudi), diversement respecté.
Aux premières heures de la matinée, des dizaines d’habitants des deux principales villes du pays, Johannesburg et Le Cap, ont continué comme si de rien n’était à se presser en files compactes pour prendre un minibus ou faire leurs courses, ont constaté des journalistes de l’AFP.
– Arrestations –
« Le gros problème, ce sont les magasins », a estimé l’élu en charge de la sécurité au Cap, J.P Smith. « Les gens sont autorisés à acheter à manger et à retirer de l’argent mais ils ne respectent pas les distances. Ca va prendre un peu de temps pour que ça leur rentre dans la tête ».
« Tout est plutôt calme, je pense que les gens vont finir par obéir », a déclaré à l’AFP Dumisani July, 39 ans, un employé de banque contrôlé par la police à bord du taxi qui l’emmenait à son bureau.
« Les classes moyennes et supérieures respecteront le confinement », a pour sa part anticipé Ditebogo Koenaite, une pilote de ligne. « Mais je ne pense pas que les plus modestes pourront respecter la distanciation sociale. C’est plus dur dans les quartiers pauvres ».
Dans le quartier déshérité de Hillbrow, au centre de Johannesburg, la police a procédé à plusieurs arrestations dans des bars restés ouverts après minuit, selon les médias locaux. Dans la matinée, elle a dispersé plus d’une centaine de personnes qui piétinaient devant un magasin pour y faire leurs courses.
Depuis plusieurs jours, les autorités ont exhorté la population à respecter strictement le confinement, sous peine de sanctions pouvant aller jusqu’à six mois de prison.
En Afrique, seuls la Tunisie, le Rwanda et l’île Maurice se sont jusque-là engagés sur cette voie radicale, tant ses conséquences économiques et sociales sur des populations pauvres et privées de services de base semblent risquées.
Les dix millions d’habitants de la capitale de la République démocratique du Congo, Kinshasa, seront eux aussi placés samedi en confinement « intermittent » pour trois semaines afin d’éviter la propagation du Covid-19 au reste du pays. Un premier cas de contamination a toutefois déjà été signalé dans la province du Nord-Kivu (est).
Le Sénégal, le Kenya et la Côte d’Ivoire ont préféré l’état d’urgence et des couvre-feux, moins stricts.
– ‘Courage et responsabilité’ –
La Guinée les a rejoints jeudi et ordonné la fermeture des restaurants, bars, écoles, universités, églises et mosquées pour deux semaines.
« Il y a six ans, avec courage et responsabilité, nous avons remporté la guerre face au virus Ebola », a rappelé son gouvernement, « aujourd’hui, c’est ces mêmes efforts qui nous attendent ».
Partout en Afrique, le virus a continué de progresser à une vitesse inquiétante avec environ 3.300 cas et plus de 90 décès, selon un bilan établi par l’AFP à partir de sources officielles vendredi à 11H GMT.
Le patron de la Commission de l’Union africaine (UA), le Tchadien Moussa Faki Mahamat a été placé en quarantaine après qu’un de ses collaborateurs a contracté la maladie, a-t-on appris vendredi dans son entourage.
Le gouvernement du Nigeria, le pays le plus peuplé du continent, ne compte qu’une cinquantaine de cas pour un mort mais il a dit redouter une « explosion » de l’infection parmi ses 190 millions d’habitants.
Les autorités de la mégapole de Lagos et de la capitale Abuja se sont contentées « d’inviter » la population à rester chez elle, conscientes des difficultés à faire respecter de strictes mesures de confinement.
Le président du Sénat Ahmad Ibrahim Lawan a appelé à « être inventif » pour soulager les plus pauvres. « Si nous confinons le Nigeria, ça va causer des troubles parce que la majorité de nos concitoyens ont besoin d’aller au marché tous les jours pour manger ».
En Ouganda, la police a indiqué vendredi avoir ouvert le feu et gravement blessé deux personnes qui n’avaient pas respecter les ordres de distanciation.
LNT avec Afp