Des travailleurs attendent pour un emploi journalier dans les ports de Los Angeles et de Long Beach, le 11 mars 2020 à Wilmington, en Californie pendant l'épidémie de coronavirus © Getty/AFP/Archives MARIO TAMA
En quelques semaines, le coronavirus et le confinement de millions de personnes qu’il a entraîné ont presque anéanti l’économie mondiale, au point que les économistes s’attendent à la récession la plus violente de l’histoire moderne, peut-être pire que pendant la Grande Dépression.
Elle devrait s’accompagner d’une envolée du chômage. L’ampleur du choc déprendra des remèdes insufflés par les gouvernements, banques centrales et institutions internationales, et de la durée de la crise sanitaire. Le point avant une réunion – virtuelle – d’urgence du G20.
– RECESSION OU DEPRESSION? –
« Les économies du G20 vont subir un choc sans précédent pendant la première partie de l’année et vont se contracter en 2020 avant un rebond en 2021 », présagent les économistes de l’agence de notation Moody’s.
Le secrétaire général de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), Angel Gurria, a lui estimé sur la BBC sur l’économie mondiale va souffrir « pour des années ».
La crise actuelle s’annonce plus sévère que celle de 2008 car elle touche cette fois non pas seulement le système financier mais l’ensemble de l’économie réelle, avec un effondrement de la production et donc de l’offre, et aussi de la demande, à cause de millions de personnes en confinement.
Les transports, le tourisme, la distribution sont particulièrement sinistrés, même si quelques secteurs s’en sortent mieux: la pharmacie, l’industrie liée aux équipements et produits sanitaires, le commerce alimentaire ou en ligne.
Les pays du G20 devraient subir collectivement une contraction de 0,5% de leur Produit intérieur brut (PIB) cette année d’après Moody’s. Aux Etats-Unis, elle sera de -2% et dans la zone euro de -2,2%. La Chine devrait croître de 3,3%, un rythme très faible pour ce pays, ajoute l’agence.
Pour les Etats-Unis, Goldman Sachs prévoit une année 2020 à -3,8% et Deutsche Bank la pire contraction pour l’économie américaine depuis « au moins la deuxième guerre mondiale ».
En Europe, le ministre allemand de l’Economie a parlé de récession d' »au moins » 5% en 2020 en Allemagne et pour la France, Moody’s prévoit -1,4%, tandis que Nuno Fernandes, professeur à l’IESE Business School, pronostique -2% en 2020, sur un scénario de crise sanitaire achevée fin juin.
Pour le Royaume-Uni, KPMG entrevoit une chute un peu plus sévère de 2,6%, mais qui pourrait atteindre le double si la pandémie dure jusqu’à la fin de l’été.
– CHOMAGE –
Dans la zone euro, dotée d’une réglementation du travail plus protectrice, le cabinet Capital Economics s’attend à un bond du chômage à 12% d’ici la fin juin, « annulant sept années de gains en la matière », même si une embellie devrait suivre au deuxième semestre.
Au Royaume-Uni et aux Etats-Unis, ces taux sont actuellement historiquement bas grâce au boom des emplois précaires de la « gig economy » (petits boulots).
Outre-Atlantique, où même les employés en contrat longs peuvent facilement être limogés, les économistes prévoient une augmentation vertigineuse des inscriptions au chômage: de 1 à 3 millions de personnes peut-être dès ce jeudi. James Bullard, président de la Réserve fédérale de St Louis, a même dit dans un entretien à Bloomberg que le chômage pourrait s’envoler à 30% dans les mois à venir.
– INFLATION –
L’épidémie de coronavirus fait planer beaucoup d’incertitudes sur l’évolution des prix, entre risques de dépression économique et de déflation si la demande s’écroule durablement, mais avec certaines pressions inflationnistes si les monnaies sont dévaluées, si l’on assiste à des pénuries, etc. Les taux d’inflation sont en tout cas pour l’instant faibles et généralement en deçà des objectifs des banques centrales, notamment au Royaume-Uni.
– DETTE –
Au Royaume-Uni, Carl Emmerson, de l’Institute for Fiscal Studies (IFS), explique à l’AFP que la dette à près de 90% du PIB est actuellement élevée mais qu’elle a atteint « près de 260% après la deuxième guerre mondiale ».
Le déficit des comptes publics était il y a peu encore juste en dessous de 2% comme les Conservateurs en avaient fait leur règle budgétaire – et qu’il avait grimpé à 10% pendant la crise financière de 2008.
Dette et déficits devraient en tout cas être pour l’instant le cadet des soucis des gouvernants aux manettes, d’autant que les taux de financements sont historiquement bas, affirme Jonathan Portes, professeur d’économie à King’s College London, interrogé par l’AFP. Ils semblent d’ailleurs, de Washington à Berlin, avoir pour l’instant remisé toutes les doctrines d’orthodoxie budgétaire en annonçant des plans de relance valant des milliers de milliards de dollars.
LNT avec Afp