C’est ce jeudi 17 octobre qu’un Conseil des ministres devrait approuver le Projet de Loi de Finances pour l’année 2020, (PLF 2020) dans sa mouture finale.
Ce projet, dont les grandes lignes et orientations sont déjà connues, comporte notamment des propositions aussi claires que précises destinées à ramener la confiance, cette donnée immatérielle sans laquelle il n’y a ni investissement productif, (surtout émanant du privé), ni relance économique, ni croissance du PIB.
Bien évidemment, lorsqu’il s’agit de mettre fin au climat délétère de doute, d’attentisme et de défiance qui assaille le pays depuis plusieurs mois, ce sont des actes concrets qui sont attendus pour effacer cette morosité généralisée.
Et il semble bien que cette fois-ci, le gouvernement, à travers le Ministère des Finances et le PLF 2020, ait décidé de « mettre le paquet » sur la question la plus sensible pour les Marocains, personnes physiques, et personnes morales, la fiscalité directe.
Tiercé fiscal…
Dans cette optique, le gouvernement devrait d’abord proposer une amnistie destinée à permettre le rapatriement des avoirs détenus illégalement à l’étranger par des citoyens marocains.
Sur le modèle pratiquement de l’opération menée en 2014, qui avait permis d’engranger plusieurs milliards de dirhams, une prescription libératoire sera proposée à ceux de nos compatriotes qui disposent de biens immobiliers, de comptes bancaires ou de placements non déclarés officiellement aux autorités compétentes.
Cette opération, outre qu’elle soulagera les consciences des fraudeurs qui sont toujours sous la menace de sanctions rendues encore plus probables par les accords d’échanges d’information entre les administrations marocaine et étrangères, permettrait à l’État de récupérer quelques milliards de dirhams qui ne seraient pas superflus dans la conjoncture actuelle.
La seconde « offre » de M. Benchaaboun concerne les entreprises en situation d’indélicatesse avec les services du fisc, et qui sont, on s’en doute, nombreuses dans ce cas d’espèces.
Pour celles qui ont quelque peu coupables de n’avoir pas respecté les prescriptions fiscales en matière de TVA ou d’IS, voire les deux !, le PLF 2020 prévoit de leur accorder l’opportunité d’une déclaration rectificative sans pénalités, ni majorations, (le Pérou, en somme…).
Cette disposition sera très certainement largement suivie parce qu’elle absout totalement les entreprises en question, tous secteurs d’activités confondus, elles qui ont au-dessus de leurs têtes l’épée de Damoclès que représentent les contrôles et redressements fiscaux et dont on ne sort jamais indemne, ce que bien des médecins, avocats, notaires et autres, ont pu « apprécier » au cours des derniers mois…
Là aussi, le résultat pourrait être conséquent en termes de monnaie sonnante et trébuchante pour l’État.
Enfin, parce que les personnes physiques ne sont pas toutes démunies dans notre pays et parce que le « black » a pour avantage de détenir du cash en dehors du regard inquisiteur des Impôts, le PLF 2020 fait une offre intéressante à tous ceux qui détiennent des liquidités échappant au circuit bancaire.
Cette situation, au demeurant, est tellement prégnante que l’on a constaté ces derniers mois une baisse inquiétante des dépôts à vue et des dépôts à terme auprès des banques de la place, ce qui constitue un phénomène très rare dans les systèmes bancaires.
Ainsi, les adeptes du coffre-fort à la maison, du bas de laine ou du tapis rembourré en billets de 200 et 100 dirhams, pourront ramener « leurs picaillons » dans les banques, sans autre obligation fiscale que le paiement d’une indemnité forfaitaire d’un montant de 5% des sommes déposées.
Nul doute que la crainte, jusque-là nourrie par la sévérité du Fisc ces derniers mois, d’être soumis à un contrôle fiscal impromptu s’effacerait durablement chez ces personnes physiques qui, pour un montant libératoire raisonnable, retrouveraient le chemin des agences bancaires.
Amnisties et Réformes, même combat
Ces trois amnisties sont donc, indéniablement, des mesures fortes destinées à mettre un terme à la défiance quasi-généralisée qui plombe l’économie, le système bancaire et même le moral des ménages, comme le prouve un récent constat du HCP.
Injecter des liquidités, booster les circuits financiers officiels, renflouer les caisses de l’État seraient parmi les conséquences heureuse de ces mesures inscrites au PLF 2020.
Elles auraient également pour conséquence positive d’élargir l’assiette fiscale d’une façon soft, sans effrayer les contribuables personnes physiques.
Mais surtout, elles seraient des actions concrètes à inscrire directement dans la ligne des discours royaux et notamment celui du 11 octobre dernier où le Souverain avait appelé à un sursaut collectif et à la mobilisation pour la mise en œuvre de réformes importantissimes dans les champ économique et social.
Les banques, (voir l’article de Mme Dassouli : « Après le discours royal du 11 octobre, les banques et le système financier en première ligne !»), en manque de liquidités, malgré la baisse de la réserve monétaire par Bank Al-Maghrib à 2%, seront certainement en position bien meilleure pour appliquer les orientations royales dans l’octroi de crédits et de financements aux PME-PMI, aux jeunes et même aux opérateurs de l’informel.
Les caisses de l’État seront en meilleure forme afin de financer l’investissement public dédié aux secteurs sociaux les plus nécessiteux.
Et, last but not least, l’atmosphère générale sera allégée, débarrassée de « la gueule de bois » qui l’affecte depuis longtemps, ce qui ne manquera pas d’impacter favorablement le climat des affaires et la consommation, parce que souplesse et réalisme auront caractérisé l’action des pouvoirs publics. Enfin !
Fahd YATA