Un membres des unités spéciales de la police du Kosovo aux abords du village de Cabra, près de Mitrovica, le 28 mai 2019. © AFP Armend NIMANI
Une opération de police visant le crime organisé a suscité mardi une montée de tension dans les secteurs serbes du Kosovo, où elle s’est heurtée à « une résistance armée », a annoncé le ministère kosovar de l’Intérieur.
Plusieurs personnes ont été arrêtées, dont des policiers, a dit le Premier ministre kosovar Ramush Haradinaj, ajoutant qu’elles étaient soupçonnées de faits de « contrebande » et de liens avec le « crime organisé ».
Quatre douaniers ont également été interpellés, selon leur administration. Le nombre exact de personnes arrêtées n’a pas été précisé par la police, qui a indiqué qu’il s’agissait de membres des communautés albanaise, serbe et bosniaque.
A Belgrade, le président de la Serbie Aleksandar Vucic a dénoncé cette opération, et ordonné la mise en état d’alerte des unités de l’armée serbe.
Cette mesure est prise à intervalles réguliers à l’occasion des épisodiques montées de tension dans le nord du Kosovo, peuplé majoritairement de Serbes. L’armée « protégera notre peuple en cas de menace sérieuse », a prévenu le président serbe.
Chargée de la sécurité et de l’intégrité territoriale du Kosovo, la force internationale menée par l’Otan (Kfor) a confirmé qu’il s’agissait « seulement d’une opération de police » consécutive « à des mandats d’arrêt délivrés par un tribunal de Pristina en relation avec une enquête de corruption ».
– Un policier blessé –
« Les gens doivent garder leur calme, ils n’ont rien à craindre », selon la Kfor. A la mi-journée, la situation était calme mais tendue dans la partie serbe de la ville divisée de Mitrovica, a constaté une correspondante de l’AFP.
Dans les municipalités majoritairement serbes du nord du Kosovo, notamment dans la partie nord de Mitrovica, les autorités de Pristina peinent à imposer leur souveraineté et chaque opération policière se heurte à une réaction hostile.
La Serbie, pas plus que la population serbe vivant au Kosovo, ne reconnaissent l’indépendance de cette ancienne province, majoritairement peuplée d’Albanais.
Lors de cette opération, un policier kosovar a été blessé et hospitalisé sans que ses jours ne soient en danger, a déclaré aux médias Agim Bahtiri, le maire de la partie albanaise de Mitrovica.
Sous couvert d’anonymat, un responsable de la communauté serbe a fait état d’un échange de tirs dans la commune de Zubin Potok, où selon les médias les incident sont éclaté quand la police a entrepris de franchir des barricades érigées par les habitants. Deux Serbes y ont été légèrement blessés, selon les journalistes locaux citant des témoins.
– Relations exécrables –
Cette opération intervient à un moment difficile des relations entre Pristina et Belgrade, dont les discussions de normalisation sont au point mort depuis des mois. Un récent sommet à Berlin, sous l’égide de la chancelière allemande Angela Merkel et du président français Emmanuel Macron, n’a pas accouché de résultats tangibles.
Lundi, disant aux députés serbes s’attendre « chaque jour, chaque mois » à une attaque contre les Serbes du Kosovo, Alexsandar Vucic avait répété que le dialogue ne reprendrait pas tant que le Kosovo n’aurait pas levé la barrière douanière imposé aux produits serbes depuis l’automne.
Ramush Haradinaj a prévenu que ces droits de douane de 100% ne seraient abrogés que si Belgrade reconnaissait son ancienne province.
Le Kosovo est reconnu par quelque 110 pays, dont la plupart des nations occidentales. Mais la Russie et la Chine notamment s’y opposent, ce qui lui ferme la porte de l’ONU.
Selon les estimations, quelque 120.000 Serbes vivent toujours au Kosovo, dans le nord et dans une dizaine d’enclaves.
Belgrade a perdu le contrôle du Kosovo il y a vingt ans, quand une campagne de frappes de l’Otan avait forcé Slobodan Milosevic à retirer ses troupes, mettant un terme à un conflit qui avait fait plus de 13.000 morts (dont 10.000 Albanais). Le Kosovo avait été placé sous protection internationale, avant de proclamer son indépendance en 2008.
Sa sécurité est toujours menée par une force internationale menée par l’Otan.
LNT avec Afp