La compagnie d’assurance Atlanta a réalisé un bon exercice 2018 malgré plusieurs facteurs qui ont impacté négativement le secteur en son entier. Dans l’entretien qui suit, M. Jalal Benchekroun, Directeur général d’Atlanta, explique les différentes articulations de la politique « win-win » de cette compagnie d’assurance.
La Nouvelle Tribune :
M. Benchekroun, le secteur des assurances connait une sinistralité auto qui a sérieusement impacté les résultats techniques des compagnies.
Qu’en est-il pour Atlanta ? Quels sont les comportements de son chiffre d’affaire Non Vie ou dommage, de son résultat et quel impact sur son résultat net et la solidité financière de la compagnie ?
Jalal Benchekroun :
Effectivement, la sinistralité de l’assurance Automobile a connu une aggravation importante sur les cinq dernières années et ce, au niveau de tout le marché.
Le nombre des sinistres Automobile matériel a cru d’une manière exceptionnelle allant jusqu’ à impacter les résultats techniques de toutes les compagnies de la place.
Au niveau d’Atlanta Assurances, dès que nous avons constaté le début de la dégradation de la sinistralité Automobile de notre portefeuille, nous avons déployé un certain nombre d’actions qui nous ont permis, d’une part, de ne pas être aussi impacté que nos confrères et, d’autre part, de commencer un redressement de la situation depuis 2018.
Lesdites actions ont été menées en parallèle à d’autres chantiers relatifs au développement de notre chiffre d’affaires tels que l’extension de notre réseau exclusif, l’amélioration de nos processus de gestion et l’innovation dans notre offre produit.
Tout cela nous a permis de réaliser une croissance globale au 31/12/2018 de 7,1 % avec une croissance sur le segment Non vie de 5,8 % en ligne avec la croissance du marché. Par ailleurs, notre résultat Net a progressé de 14,5 % et ce, grâce à la maitrise de la sinistralité et à l’évolution du rendement des placements financiers. Enfin, nos capitaux propres se sont appréciés de 4,1 %.
La fédération des assurances a convenu de différentes mesures de lutte contre ce fléau, pouvez-vous partager avec nos lecteurs les différentes dispositions et décisions en la matière ?
Devant l’évolution de la sinistralité sur le marché des assurances Automobile, l’ensemble des acteurs ont pris conscience de la nécessité de prendre les mesures nécessaires pour améliorer la rentabilité de la branche tout en évitant une augmentation généralisée des tarifs qui impacterait tous les automobilistes.
Bien évidemment, chaque compagnie a pris des mesures propres à elle en fonction de sa situation et sa politique.
Toutefois, il a été décidé par les membres, de prendre des mesures au niveau de la Fédération Marocaine des Sociétés d’Assurance et de Réassurance (FMSAR). La première mesure était de lancer une étude permettant de comprendre le phénomène.
Cette étude, menée par un cabinet indépendant, a montré qu’il y a des raisons « normales » à l’évolution de la sinistralité tels que le renouvellement du parc, l’augmentation de la densité des voitures, le changement du comportement des consommateurs, etc.
En revanche, d’autres facteurs sortis de l’étude sont liés notamment à l’augmentation de la fraude et aux modes d’indemnisations suivis par les compagnies d’assurances.
Aussi, les membres de la FMSAR ont pris un certain nombre de mesures visant à lutter contre la fraude et à moraliser le risque Automobile tout en veillant à ne pas détériorer le service rendu au client. Il s’agit principalement de :
- La révision de la Convention d’Indemnisation Directe (C.I.D) conclue entre les opérateurs de la place et ce, pour responsabiliser au maximum les gestionnaires d’indemnisation tout en simplifiant les procédures de gestion en faveur des clients (expertise contradictoire, etc.) ;
- Le développement d’un certain nombre d’outils (Web Services) au sein de la FMSAR donnant accès aux gestionnaires des compagnies d’assurances et aux intermédiaires à des informations relatives aux assurés. Le but étant d’éviter les phénomènes de multi assurances et de sinistres indemnisés plusieurs fois ;
- Le relèvement du seuil d’indemnisation sans expertise et la limitation du nombre d’indemnisation sans réparation.
La fraude institutionnalisée a contribué lourdement à l’augmentation de la sinistralité de l’automobile, comment se concrétise-t-elle et comment avez-vous convenu de l’arrêter au niveau du secteur des assurances ?
Comme je l’ai dit ci-dessus, l’augmentation de la sinistralité provient d’abord d’un certain nombre de raisons « normales ». J’ai cité le comportement des consommateurs, le renouvellement du parc, l’augmentation de la densité des voitures et je peux ajouter également la politique des compagnies d’assurance en terme de souscription (tarifs, franchises, etc.) et de gestion des sinistres.
Toutefois, il est vrai que le phénomène de la fraude s’amplifie et impacte encore plus la sinistralité sur le marché. A ce titre, nous pouvons parler de deux types de fraudes :
- Fraudes « mineures » consistant à une indemnisation supérieure au préjudice subi (gonflement des devis, se faire indemniser des dégâts qui ne sont pas consécutifs à l’accident, Présenter un devis de concessionnaire pour avoir une indemnisation sans réparation et réparer ailleurs ou ne pas réparer du tout, etc.) ;
- Fraudes « majeures » consistant à fabriquer des sinistres fictifs et / ou se faire indemniser sur un même sinistres plusieurs fois. Ainsi, l’étude menée par la FMSAR susvisée a permis de détecter des assurés qui s’assurent au même temps chez plusieurs assureurs et se font indemniser les mêmes dégâts auprès de tous les assureurs. D’autres cas se font indemniser sans réparer les dégâts et présentent ensuite chez un autre assureur le même sinistre. Il faut noter que suite à l’identification de ces cas, des procédures judiciaires ont été engagées et des peines d’emprisonnement sont actuellement purgées par des fraudeurs.
L’analyse des différents cas a été faite au niveau de la FMSAR et les mesures concrètes pour les contrer ont été décidées telles que mentionné ci-dessus.
Atlanta a-t-elle pris des dispositions propres pour lutter contre la sinistralité croissante ?
Dès les premiers signes de l’aggravation de la sinistralité, nous avons mis en place tout un dispositif qui a démarré par l’assainissement de notre portefeuille et la révision de notre politique de souscription automobile.
Nos gestionnaires sinistres sont aussi sensibilisés pour être extrêmement vigilants devant les clients qui déclarent plusieurs sinistres. Toutefois, nous ne voulons pas que cette vigilance impacte la majorité des clients qui sont honnêtes et sérieux et c’est toute la difficulté de l’exercice.
Benchekroun comment Atlanta compte -elle rétablir une certaine vérité des prix en matière d’assurance automobile
Comme je viens de le dire, nous avons revu notre politique de souscription depuis fin 2017, mais nous ne voulons pas pénaliser la majorité des clients qui sont honnêtes et sérieux.
Aussi, nous ajustons nos tarifs des garanties annexes en permanence en fonction d’un certain nombre de critères pertinents.
Par ailleurs, nous avons travaillé depuis le début 2018 sur une nouvelle approche du risque automobile qui implique la protection des intérêts des assurés.
C’est grâce à cette démarche que nous avons lancé en décembre 2018 l’Assurance RC rechargeable by Atlanta. Une assurance auto qui donne la liberté à l’assuré de choisir les garanties complémentaires et la latitude de les souscrire pour la période de son choix avec à la clé des tarifs très compétitifs et raisonnables qui démarrent à partir de 20 DH.
Cette nouvelle méthode de tarification répond à un besoin chez l’assuré et donne l’occasion à la compagnie de développer la souscription aux garanties complémentaires tout en étant rationnelle et compétitive au niveau de la tarification.
Entretien réalisé par Afifa Dassouli