Il y a tout juste dix ans que la faillite de Lehman Brothers est intervenue ! Ce fut le 15 septembre 2008 que ce plus gros drame de la crise financière américaine se produisit, plusieurs décennies après la chute de Wall Street en 1929.
Les médias occidentaux, presse écrite et télévisée, ont tenu à marquer ce malheureux anniversaire, qui a enclenché une crise financière sans égal au niveau mondial, puis se transformant en une crise économique durable.
Toutefois, de façon unanime, tout en reconnaissant la pertinence du renforcement réglementaire des systèmes bancaires et des produits financiers pour éviter qu’une telle crise ne se reproduise, ils dénoncent la persistance de déséquilibres au niveau du système financier mondial.
En effet, nombre d’économistes et spécialistes de la finance attestent, 10 après cette crise dévastatrice, et malgré que les États et les banques centrales aient lutté vigoureusement pour en atténuer les conséquences, de la précarité du système financier mondiale actuel.
Certes, depuis la crise de 2008, de très importants efforts ont été réalisés, sous la pression des autorités prudentielles, pour étayer les fonds propres des banques qui ont atteint quelque 1.500 milliards de dollars au total, renforçant de fait le système financier international. Mais, dans la pratique, tout en solutionnant les conséquences de la crise financière de 2008, on a omis sa principale cause, le surendettement.
Mêmes causes, mêmes effets !
Tous rappellent que le surendettement qui avait été à l’origine de cette crise perdure, faisant peser les risques qui lui sont associés sur l’économie mondiale.
C’est ainsi qu’en 2001, la dette publique privée ne représentait que 61 % du PIB, en 2007 elle était à 116 % et aujourd’hui, selon le FMI elle en pèse 225 %. En milliards de dollars, elle a plus que doublé passant de 143.000 d’actifs en 2003 à 340.000, en 2016.
Certes, les banques centrales ont contribué par leurs achats d’actifs dans le cadre de leur politique de rachats des dettes à en soulager le poids pour les porteurs publics et privés.
Par exemple, la Banque Centrale Européenne (BCE), a vu son bilan passer de 1.000 à plus de 4.500 milliards d’euros sur cette période.
Mais les États n’ont pas été en reste avec des dépassements de déficits publics importants.
Le FMI encourageait ceux-ci à une politique expansive pour éviter que la dépression ne s’aggrave, courant le risque les voir gonfler massivement leurs déficits et leur endettement.
En 2009, les insuffisances budgétaires approchaient 9 % du PIB dans les pays avancés, soit sept fois plus qu’en 2007, alors qu’en novembre 2008, la Chine a lancé un plan de relance de plus de 500 milliards de dollars, financé en grande partie par la dette.
Par ailleurs, pour faire face à la crise, il a fallu relancer la demande et donc faciliter le recours au crédit.
En fait, soigner le mal par le mal, c’est un peu ce que l’économie mondiale a fait depuis la chute de la maison des frères Lehman.
Alors que la crise de 2008 s’explique largement par un excès d’endettement des ménages américains facilité par des instruments sophistiqués, le monde n’a trouvé comme autre solution pour s’en sortir que celle de s’endetter encore plus.
De plus, depuis 10 ans, l’endettement privé a été aussi largement facilité par la politique monétaire des banques centrales basées sur la baisse des taux à zéro.
En conséquence, la dette mondiale qui a atteint un nouveau sommet historique de 164.000 milliards de dollars en 2016, à 225 % du PIB mondial, est imputable à 63 % au secteur privé non financier et à 37 % au secteur public.
De ce fait le système financier mondial en est devenu très vulnérable et sujet à de nouveaux chocs.
De plus, si la majorité du stock de dette est due aux pays développés, la hausse de la dette au cours des dix dernières années provient en grande partie des pays émergents.
La Chine, tout particulièrement, est responsable de 43 % de l’augmentation de la dette mondiale depuis 2007.
Et nous ?
Le Maroc, toute proportion gardée, ne fait pas exception à cette accumulation de dettes constatée au niveau mondial !
L’État affiche un déficit public qui s’aggrave et donc un taux d’endettement qui dépasse les 60% du PIB.
Les banques ne cessent de s’endetter pour financer leur croissance notamment en Afrique en utilisant des produits financiers de plus en plus sophistiqués comme les obligations subordonnées et même perpétuelles.
Les entreprise également ont aggravé leur endettement avec la crise économique, depuis laquelle les crédits de trésorerie ont explosé et les crédits d’investissement réduits à leur plus bas niveau.
Et elles continuent à vivre de beaucoup de dettes et de peu de capitaux propres !
Quant au crédit à la consommation, il est à un très haut niveau parce que servi par les banques et les sociétés de financement pour financer essentiellement l’automobile, mais aussi et surtout permettre aux ménages de faciliter leurs fins de mois.
En réalité, jusqu’à présent, la reprise économique n’a pas été assez forte pour créer suffisamment de revenus, ce qui a poussé l’endettement à un plus haut record.
Seule la pérennité de la croissance et économique avec une remontée de l’inflation permettra une contraction de l’endettement mondial !
A défaut, le risque d’une nouvelle crise financière restera entier …
Afifa Dassouli