Agadir, janvier 2017, Agadir février 2018, la boucle est complète pour Aziz Akhannouch et le parti qu’il a pris en main depuis la lourde défaite électorale subie à la fin de l’année 2016 par le Rassemblement National des Indépendants, alors sous l’autorité de Salah Eddine Mezouar.
Une année, voir un peu plus, pour mettre en ordre de marche (et de bataille) cette organisation qui était connue jusque-là pour être un parti de notables, d’apparatchiks, d’ambitieux et de carriéristes.
En prenant en main les destinées du RNI, » Monsieur Agharass « , le nom qu’on lui donne depuis son premier meeting ex officio à Agadir, n’avait pas le projet habituel des hommes politiques, celui de s’organiser et d’organiser autour de lui pour promouvoir sa propre personne (et quelques amis accessoirement).
Parce que M. Akhannouch n’est pas un homme politique au sens commun du terme.
La longue marche
Il a d’abord eu une carrière féconde de businessman, d’investisseur averti, d’opérateur dynamique, avant d’entrer dans le champ de la représentation publique, en tant qu’élu municipal, régional, puis de parlementaire, pour entamer par la suite une (déjà) longue carrière ministérielle incontestablement marquée au sceau de la réussite.
Il est certain donc que l’actuel dirigeant du RNI n’est pas en quête d’un regain de popularité personnelle, ni de profits matériels, lui qui est, par ailleurs, doté d’une belle fortune.
Alors, qu’est-ce qui fait » bouger » Aziz Akhannouch qui s’est attelé avec détermination à la transformation du RNI en un véritable parti politique ?
Très certainement, son patriotisme, lui qui a grandi sous l’aura de son défunt père, militant reconnu et respecté pour l’indépendance nationale et qui fut emprisonné dans des conditions très dures pour sa participation au Mouvement national et à la Résistance sous le Protectorat.
Et s’il a abordé tardivement les rivages de la politique, c’est qu’il avait d’abord à prouver ses compétences managériales lorsque le rappel à Dieu de son père, feu Haj Hmad Oulhaj, le mit dans l’obligation de prendre en main les destinées du Groupe Akwa.
Aujourd’hui, après une année d’un travail en profondeur de restructuration du RNI, de mise en place de plusieurs organisations satellites (Jeunes, Femmes, Professions libérales), de tenue de congrès régionaux (13 en comptant les Marocains du Monde), dès le lendemain du congrès de la refondation en mai dernier à El Jadida, plus personne ne conteste la posture d’homme d’État de Aziz Akhannouch, ni sa place éminente parmi le groupe restreint des leaders politiques nationaux.
Et s’il a pris cette dimension, qui se matérialise notamment par une plus grande aisance oratoire, c’est sans doute qu’il a acquis la conviction que le champ politique lui convenait parfaitement.
Comment pourrait-il en être autrement d’ailleurs, lui qui a très rapidement inscrit à son tableau de chasse, l’éviction de Abdelilah Benkirane de la course à la chefferie du gouvernement ?
Para bellum…
Posant ses exigences et conditions, il entreprit avec succès la mise à l’écart du bouillant tribun populiste du PJD au profit de son second, plus pondéré et plus policé, M. Saad Eddine El Othmani.
C’est Aziz Akhannouch qui a le plus contribué au règlement définitif de la crise politique qui perdura durant six mois, alors que le RNI, malgré sa faiblesse relative en termes de représentation parlementaire, était devenu incontournable dans tous les scenarii de constitution d’une majorité sous l’égide du PJD.
Et c’est cet homme désormais qui a pris le pari de faire de son parti, le Rassemblement National des Indépendants, la force politique centrale de la scène nationale.
Rien n’est laissé au hasard ou à l’improvisation pour cette entreprise qui exprime clairement la volonté de ses initiateurs de permettre au RNI de devenir le leader du camp moderniste et libéral et la principale force d’opposition à la mouvance islamo-conservatrice.
Dans cet objectif, outre l’érection d’un grand parti politique au sens le plus complet du terme, Aziz Akhannouch a présenté, avec force détails, chiffres et projections, le contenu d’un véritable programme de gouvernement, plaçant ainsi le RNI en force de propositions concrètes pour une perspective d’action que l’on imagine mal ne devoir se concrétiser qu’au terme de l’actuelle législature.
Et c’est sans doute à ce niveau que s’esquisse une nouvelle réalité, celle qui veut que le RNI et son dirigeant soient pressé d’en finir avec l’actuelle majorité…
Bien évidemment, Aziz Akhannouch se garde bien de l’exprimer haut et fort !
Mais, lorsqu’on décline une démarche programmatique détaillée et crédible, lorsqu’on met en avant les trois principales plaies du pays et revendications du peuple, Emploi, Santé et Éducation, lorsqu’on érige une commission de désignation des candidats aux postes électifs (4 ans avant 2022 !!!), lorsqu’on fait preuve de combativité oratoire et d’assurance comme l’a montré Aziz Akhannouch lors du meeting d’Agadir le 24 février dernier, c’est bien parce que l’on se prépare à en découdre avec le PJD, cette force qui représente le nadir (à vos dictionnaires !) du RNI.
N’est-il pas surprenant, par exemple, que les propositions du RNI sur l’Emploi, la Santé et l’Éducation soient faites aujourd’hui, alors que ces secteurs ne sont pas entre les mains des actuels ministres du RNI ?
N’est-il pas intéressant de constater que M. Aziz Akhannouch propose des actions (recrutements, formation, santé) très précises dès aujourd’hui alors que le mandat de l’actuelle majorité court jusqu’à la fin de 2021 ?
Ne serait-il pas, malgré la récente signature d’un pacte de bonne conduite de la majorité, que les jours de cette coalition sont désormais comptés ?
L’avenir nous le dira, mais, d’ores et déjà, à chacun de comprendre que désormais, il faudra compter avec Aziz Akhannouch et le RNI, volens, nolens…
Fahd YATA