Le 24 janvier 1944, la conférence d'Anfa réunit le général Giraud, Franklin Roosevelt, le général de Gaulle et Winston Chruchill
Ces deux hommes, rappelons-le, marquèrent l’histoire de la deuxième guerre mondiale, 1939-1945. En 1943, du 14 au 24 janvier de cette année exactement, ces deux leaders se retrouvèrent à Casablanca pour une conférence qualifiée d’extrêmement stratégique pour la marche vers Berlin. Et pour le Maroc, ce fut le début d’une marche irréversible vers l’indépendance.
Car c’est à cette occasion que le Président américain Roosevelt annonça, dans le cadre de la Charte de l’Atlantique, son soutien inconditionnel au droit d’autodétermination des peuples. Le Premier ministre britannique Churchill fut, lui, très gêné par la position américaine.
Le directeur des archives de Churchill, Allen Packwood, explique à ce niveau que la conférence d’Anfa constitua un moment clé dans l’histoire du Maroc, dans la mesure où elle fut une étape importante dans le processus d’indépendance du Royaume. Et de faire savoir que Churchill avait des relations distinguées avec le Maroc, rappelant que la première visite qu’il a effectuée au Royaume, bien avant la Conférence d’Anfa, l’avait emmené dans plusieurs villes telles que Tanger et Marrakech.
Pour le politologue et historien marocain Hassan Aourid, la Conférence d’Anfa a constitué un tournant déterminant dans l’histoire contemporaine de l’humanité et du Maroc. Il a indiqué, à ce propos, que les États-Unis ont apporté un soutien majeur aux peuples désirant, à l’époque, s’affranchir du colonialisme, dans le cadre de la Charte de l’Atlantique (1941).
Vers l’Istiqlal…
Les décisions prises lors de la Conférence d’Anfa ont eu un impact majeur sur le paysage politique marocain, a-t-il argué, précisant que Feu SM Mohammed V avait saisi l’opportunité de la présence des leaders des Alliés (États-Unis, Grande-Bretagne et France) pour soumettre la revendication de l’indépendance du Maroc et la proposition d’adhésion du Royaume à la Charte Atlantique. Et de poursuivre que le Sultan Sidi Mohammed Ben Youssef avait alors discuté de ces points avec le président Roosevelt, qui avait exprimé son soutien aux revendications nationalistes marocaines, apportant son aide à la lutte du Maroc pour l’indépendance.
Joseph Staline, le leader soviétique, devrait être de la partie, mais pour différentes raisons, l’invitation n’a pas abouti. A noter qu’avant l’étape d’Anfa, le président Roosevelt se rendit en Russie pour l’ouverture d’un deuxième front contre les Nazis.
Le Général De Gaulle, lui, accepta difficilement l’invitation, émettant beaucoup de réserves. Le Maroc était considéré par les Français comme pays sous protectorat, et ainsi sa politique étrangère dépendait de la Résidence Générale. Ce fut alors un coup dur pour le Général !
Dans le même sens et par la même occasion, le président américain Franklin Roosevelt et le Premier ministre britannique Winston Churchill invitèrent les généraux français Henri Giraud et Charles de Gaulle à se réunir à l’hôtel d’Anfa. Sans surprise, Giraud, ne s’y opposa pas. De Gaulle, lui, hésita, car il n’était pas en très bons termes avec Giraud. Mais Roosevelt et Churchill avaient bien l’intention de réconcilier les généraux français, en plus de prendre des décisions à propos de l’invasion de la Sicile et du reste de l’Italie, et de l’aide à apporter à l’URSS.
Le grand virage
Politiquement, il fallait parvenir aussi à un consensus avec les Français, gênés par cette escale américano-britannique à Casablanca. Car, pour les alliés, la conquête de Berlin devait démarrer à partir de la France, alors qu’à l’époque, l’Hexagone avait signé un « accord d’entente » avec l’Allemagne.
C’est dire que l’alliance ne fut guère aisée. La conférence d’Anfa, contrairement à celles de Téhéran et de Yalta, fut un espace permettant le rapprochement des points de vue et des visions.
Sur le plan militaire, la Conférence d’Anfa permit aussi la mise en place des premiers jalons d’une alliance militaire conjointe entre particulièrement la Grande Bretagne et les Etats Unis. Pour Packwood, la rencontre d’Anfa a rendu possible un accord entre les Américains et les Britanniques, pour élaborer la stratégie qui les a menés à la victoire.
De quoi en conclure que la Conférence d’Anfa de 1943 ne fut guère un sommet protocolaire. Loin de là. Ce fut un tournant vers la fin d’une des guerres les plus douloureuses, meurtrières et dévastatrices de l’histoire humaine.
La Conférence d’Anfa a aujourd’hui 75 ans. Selon l’ambassadeur de la Grande-Bretagne au Maroc, Thomas Reilly, organisateur de cette conférence à la Bibliothèque nationale de Rabat, samedi 20 janvier 2018, cette étape fut décisive dans l’histoire de la deuxième guerre mondiale. Et de souligner que pour les Alliés, l’objectif de la Conférence d’Anfa était d’élaborer les différents scénarii pour une issue victorieuse de la guerre et de se préparer à un nouvel ordre mondial qui régirait les nouveaux rapports de force et les relations internationales. Néanmoins et tant d’années après, la paix mondiale escomptée reste menacée en permanence.
Hassan Zaatit
La petite fille de Roosevelt…
A Bibliothèque Nationale de Rabat, Laura Roosevelt s’est remémorée avec beaucoup de bonheur les derniers moments, où le président américain a décidé de se rendre au Maroc pour assister à la réunion d’Anfa, précisant que c’était la première fois qu’un président américain quittait son pays en temps de guerre vers l’Afrique. La petite-fille de Roosevelt a dit avoir visité le Maroc auparavant, à l’invitation de feu SM Hassan II, à l’occasion du 50-ème anniversaire de la Conférence d’Anfa, confiant qu’elle s’est alors rendue à Marrakech, la ville où Churchill et Roosevelt admiraient le coucher du soleil et la splendeur des montagnes de l’Atlas. Laura a indiqué également que son grand père et Churchill s’appréciaient beaucoup, étaient souvent en désaccords, mais qu’ils avaient beaucoup de valeurs en commun, notamment la libération du monde du nazisme.