Niger: la mort de soldats américains révèle leur présence au Sahel
La mort de trois soldats américains dans une embuscade au Niger a révélé au grand jour à quel point les forces américaines sont impliquées dans la lutte contre les jihadistes dans la région.
Le commandement militaire américain pour l’Afrique a confirmé jeudi matin que trois de ses hommes avaient été tués « au cours d’une opération anti-terroriste menée conjointement avec les forces nigériennes à quelque 200 kilomètres au nord de la capitale Niamey dans le sud-ouest du Niger ».
Ce sont les premiers morts américains au combat dans le cadre de la mission de lutte contre les groupes jihadistes dans cette région. Un militaire américain était mort dans un accident de voiture au Niger en février.
Un quatrième militaire « d’une nation partenaire » a également été tué au cours de cette opération, mais Africom ne précise pas la nationalité du tué: nigérien ou d’une autre nationalité.
Deux soldats américains ont aussi été blessés et ont été transportés vers l’hôpital militaire américain de Landstuhl en Allemagne, où leur état de santé « est stable ».
L’embuscade, a assuré à l’AFP une source sécuritaire régionale, est l’oeuvre « d’hommes lourdement armés venus du Mali » et « a visé une patrouille de soldats nigériens et américains, certainement des instructeurs ».
– Nombreuses victimes –
Selon les médias, les soldats américains sont tous des membres des bérets verts, les forces spéciales de l’armée de Terre qui sont spécialement entraînées pour former et conseiller des troupes régulières étrangères ou des guérillas.
Selon Radio France Internationale (RFI), les soldats américains et nigériens sont tombés dans un guet-apens après s’être lancés à la poursuite d’assaillants qui venaient d’attaquer le village de Tongo Tongo, dans la région Nord-Tillabéri.
Le lourd bilan témoigne de la violence de l’accrochage et l’opération était toujours en cours jeudi dans la journée, selon le porte-parole de l’état-major français, le colonel Patrick Steiger, sans plus de précisions.
Il a aussi indiqué que lors de l’embuscade, une patrouille de Mirage 2000 français a permis de faire une démonstration de force mais n’a pas pu apporter d’appui direct au sol –tir ou bombardement– en raison de « l’imbrication (de forces) au sol ».
L’armée française a aussi mobilisé deux modules d’évacuation médicale composés hélicoptères qui ont permis d’extraire des blessés en direction de Niamey.
A Niamey, le président nigérien Mahamadou Issoufou a affirmé que le Niger a été frappé par une attaque « terroriste » ayant fait un « nombre important de victimes ».
« Notre pays vient une fois de plus de faire l’objet d’une attaque de groupes terroristes, attaque qui s’est soldée malheureusement par un nombre important de victimes », a-t-il déclaré, mais sans donner de précision sur leur nombre exact.
– Base américaine –
Les Américains sont très présents au Niger, notamment sur l’aéroport d’Agadez (nord) avec une base gérant des drones qui surveillent la zone sahélienne. Les militaires opérant sur cette base ne sortent toutefois qu’extrêmement rarement de cette position.
En plus de cette base, des forces spéciales américaines et des instructeurs sont présents dans le pays depuis les années 2000 pour former les militaires nigériens. Ces soldats effectuent des missions dans tout le pays et un journaliste de l’AFP a déjà rencontré des soldats américains à Niamey, mais aussi à Diffa (sud-est), une zone où sévit le groupe islamiste nigérian Boko Haram.
En octobre 2015, le Niger et les Etats-Unis avaient notamment signé un accord militaire sur « la sécurité et la bonne gouvernance » qui prévoit que les deux pays s’engagent « à travailler ensemble sur la lutte contre le terrorisme ». L’armée américaine doit aussi « former les militaires nigériens dans la lutte contre le terrorisme », selon cet accord.
« Il y a ponctuellement des missions de renseignement et de formation de soldats américains ou français un peu partout dans le pays », souligne une source militaire occidentale.
Mi-septembre, Niamey a prolongé l’état d’urgence en vigueur depuis mars dans la zone « devant la persistance de la menace » des « groupes terroristes », notamment venus du nord du Mali voisin. Mi-juin, l’armée nigérienne a monté une nouvelle opération militaire à partir de la région de Tillabéri pour mieux combattre les jihadistes.
Outre les Américains, la France, ancienne puissance coloniale et partenaire privilégié du Niger, compte une base sur l’aéroport de Niamey à partir duquel opèrent des avions de chasse Rafale et des drones. Dans le cadre de l’opération Barkhane, les forces spéciales françaises disposent aussi d’une base à Madama, dans le nord nigérien.
L’Allemagne a aussi commencé la construction d’une base aérienne logistique d’appui à la mission onusienne au Mali (Minusma).
LNT avec AFP