Pour de nombreux citoyens et plusieurs observateurs, l’épisode très récent de l’élection de M. Habib El Malki, député de l’Union socialiste des Forces Populaires, à la présidence de la Chambre des Représentants, tient plus du surréalisme que de la politique !
Et ceux-là de faire remarquer qu’il s’agit incontestablement d’une grande première dans les annales des démocraties parlementaires modernes. C’est sans doute vrai !
En effet, a-t-on jamais vu un responsable politique dont la formation est classée parmi les dernières au vu de résultats d’élections législatives, accéder à la présidence d’un parlement, sans aucun concurrent et grâce aux suffrages de collègues qui, réunis malgré leurs différences partisanes, assurent à ce dernier le nombre EXACT pour constituer une majorité qualifiée à la Chambre, soit 198 suffrages ?
Cette situation est effectivement des plus originales, mais qui en porte la responsabilité sinon ceux qui, avec acharnement, prétendent depuis plus de trois mois imposer leur diktat politique du fait d’une victoire relative (arithmétiquement parlant) lors du scrutin du 7 octobre dernier ?
M. El Malki, qui « pèse » vingt parlementaires, a ainsi damé le pion aux 125 élus du PJD, à la centaine de représentants du PAM, aux dizaines de parlementaires du PI, etc.
Cette élection, dictée par la nécessité de garantir la légalité de l’acte de candidature du Royaume à l’Union Africaine, dans les jours à venir, a permis d’illustrer de façon quasi caricaturale, l’humiliante défaite subie en fait par le PJD, ses dirigeants et alliés et tout particulièrement M. Abdelilah Benkirane.
Aujourd’hui, alors que son communiqué laconique mettant fin aux discussions avec la coalition emmenée par le RNI est encore dans toutes les mémoires, le chef de gouvernement pressenti se trouve dans une situation inextricable.
Il a en face de lui 198 parlementaires qui ont voté pour le représentant d’un parti totalement récusé par le PJD et ses (maigres) alliés.
Le PJD, n’a, d’ailleurs, eu d’autre choix que de refuser l’affrontement et, partant, l’humiliation publique qu’aurait représentée la défaite d’un candidat au perchoir issu de ses rangs !
Mais désormais, que va-t-il se passer ?
On peut logiquement penser que l’éventualité de la constitution d’un gouvernement est repoussée de plusieurs jours et semaines du fait d’un déplacement royal en Afrique et de la tenue du sommet de l’UA à Addis-Abeba.
On peut également estimer que le RNI de M. Aziz Akhannouch, au lendemain d’un meeting réussi à Agadir, ne semble guère pressé, voire désireux de reprendre langue avec le PJD.
Car, comme précisé il y a plus d’un mois par Aziz Akhannouch lui-même, le parti de la Colombe n’est pas demandeur…
On doit, d’autre part, souligner qu’il existe aujourd’hui, depuis l’élection de M. El Malki, une majorité parlementaire constituée de partis qui, peu ou prou, n’ont pas vraiment envie de « servir la soupe » à M. Abdelilah Benkirane et à ses amis.
Et si ce dernier a obtenu une majorité relative de votes lors des législatives, le déroulement de l’élection du président de la Chambre des Représentants prouve amplement qu’elle ne sert plus à rien et surtout pas les prétentions du parti islamiste.
Par son entêtement, son leader a d’abord installé une crise institutionnelle durable en notre pays, privé son parti, ensuite, des fruits de sa pole position aux législatives, réussi, enfin, à créer contre lui un bloc de formations politiques bien décidées à lui faire chèrement payer son attitude d’intransigeance.
Et se pose donc, de nouveau, cette question qui devrait devenir une litanie, déjà publiée dans les colonnes de La Nouvelle Tribune : « Abdelilah, où est ta victoire » ?
La politique, dit-on, est l’art du possible. Une maxime sans nul doute absente de l’esprit des dirigeants du PJD…
Fahd YATA